Chez les mères montréalaises, le risque d’hospitalisation pour dépression pourrait être lié au bruit

  • Forum
  • Le 9 avril 2019

  • Martin LaSalle
Chez les Montréalaises qui ont eu un enfant entre les années 2000 et 2016, le fait de vivre dans un quartier bruyant est associé à un risque plus élevé d’être hospitalisé pour dépression ou pour trouble de santé mentale.

Chez les Montréalaises qui ont eu un enfant entre les années 2000 et 2016, le fait de vivre dans un quartier bruyant est associé à un risque plus élevé d’être hospitalisé pour dépression ou pour trouble de santé mentale.

Crédit : Getty

En 5 secondes

Les mères des quartiers les plus bruyants de Montréal seraient plus à risque d’être hospitalisées pour dépression ou trouble de santé mentale, selon des chercheuses de l’UdeM.

Chez les Montréalaises qui ont eu un enfant entre les années 2000 et 2016, le fait de vivre dans un quartier bruyant est associé à un risque plus élevé d’être hospitalisé pour dépression ou pour trouble de santé mentale.

C’est ce que met en lumière une étude publiée récemment dans la revue Environmental Research et menée entre autres par Nathalie Auger et Audrey Smargiassi, professeures à l’École de santé publique de l’Université de Montréal et chercheuses au Centre de recherche du CHUM (CRCHUM), en collaboration avec leur collègue Marianne Bilodeau-Bertrand, également du CRCHUM.

L’étude a été réalisée à partir d’une cohorte de 140 456 femmes vivant sur l’île de Montréal. Comparativement au bruit nocturne ambiant de 50 décibels A (dB(A)), l’exposition à 60 dB(A) la nuit est liée à un risque 32 % supérieur d’être hospitalisé pour cause de dépression; ce risque grimperait à 68 % si le bruit atteignait 70 dB(A).

En guise d’illustration, 50 dB(A) équivalent au bruit dans un bureau calme tandis qu’une conversation normale s’apparente à environ 60 dB(A). Le bruit émis par un sèche-cheveux ou une sonnerie de réveil est de 70 dB(A).

«Les résultats indiquent également que, toujours par comparaison avec 50 dB(A), le risque d’hospitalisation pour trouble de santé mentale est 26 % supérieur parmi les femmes exposées à un bruit nocturne de 60 dB(A)», ajoute Nathalie Auger, qui est aussi médecin et chercheuse au Centre hospitalier de l’Université de Montréal.

Les secteurs les plus bruyants

Nathalie Auger

Dans le cadre de la présente étude, les auteures ont utilisé les données sur le bruit tirées d’un échantillonnage sonore dirigé par Audrey Smargiassi à l’été 2010 et au printemps 2014 dans plus de 200 secteurs de la métropole.

Ainsi, dans l'ensemble de l'île de Montréal, le bruit ambiant extérieur oscillait – selon le secteur – entre 50,5 dB(A) et 68,8 dB(A), avec une moyenne de 58,2 dB(A), selon les estimations modélisées.

Dans l’étude qu’elle avait fait paraître en 2015, Mme Smargiassi avait fait ressortir que, à Montréal, le bruit est plus intense aux abords des autoroutes et près des quartiers où des industries sont installées, ainsi que près de l'aéroport Montréal-Trudeau.

Outre le trafic routier, les vols aériens et le transport ferroviaire, les niveaux de bruit peuvent aussi être influencés par la densité de la population et les caractéristiques du cadre bâti.

Il importe de souligner que les échantillons de bruit ont été classés selon trois types de mesures : la première est une moyenne sur 24 heures, la deuxième a été obtenue la nuit et la dernière est une pondération des deux précédentes.

«Pour arriver aux résultats relatifs au risque d’hospitalisation pour dépression ou trouble de santé mentale, nous avons recouru aux trois mesures et elles sont toutes corrélées, mentionne Mme Smargiassi. Néanmoins, la mesure du bruit de nuit pourrait être la plus importante si ce sont les réveils qui expliquent les problèmes de santé.»

Le bruit: un effet probablement sous-estimé sur la santé mentale

Audrey Smargiassi

Parmi les femmes ayant pris part à l’étude longitudinale, 959 (0,7 %) ont été hospitalisées pour des raisons liées à la dépression (risque ou tentative de suicide), tandis que 1935 (1,4 %) l’ont été pour d'autres troubles de santé mentale (anxiété, bipolarité, psychose, schizophrénie, etc.).

Le bruit ambiant moyen (sur 24 heures) auquel ces femmes hospitalisées avaient été exposées était de 58,2 dB(A).

Près de 41 % de l’ensemble des participantes vivaient dans un quartier où le bruit nocturne était de moins de 55 dB(A) et 42 % étaient soumises à un bruit de nuit de 55 à 59,9 dB(A); 15 % des participantes dormaient avec un bruit de fond oscillant entre 60 et 64,9 dB(A) et, enfin, 1,8 % subissaient un bruit de plus de 65 dB(A) la nuit.

De l’aveu des auteures de l’étude, l’une des limites de leur analyse réside dans le fait que celle-ci n’a tenu compte que des hospitalisations pour dépression ou troubles de santé mentale.

«Nous n’avons pas pu analyser les cas moins graves de dépression ou de troubles de santé mentale», conclut Nathalie Auger. Il est ainsi plausible de penser que l’exposition au bruit pourrait être liée à de nombreux cas de dépression ou de troubles mentaux ne nécessitant pas d’hospitalisation chez les Montréalaises ayant déjà eu un enfant.»