Et si le CBD réduisait la douleur chronique causée par des blessures traumatiques?

  • Forum
  • Le 15 juin 2020

  • Martin LaSalle
Le CBD est, avec le tétrahydrocannabinol (THC), l’un des principaux constituants du cannabis. Les scientifiques estiment qu’il pourrait jouer un rôle dans la réduction de l’inflammation sans provoquer les effets euphorisants du THC.

Le CBD est, avec le tétrahydrocannabinol (THC), l’un des principaux constituants du cannabis. Les scientifiques estiment qu’il pourrait jouer un rôle dans la réduction de l’inflammation sans provoquer les effets euphorisants du THC.

Crédit : Getty

En 5 secondes

Des chercheurs étudieront l’effet du cannabidiol sur la réponse inflammatoire et la douleur qui en résulte à la suite d’un accident traumatique afin de réduire le recours aux opioïdes.

Pas moins de 26 % des personnes admises à l’hôpital pour une fracture osseuse présentent aussi un traumatisme crânien en raison du choc ayant causé la fracture elle-même. Et les victimes d’un traumatisme crânien souffrent de douleurs aigües qui peuvent perdurer au point où la possibilité de se rétablir s’atténue avec le temps.

Or, grâce à une subvention d’équipe accordée par les Instituts de recherche en santé du Canada, le professeur Louis De Beaumont, du Département de chirurgie de la Faculté de médecine de l’Université de Montréal, amorce un projet de recherche novateur: évaluer l’efficacité du cannabidiol (CBD) pour diminuer la réponse inflammatoire du cerveau et la douleur qui en résulte à la suite d’un traumatisme craniocérébral (TCC) et ainsi réduire le recours aux opioïdes.

Financé à hauteur de 1,5 M$ sur cinq ans, le projet est mené en collaboration avec des chercheurs des universités de Sherbrooke, Laval et McGill.

Évaluer l’effet du cannabidiol sur la douleur aigüe

Louis De Beaumont, professeur au Département de chirurgie

Louis De Beaumont

Crédit : Bonesso-Dumas

Le CBD est, avec le tétrahydrocannabinol (THC), l’un des principaux constituants du cannabis et les scientifiques estiment qu’il pourrait jouer un rôle dans la réduction de l’inflammation sans provoquer les effets euphorisants du THC. Si son efficacité thérapeutique se confirmait, le CBD pourrait contribuer à limiter l’usage des opioïdes pour soulager la douleur.

Cette recherche comprend quatre volets distincts: l’un vise à étudier le potentiel ainsi que l'innocuité du traitement au CBD chez l’humain et dans les trois autres les chercheurs se pencheront sur les mécanismes d'action et les interactions avec les médiateurs de la douleur dans la réponse au traitement par le CBD auprès de modèles animaux.

Dans le cas de l’essai clinique randomisé avec groupe témoin chez les humains, les chercheurs compareront l’effet de deux doses quotidiennes de CBD administrées pendant un mois pour soulager la douleur chez des patients victimes à la fois d’une fracture osseuse et d’un traumatisme crânien. L’étude évaluera de plus le potentiel du CBD comme adjuvant aux opioïdes autoadministrés par les patients.

«Nous soupçonnons que la douleur chronique, qui s’installe de façon disproportionnée chez les victimes à la fois d'une blessure orthopédique et d'un traumatisme craniocérébral, est attribuable à la synergie des processus inflammatoires enclenchés par la fracture et par le TCC», explique Louis De Beaumont.

Il ajoute que la barrière hématoencéphalique, dont le rôle est d’isoler le cerveau des substances indésirables, subit un «ébranlement qui laisserait entrer dans le système nerveux central les cytokines produites par la fracture, ce qui entraînerait une tempête inflammatoire en partie responsable de la douleur chronique».

Diminuer le recours aux opioïdes

L'intensité de la douleur est le principal facteur prédisposant à la douleur chronique après une blessure traumatique. Et malgré le risque de toxicomanie ou d’abus éventuel chez les patients, le recours aux opioïdes est courant, puisqu’il n’existe pas d’autres traitements pour soulager la douleur aigüe.

«Avec le CBD, nous pensons pouvoir réduire la réponse inflammatoire occasionnée par l’accident et ainsi diminuer les risques de souffrir de douleurs chroniques ‒ ce qui pourrait mener les patients à restreindre considérablement leur utilisation des opioïdes», estime le neuropsychologue.

Outre la dépendance et l’abus, l’autre grand problème que posent les opioïdes est que leur usage étalé dans le temps et en fortes doses finit par accroître la douleur (hyperalgésie) et la tolérance au médicament.

«Il faut parvenir à réduire ‒ voire éliminer ‒ la douleur des polytraumatisés dans les trois mois suivant le traumatisme, à défaut de quoi la douleur chronique tend à s’installer pour de bon», conclut Louis De Beaumont.

Sur le même sujet

drogue recherche douleur