Une joute oratoire enlevante entre professeurs et chargés de cours
- Forum
Le 6 septembre 2018
- Martin LaSalle
Cinq professeurs et chargés de cours ainsi qu’une récente diplômée ont pris part à une joute oratoire enlevante, la semaine dernière, à l’occasion des activités de la rentrée 2018 de l’UdeM.
Dans un esprit de saine compétition, cinq professeurs et chargés de cours ainsi qu’une récente diplômée ont croisé le fer à l’occasion d’une joute oratoire exigeante: tous devaient traiter, à tour de rôle, d’un sujet qui les passionne sous la forme d’un Pecha Kucha, soit une présentation orale synchronisée avec la projection de 20 diapositives se succédant toutes les 20 secondes. Le tout devant quelque 200 étudiants qui, par leurs votes, allaient décider du gagnant ou de la gagnante!
L'événement était organisé par les Services aux étudiants, à l'occasion de la Semaine d’accueil des nouveaux étudiants.
À quoi sert l’art?
Le sort a désigné Caroline Martin pour briser la glace. Chargée de cours au Département d’histoire de l’art et d’études cinématographiques, Mme Martin s’est employée à répondre à la question «À quoi sert l’art?» Rien de moins!
Après avoir défini ce qu’est une œuvre, elle a rappelé que l’art existe depuis la nuit des temps et qu’il continue d’exister sous de multiples formes.
«L’art donne accès à des expériences radicalement différentes de celles qu’on a vécues soi-même, a-t-elle dit. Il permet de s'interroger sur son engagement dans la vie ainsi que sur ses choix.» C’est pourquoi la concurrente a invité les étudiants à «rester en contact avec l’art, malgré la charge de travail qui vous attend».
Le Christ en croix
Qu’on soit croyant ou non, le Christ en croix demeure un symbole que tous reconnaissent. Or, l’emblème du christianisme a été représenté de nombreuses façons, depuis l’origine de cette religion jusqu’à aujourd’hui, tel que l’a démontré Alain Gignac, professeur et directeur de l’Institut d’études religieuses.
«Des peintures ont présenté le Christ tantôt avec un air serein, tantôt souffrant», a expliqué M. Gignac. Images à l’appui, il a montré par exemple que Le Greco a peint un Christ qui semble flotter dans les nuages sans avoir l’air de souffrir, tandis que Goya l’a dessiné «sous un air un peu halluciné».
D’autres artistes se sont approprié ce symbole, dont l’agnostique Gauguin, qui a créé Le Christ jaune ‒ un tableau à la fois religieux et champêtre ‒, le peintre juif Marc Chagall et la sculptrice Edwina Sandys qui, en 1984, a créé un bronze intitulé Christa ‒ un christ féminin ‒ pour illustrer la souffrance des femmes.
Nous sommes les descendants du Big Bang!
«Sachant que l’Univers compte quelque 1000 milliards de galaxies, l’humanité est vraiment insignifiante à cette échelle», a lancé l’astrophysicien Robert Lamontagne dans son résumé de l’histoire de l’astronomie en 6 minutes et 40 secondes.
«Or, regarder le ciel, c’est se questionner, a-t-il poursuivi. Nos ancêtres avaient une connexion spirituelle avec les étoiles, qui servaient aussi à se déplacer et à établir un calendrier.»
On a longtemps cru que la Terre, puis le Soleil, a été le centre de l’Univers; c’est au 17e siècle qu’Isaac Newton démontre le fonctionnement du cosmos. «L’Univers devient vaste, vide et froid, et la religion perd sa place dans l’explication du cosmos», a mentionné le chargé de cours du Département de physique.
Si la Terre erre sans but dans un cosmos vide, quelle est donc la place de l’humanité?
«L’Univers a été fabriqué à partir de milliards de particules propulsées lors du Big Bang, survenu il y a quatre milliards d’années, a raconté Robert Lamontagne. Les étoiles et les galaxies naissent, meurent et se recyclent: le Big Bang a créé la vie juqu’à l’apparition de l’humain intelligent… qui construit aujourd’hui des appareils pour scruter le cosmos.»
«Au cours des 25 dernières années, nous avons découvert 4000 planètes hors de notre système solaire: nous sommes insignifiants, mais nous sommes les descendants du Big Bang et c’est maintenant nous qui donnons un sens au cosmos, qui devient ainsi conscient de sa propre existence à travers nous!» a-t-il conclu.
Le test prénatal: un défi éthique?
