Déclaration de Montréal IA responsable: passer à l’action sur le terrain

  • Forum
  • Le 6 décembre 2018

  • Martine Letarte
À la suite du dévoilement de la Déclaration de Montréal pour un développement responsable de l’intelligence artificielle (IA) le 4 décembre, un panel a discuté des enjeux relatifs à l’application de l’IA à l’extérieur des laboratoires.

À la suite du dévoilement de la Déclaration de Montréal pour un développement responsable de l’intelligence artificielle (IA) le 4 décembre, un panel a discuté des enjeux relatifs à l’application de l’IA à l’extérieur des laboratoires.

Crédit : James Hajjar

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Après le dévoilement de la Déclaration de Montréal IA responsable, une initiative de l’UdeM, des acteurs du terrain ont échangé sur la manière de l’appliquer concrètement dans leur travail.

Le dévoilement de la Déclaration de Montréal pour un développement responsable de l’intelligence artificielle (IA) le 4 décembre a été un «moment historique», selon Mona Nemer, scientifique en chef du Canada. Mais, pour que l’initiative soit un réel succès, elle devra se traduire par des gestes concrets sur le terrain, notamment dans les milieux professionnels, les villes, les bibliothèques municipales et sur la scène internationale. Après l’annonce, un panel a discuté des enjeux relatifs à l’application de l’IA à l’extérieur des laboratoires.

Les villes intelligentes peuvent faire rêver. Mais ce type de projet peut aussi rapidement tourner au cauchemar si des mesures ne sont pas prises pour s’assurer que ces transformations s’effectuent dans l’intérêt des individus. Voilà le cœur des préoccupations quotidiennes de François Croteau, membre du comité exécutif de la Ville de Montréal, responsable de la ville intelligente, des technologies de l’information, de l’innovation et de l’enseignement supérieur.

«Nous aurons besoin de l’expertise des entreprises privées pour déployer un système d’IA, mais nous devons nous assurer que les données seront utilisées au bénéfice du bien commun et non du bien privé», a affirmé M. Croteau en signalant que Montréal a signé une entente avec l’Institut québécois d’intelligence artificielle, le MILA, pour être accompagnée dans cette démarche.

Pour François Croteau, le défi des villes se trouve dans les données massives qui seront recueillies par des objets connectés avec l’arrivée des réseaux de télécommunications de cinquième génération (5G). «Il faut veiller à ce que la collecte des données, leur hébergement et leur utilisation se fassent de façon éthique, transparente et démocratique pour répondre à la Déclaration de Montréal et aux inquiétudes de la population», a précisé M. Croteau.

La Ville de Montréal souhaite ainsi devenir intelligente non pas en concevant des applications que pourront employer les gens connectés, mais en offrant une meilleure qualité de vie à tous en répondant mieux à leurs besoins. François Croteau a donné l’exemple des permis de construction qui pourraient être délivrés directement après l’analyse du plan d’urbanisme par un algorithme.

Mettre toutes les forces à contribution

Pour réussir le déploiement de cette intelligence artificielle responsable, tous les acteurs devront être mis à profit. Les professionnels qui travaillent à la mise au point des algorithmes ont notamment une responsabilité à assumer. Kathy Baig, présidente de l’Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ), a expliqué comment ses membres sont maintenant formés pour comprendre les effets du développement de l’IA.

«Les défis sont nombreux, mais nous devons viser la responsabilisation des professionnels par rapport aux systèmes d’IA qu’ils élaborent, a-t-elle dit. Nous conseillons aux professionnels qui se trouvent devant ces enjeux éthiques de travailler en équipes multidisciplinaires afin de partager l’information et d’avoir des discussions pour arriver à des décisions éclairées.»

L’OIQ, qui a d’ailleurs participé au processus de coconstruction de la Déclaration de Montréal, demande que la Loi sur les ingénieurs, qui date de 1964, soit modernisée pour inclure les ingénieurs en informatique, une spécialité qui n’existait pas à l’époque.

Mais l’IA ne concerne pas que les professionnels. Les différents intervenants du panel se sont aussi prononcés pour que tous les groupes de la société, y compris les populations marginalisées, participent davantage à cette transformation de la société et puissent développer leur littératie numérique.

«Les bibliothèques publiques se prêtent naturellement à ce type d’exercice», a indiqué Marie Martel, professeure adjointe à l’École de bibliothéconomie et des sciences de l’information de l’UdeM.

Elle met même Montréal au défi de se doter d’un plan d’action pour la littératie numérique afin de faire école. Elle propose aussi la tenue d’états généraux sur l’éducation au numérique à l’ère de l’intelligence artificielle. «Ce serait une étape souhaitable, voire nécessaire, si l’on veut être conséquent avec les promesses que contient la Déclaration de Montréal», a mentionné Mme Martel.

Sur la scène internationale, on doit aussi regrouper les forces pour mettre en place une gouvernance globale des technologies de l’IA. C’est ce qu’est venu souligner Jim Dratwa, chef du bureau de l’European Group on Ethics in Science and New Technologies à la Commission européenne.

«Il faut se demander, a-t-il rappelé, dans quel monde nous voulons vivre.»