Le retour au travail après la pandémie sera «un grand test pour les employeurs»

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  • Le 27 mai 2021

  • Martin LaSalle
Quel plan de retour au travail les employeurs doivent-ils adopter, sachant que deux personnes sur trois souhaitent poursuivre le travail à distance?

Quel plan de retour au travail les employeurs doivent-ils adopter, sachant que deux personnes sur trois souhaitent poursuivre le travail à distance?

Crédit : Getty

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Comment s’effectuera le retour au travail après la pandémie? «Ce sera un grand test pour les employeurs», selon la professeure Tania Saba, qui mène une étude sur le sujet.

Certains employeurs s’affairent à établir un plan de retour au travail pour l’après-pandémie, mais ce n’est pas le cas pour la plupart d’entre eux. Professeure à l’École de relations industrielles de l’Université de Montréal, Tania Saba les invite à profiter de cette période de transition pour réfléchir à la question en participant à une étude qu’elle mène actuellement sur le sujet.

Cette étude est la suite d’une première enquête qu’elle a dirigée et qui révélait qu’une majorité de personnes apprécient le télétravail au point de vouloir continuer de travailler de la maison après la pandémie.

Et les résultats préliminaires de la deuxième enquête à laquelle 6000 personnes ont pris part jusqu’à maintenant confirment l’engouement pour le télétravail: deux répondants sur trois (66 %) désirent désormais poursuivre le travail à distance, comparativement à 51 % en septembre dernier. Dans l’administration publique, ce taux atteint même 71 %.

«Ce fut une grande révélation pour la plupart des travailleurs, incluant les gestionnaires, commente Mme Saba. Plus les gens ont expérimenté le télétravail au fil des mois, plus ils ont aimé ce mode d’organisation du travail qui est passé d’une situation d’urgence à une certaine normalité.»

Or, s’ils sont enclins à travailler de façon hybride, les répondants souhaitent que l’organisation du travail soit planifiée. «Ils vont préférer avoir un cadre plutôt que de ne pas savoir quand ils peuvent travailler à la maison ou au bureau», insiste-t-elle.

Des avantages et quelques enjeux à surveiller

Tania Saba

Crédit : Gaëlle Vuillaume

Parmi les avantages du télétravail évoqués par les répondants, l’acquisition d’une plus grande autonomie, une aussi bonne productivité et la réappropriation du temps figurent en tête de liste.

«Avant la pandémie, certains mettaient de 90 à 120 minutes par jour pour se rendre au travail et en revenir, soit l’équivalent d’une journée de travail dans le trafic, illustre la professeure. Pour 60 % des répondants, ce temps récupéré permet d’avoir un meilleur équilibre entre le travail et les activités familiales, et d’améliorer son bien-être général. Même les gestionnaires qui étaient sceptiques au départ sont devenus plus favorables au télétravail.»

Mais pour certains, le télétravail s’est aussi avéré envahissant, que ce soit parce que les journées de travail se prolongent ou encore en raison de l’exigüité ou de l’inadéquation de l’environnement pour travailler de la maison.

«Plus les tâches sont interdépendantes et plus les équipes doivent échanger entre elles, plus le télétravail est difficile, souligne Tania Saba. Il y a aussi des gens qui souffrent d’isolement organisationnel en n’ayant plus accès aux échanges formels et informels qui caractérisent le travail en personne.»

Une période de transition à l’horizon

La nouvelle enquête vise à circonscrire dans quelle mesure les employeurs ont un plan – ou s’apprête à en dresser un – pour la sortie de la pandémie.

Toujours selon les résultats préliminaires de la deuxième enquête, de 65 à 70 % des tâches pourraient continuer à être effectuées en télétravail après la pandémie, selon les répondants.

Les attentes quant au maintien d’une partie des activités en télétravail sont grandes. Or, les employeurs vont devoir rapidement s’organiser pour établir un plan de retour, estime Mme Saba, et la période de transition dans laquelle nous sommes sur le point d’entrer constituera «un grand test pour eux».

«Nous cherchons à relier les activités de télétravail qui ont une valeur ajoutée pour les employés et les employeurs, et qui créeront le plus d’engagement et renforceront l’esprit de communauté au sein de l’organisation», poursuit-elle. 

C’est pourquoi Tania Saba recommande aux employeurs de profiter de cette période pour tester différents modèles, en invitant leur personnel à réfléchir en équipe – en unité de travail –, au lieu d'imposer un modèle unique qui pourrait apporter davantage d’insatisfaction que de bienfaits à l’entreprise.

Selon la professeure, l’important est de miser sur les acquis et les avantages du télétravail et de se demander s’il est opportun d’inciter tous les salariés à revenir au bureau – d’autant plus que certains n’auront pas été vaccinés ou n’auront pas reçu leur deuxième dose de vaccin.

«Compte tenu de l’engouement pour le travail à domicile, le télétravail va aussi devenir un enjeu compétitif pour l’attraction et la rétention du personnel», conclut Mme Saba.

Pour participer à l’enquête

Les employeurs et les employés désirant participer à l’enquête n’ont qu’à remplir le questionnaire.