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  • Le 11 décembre 2018

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Denis deBlois

Denis deBlois

En 5 secondes

Les nouvelles approches associées à l'intelligence artificielle ont le potentiel de révolutionner plusieurs étapes du processus de conception des médicaments. En voici quelques exemples.

Par Denis deBlois, professeur titulaire à la Faculté de pharmacie et codirecteur du Groupe de recherche universitaire sur le médicament

 

L’élaboration et la mise au point des médicaments, cette activité extrêmement complexe, nous touchent tous personnellement. C’est un domaine qui intègre toujours plus d’informations issues de disciplines aussi variées que la biologie et la chimie ou les sciences humaines comme la sociologie et l’économie.

Les nouvelles approches associées à l'intelligence artificielle (IA) ont le potentiel de révolutionner plusieurs étapes du processus grâce à leur capacité à détecter des éléments significatifs qui se cachent dans de grands ensembles de données et à apprendre de manière automatique.

Dès les premières étapes de la recherche

Aux étapes précoces de la découverte des molécules susceptibles de devenir des médicaments, on doit tester une multitude de composés chimiques en effectuant des campagnes de criblage à haut débit. Ces dernières permettent d’analyser un grand volume de propriétés physicochimiques pour mieux prédire l’efficacité, la toxicité et le devenir du médicament dans l’organisme. L’intelligence artificielle se prête particulièrement bien à l’optimisation de ce processus d’analyse, non seulement pour sélectionner les molécules les plus prometteuses, mais aussi pour proposer des structures moléculaires inédites ayant un potentiel thérapeutique plus élevé.

Des systèmes d’IA spécialisés sont également capables de suggérer de nouvelles avenues pour effectuer la synthèse chimique de molécules existantes (appelée «rétrosynthèse»). Ainsi, on pourra améliorer le rendement des modes de production en termes de temps, d’utilisation des ressources et d’impact sur l’environnement.

Des thérapies plus ciblées

L’IA facilitera aussi le diagnostic des maladies et l’avènement de la médecine personnalisée. Grâce à l’analyse fine des profils cliniques et des biomarqueurs moléculaires, on pourra mieux distinguer le sous-type de la maladie d’un patient et prédire sa réponse au bon médicament administré à la bonne dose et au bon moment afin d’atteindre une meilleure efficacité et une meilleure tolérance au traitement.

À l’étape de la sélection des cibles thérapeutiques, l’intelligence artificielle aidera à optimiser les approches, par exemple grâce à une analyse plus poussée des réseaux de signalisation intracellulaires – dans le cas des cancers –, métaboliques – pour le diabète – ou neuronaux – pour les troubles neurologiques.

De la détection des épidémies à la formation des cliniciens

Les applications de l’intelligence artificielle auront en outre un effet positif sur les essais cliniques, la prise de décision thérapeutique et l’ensemble de la pratique de la médecine et de la pharmacie.

On commence d’ailleurs à sonder les médias sociaux pour la détection précoce des épidémies ou des effets indésirables rares des médicaments (pharmacovigilance). Déjà, des dispositifs intelligents équipés de capteurs sont utilisés pour surveiller la fabrication ou l’action des médicaments. Ces dispositifs médicaux intelligents sont au cœur de la tendance actuelle de la santé dite «en ligne» (e-health). Bientôt, l'IA pourra fournir une aide diagnostique fiable et peu coûteuse aux cliniciens.

Dans certaines circonstances, on peut imaginer l’IA participer à la formation des cliniciens ou même les remplacer dans des zones difficiles d’accès! Bien sûr, il faudra aller au-delà de la commande «Dis, Siri…» à son iPhone, mais on distingue déjà la portée des bouleversements à venir.

L’importance de l’interdisciplinarité

Nous vivons une période fascinante où notre capacité à recueillir, stocker et analyser des données croît de manière exponentielle. Les approches basées sur l’intelligence artificielle nous permettront certainement de mieux comprendre et d’influencer les processus biologiques. Mais pour cela, il faut briser les silos entre les disciplines scientifiques, favoriser le maillage intersectoriel et adapter nos programmes de formation de la relève scientifique.

En mai 2020, la Faculté de pharmacie de l’UdeM sera l’hôte du septième congrès mondial en sciences pharmaceutiques (7th Pharmaceutical Sciences World Congress) au Palais des congrès de Montréal. Sur le thème d’une thérapeutique intelligente pour un monde complexe, cette rencontre interdisciplinaire sera l’occasion idéale pour discuter des répercussions de l'IA en sciences pharmaceutiques et biomédicales. Parce que le médicament, ça nous touche tous, personnellement.