Devenue enceinte de son troisième enfant à l’âge de 40 ans, Vardit Ravitsky a subi un test qui indiquait qu’elle courait un risque d’avoir un enfant trisomique, et on lui a offert de passer un autre test ‒ invasif celui-là et associé à un risque de fausse couche ‒ pour en avoir la certitude.
La professeure de bioéthique de l’École de santé publique de l’UdeM n’a pas voulu subir ce deuxième test en raison de ce risque, mais elle a tenu à s'informer sur le sujet. Puis, en 2011, un test prénatal a été développé sans risque de fausse couche, mais coûteux. Mme Ravitsky a alors fait partie d’une équipe qui avait l’idée d’effectuer un projet de recherche nommée Pégase, qui incluait, parmi plusieurs autres études, un sondage des centaines de femmes enceintes, leurs partenaires et des professionnels de la santé pour connaître leurs besoins et valeurs.
Grâce aux résultats du projet, le gouvernement du Québec a décidé récemment de couvrir le coût de ce nouveau test pour les femmes enceintes à risque élevé d’avoir un enfant trisomique.
Pour la petite histoire, le bébé de Vardit Ravitsky était en parfaite santé. Et elle a même un petit frère aujourd’hui!
Donner un sens à ses études au-delà des salles de classe
Après avoir étudié six ans à l’Université de Montréal, où elle a obtenu un doctorat en psychologie, Laurence Dumont a soutenu que «toutes les parties de notre vie se nourrissent les unes les autres: si l’on imagine que la vie est une tarte, il faut que les études n’en soient qu’une pointe», a-t-elle illustré.
Sans vouloir fournir de mode d’emploi, la diplômée a expliqué à quel point ses engagements étudiants tout comme ses passe-temps lui ont permis d’avoir une vie équilibrée.
«Je suis arrivée à l’UdeM en 2011 et au printemps suivant est survenu ce qu’on a appelé le printemps érable: on parlait d’endettement, d’éducation supérieure et de changement de société, et cela m’a permis d’avoir une réflexion personnelle sur l’importance de se fixer des objectifs réalistes, et de m’appliquer à ce qui importe pour la société.»
Élue au conseil de direction de la Fédération des associations étudiantes du campus de l’Université de Montréal, Laurence Dumont a mené différentes luttes, dont celle liée à l’accès aux connaissances et aux revues scientifiques. «Ces expériences m’ont permis de partager et d’être en relation avec les autres», a relaté celle qui a récemment créé une entreprise avec des collègues de classe pour rendre accessibles aux travailleurs les connaissances en neurosciences susceptibles de les aider.
«À l’aube de votre parcours universitaire, demandez-vous ce qui donnera un sens à vos études et à votre vie, a-t-elle conclu. Investissez-vous et, surtout, amusez-vous!»
Comment atteindre ses buts?
Dernier à prendre la parole, le chargé de cours Luc Beaucage a proposé les ingrédients pouvant contribuer à la réussite universitaire.
Policier à la Gendarmerie royale du Canada et chargé de cours au certificat en toxicomanies à la Faculté de l’éducation permanente, il a invité les étudiants à faire preuve d’esprit critique et à donner leur opinion.
«Ne faites pas comme Descartes qui, dans son Discours de la méthode, s’est gardé de critiquer l’Église. Faites connaître votre point de vue et méfiez-vous de la fausse connaissance, qui est pire que l’ignorance!»
«Outre la curiosité qui est essentielle à la réussite, la rigueur vient toujours à bout de l’obstacle», a soutenu M. Beaucage en citant Léonard de Vinci.
«Restez proactifs pour voir les étapes à venir, établissez vos priorités, cherchez à comprendre avant d’essayer d’être compris, et pensez gagnant-gagnant en partageant votre savoir avec les autres: préparez-vous aux débats et gardez l’esprit ouvert», a dit Luc Beaucage en terminant.
Et le gagnant est…
Appelés à voter par l’entremise de leur téléphone portable, les étudiants ont désigné Robert Lamontagne comme grand gagnant de cette joute oratoire à la fois enlevante et enrichissante.
Humble devant la victoire, Robert Lamontagne a confié que l’expérience s’était avérée «très stressante» en dépit de l’expérience qu’il possède à titre d’enseignant. «Pour en savoir plus, inscrivez-vous au cours d’astrobiologie que je donne cet hiver: vous en apprendrez plus qu’en 6 minutes et 40 secondes!» a-t-il lancé tout sourire!