La guerre au Congo nuit à la vaccination contre l’Ebola
- Forum
Le 7 septembre 2018
- Mathieu-Robert Sauvé
La campagne de vaccination contre l’Ebola au Congo est freinée par un conflit armé, ce qui rend les interventions difficiles, déplore Benoît Mâsse, de l’École de santé publique.
Selon le Groupe d’étude sur le Congo, les attaques de rebelles et les ripostes des militaires ont fait 500 morts depuis 2014 dans la région de Beni, au nord de la République démocratique du Congo. Or, c’est précisément dans cette partie de l’Afrique que le virus Ebola a été détecté récemment, faisant un nombre grandissant de victimes. «La situation est d’autant plus inquiétante que l’efficacité d’un vaccin repose sur la rapidité des interventions», commente Benoît Mâsse, professeur au Département de médecine sociale et préventive de l’École de santé publique de l’Université de Montréal.
En collaboration avec le Centre de recherches pour le développement international, le méthodologiste préside le Comité international de contrôle des données et de la sécurité du «projet de vaccination en ceinture à titre compassionnel visant à évaluer l’innocuité du vaccin contre le virus Ebola en République démocratique du Congo». Cette étude est coordonnée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Sur le continent africain, l’épidémie semblait sur le point de se résorber quand de nouveaux foyers d’infection ont été découverts cet été dans ce pays d'Afrique centrale. Dans son plus récent bilan, Médecins sans frontières faisait état de 63 morts et 103 personnes infectées.
«Historiquement, le virus Ebola est apparu de façon sporadique dans diverses régions d’Afrique. Mais depuis quelques années, le virus semble s’installer à demeure, ce qui inquiète les autorités de santé publique», mentionne le professeur Mâsse. Or, la mise au point d’un vaccin au Canada, le VSV-EBOV, propriété de Merck, a redonné espoir aux personnes aux prises avec l’épidémie. Après les tests sur des modèles animaux, les essais cliniques ont été couronnés de succès, ce qui autorisait la vaccination sur des populations touchées. Mais la campagne à large échelle ne peut pas démarrer pour autant. «La Food and Drug Administration n’a toujours pas approuvé la mise en marché du vaccin; des données supplémentaires sur son efficacité et sa sécurité sont nécessaires. Nous devons donc poursuivre sur le terrain des opérations de pharmacovigilance pour savoir si des effets indésirables sérieux peuvent survenir.»
La livraison de doses de vaccin (qui doivent être conservées dans des contenants à -70 °Celsius) dans des régions éloignées de l’Afrique pose de multiples problèmes de manutention. La présence d’un conflit armé n’est pas pour simplifier les choses. Dès que les premiers cas de la maladie ont été confirmés, l’OMS a dépêché sur les lieux une équipe de la Guinée. Mais les travailleurs humanitaires doivent se déplacer avec des escortes armées. «Sur une échelle des difficultés, tenter de stopper la flambée d'un pathogène extrêmement dangereux dans une zone de guerre figure au sommet», a déclaré à franceinfo Peter Salama, directeur général adjoint de l'OMS chargé des mesures d'urgence.