Des chercheurs étudient le parcours migratoire des réfugiés syriens vers le Liban et le Canada

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  • Le 22 juillet 2019

  • Martin LaSalle
Campement de réfugiés syriens dans la région de Bekaa, au Liban.

Campement de réfugiés syriens dans la région de Bekaa, au Liban.

Crédit : Roxane Caron

En 5 secondes

Le parcours des Syriens forcés de se réfugier au Liban ou au Canada fait l’objet de deux études menées par des étudiants de l’UdeM, dirigés par Roxane Caron, de l’École de travail social.

Comment les personnes réfugiées en provenance de la Syrie parviennent-elles à surmonter les obstacles pour survivre et à tisser de nouvelles appartenances durant leur migration?

C’est ce sur quoi la professeure Roxane Caron, de l’École de travail social de l’Université de Montréal, se penche cet été dans le cadre de deux projets de recherche avec un groupe d’étudiants qui suivent le parcours de familles syriennes au Canada ainsi qu’au Liban.

Le premier projet, intitulé Femme, syrienne et réfugiée: être et devenir. Perspective transnationale sur les appartenances identitaires et les parcours de refuge de femmes réfugiées syriennes au Québec et au Liban, est financé par le Fonds de recherche du Québec – Société et culture.

Le second, codirigé avec les professeurs Lourdes Rodriguez del Barrio et Marie-Jeanne Blain, s’intitule Parcours migratoires et repères identitaires de personnes réfugiées syriennes: perspectives transnationales du Liban au Québec. Ce projet bénéficie du soutien du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada.

Des projets menés dans deux pays

Camp de réfugiés palestiniens à Beyrouth, où plusieurs Syriens sont «installés».

Crédit : Roxane Caron

La particularité de ces deux projets est de s’intéresser aux réalités des Syriens qui se sont réfugiés dans deux pays, soit le Liban – qui est limitrophe à la Syrie – et le Canada.

«Nous avons choisi ces deux pays en raison de l’importance qu’ils jouent dans l’accueil de réfugiés de la Syrie, et aussi par les liens qui les unissent, explique Roxane Caron. En effet, un nombre significatif de réfugiés syriens accueillis au Canada, en 2015, a transité par un pays du Moyen-Orient, le plus souvent par le Liban.»

De fait, le Liban est l’épicentre de la crise syrienne, accueillant officiellement plus de 935 434 réfugiés syriens, soit un cinquième de tous ceux qui ont fui la Syrie. Ce nombre équivaut au tiers de la population libanaise! Quant au Canada, il  a accueilli quelque 58 680 réfugiés syriens, dont plus de 13 000 au Québec.

«Le Canada est l’un des pays occidentaux à avoir réagi à l’appel de la communauté internationale en 2015, et à avoir mis en place une politique
d’accueil spécifique pour les réfugiés syriens», précise Mme Caron.

L’importance des familles et des proches

Roxane Caron sur le terrain, au Liban.

Pour mener à bien ces recherches, les étudiants et Roxane Caron rencontrent cet été des personnes réfugiées tant au Canada qu’au Liban.

Le projet portant sur les femmes syriennes vise à documenter l’étendue des réalités des femmes réfugiées, à travers leurs histoires passées et présentes. «Notre approche, qui s’appuie sur un prisme féministe transnational, permet de décloisonner les images binaires souvent dominantes qui représentent les femmes réfugiées soit comme des victimes, soit comme des héroïnes combattantes», souligne la professeure.

Le second projet investigue, à travers les récits d’hommes et de femmes réfugiés syriens, les liens et les interactions liant les réfugiés entre eux (local et transnational), mais aussi les réseaux nationaux et internationaux qui se sont mobilisés pour les aider à survivre et à s’intégrer, lorsque le contexte le permet.

«La perspective transnationale apporte une lentille unique pour comprendre la migration forcée dans son ensemble, c’est-à-dire du départ jusqu’à la réinstallation des réfugiés, en passant par les différentes transitions, ajoute Roxane Caron. La migration apparait ainsi non pas dans une forme dichotomique et fixe entre le ici et le là-bas, mais bien comme un processus en mouvement.» Ainsi, c’est la personne réfugiée qui devient au centre de la recherche.

La recherche s’intéresse donc à mettre en dialogue les réalités vécues en contexte libanais et québécois, afin de cibler les changements et les continuités dans le processus de migration.

Par exemple, le mémoire de Myriam Richard, réalisé au sein d’un des projets, montre que la migration forcée expose aussi des femmes syriennes à des événements qui leur permettent de faire face à l’adversité. En effet, bon nombre de femmes interviewées au Québec et au Liban par Mme Richard ont dit se sentir plus fortes pour elles-mêmes, leur famille et d’autres personnes réfugiées en mobilisant leurs expériences dans le cadre d’emplois exercés pour l’accueil de personnes réfugiées.

«Nos résultats préliminaires montrent d’ailleurs que certaines expériences transcendent les frontières des États et sont communes aux deux contextes, dont le rôle central de l’interconnexion transnationale des familles et des amis comme source de soutien et de responsabilités envers les réfugiés», conclut Mme Caron.

Mentionnons qu’outre Myriam Richard, trois autres assistants de recherche ont pris part au projet de recherche, soit Marilena Liguori, de l’École de travail social, de même que Marie Fally et Vicken Kayayan, du Département d’anthropologie.

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