L’UdeM au secours des blessés de la Première Guerre mondiale
- Revue Les diplômés
Le 8 mai 2019
- Mathieu-Robert Sauvé
Durant la Grande Guerre, une équipe médicale composée en majeure partie de membres de l’UdeM se porte au secours des soldats français blessés au combat. Un diplômé a ranimé le souvenir de ces héros.
Nous sommes en mai 1918 en Champagne et les combats font rage depuis que les Allemands ont lancé une offensive pour étendre leur emprise sur l’est de la France. Les blessés arrivent par centaines à «l’hôpital Laval» de Troyes, aux prises avec un afflux de réfugiés civils fuyant les hostilités. Le lieutenant-colonel George E. Beauchamp, qui dirige l’équipe médicale composée de 38 officiers, 45 infirmières militaires et 196 infirmiers, doit prendre des décisions capitales pour la survie des blessés. Ses loyaux services lui vaudront la Légion d’honneur en France… mais l’anonymat complet au Canada.
Comme ce médecin montréalais, des centaines de Canadiens français issus notamment de l’Université Laval de Montréal (ainsi qu’on appelait l’Université de Montréal avant 1920) ont participé à la Première Guerre mondiale en tenant deux hôpitaux militaires mis à la disposition de la France par les Forces canadiennes. Inauguré le 3 juillet 1916, l’hôpital canadien #6, qu’on surnomme l’hôpital Laval, se déplace dans quatre villes françaises jusqu’à sa fermeture, en mai 1919.
Au plus fort de ses activités, l’hôpital dispose de 1040 lits; le personnel traite congestions, pneumonies et pleurésies, mais surtout des blessures de guerre qui ne sont répertoriées par aucun manuel de l’époque: néphrites, «pieds de tranchées» et brûlures causées par des gaz toxiques.
«L’hôpital Laval traitera en grande majorité des soldats français, mais aussi des Canadiens, des Britanniques et des Allemands», explique Michel Litalien, qui rappelle que le personnel médical soignait aussi l’ennemi.
Le diplômé en histoire de l’Université de Montréal s’est lui-même rendu en France se recueillir sur les tombes de médecins et infirmiers morts en contribuant à l’effort de guerre. «On trouve à Saint-Cloud, où l’hôpital est installé en 1916, une rue du Camp-Canadien qui leur rend hommage. À Joinville-le-Pont, où il s’établit définitivement en 1918, il y a l’avenue des Canadiens, le quartier des Canadiens et le square du Québec», relate-t-il.
Travail de mémoire
Au cours de ses études de maîtrise à l’Université d’Ottawa, M. Litalien a retracé l’histoire des deux hôpitaux militaires tenus par des Canadiens français durant ce conflit. Dans la préface du livre qu’il en a tiré, intitulé Dans la tourmente (Athéna éditions, 2003), l’historien Desmond Morton salue le travail du chercheur qui dirige aujourd’hui les musées et collections historiques des Forces canadiennes. «Grâce à Michel Litalien, d’importants souvenirs n’auront pas été oblitérés par négligence», écrit-il.
C’est à l’occasion d’une conférence de Desmond Morton à laquelle assiste le jeune homme en 1998 qu’il entend parler pour la première fois d’une contribution médicale de Canadiens français à la guerre de 1914-1918. «On n’en connaissait presque rien, compte tenu du fait que ces médecins, infirmières et infirmiers ne sont pas morts sur le champ de bataille, raconte-t-il. Je me suis découvert une passion pour cette partie négligée de l’histoire militaire.»
Plus de deux décennies plus tard, Michel Litalien a constitué une collection personnelle de plus de 800 images (dont quelques-unes figurent ici) et il est devenu l’un des rares spécialistes de cette page d’histoire. «Ce que le Canada français a réalisé là-bas est exceptionnel sur le plan humanitaire. Les deux hôpitaux ont soigné des milliers de soldats, mais aussi les civils. Et sur le plan médical, le personnel a été plongé dans des situations où tout était à faire. Des spécialités comme l’urgentologie, la chirurgie, les greffes sont pratiquement nées à cette période, sans parler des multiples interventions en soins infirmiers.»