Petit département deviendra grand: 100 ans de physique à l’Université de Montréal

Dans les années 60, le département se développe donc rapidement et les groupes de recherche se multiplient avec entre autres la physique des plasmas et la physique de la matière condensée. Cet essor est suivi en 1978 de l’ouverture de l’Observatoire du Mont-Mégantic.

Dans les années 60, le département se développe donc rapidement et les groupes de recherche se multiplient avec entre autres la physique des plasmas et la physique de la matière condensée. Cet essor est suivi en 1978 de l’ouverture de l’Observatoire du Mont-Mégantic.

Crédit : Université de Montréal

En 5 secondes

Le département de physique formé il y a 100 ans d'un seul professeur a abrité un laboratoire secret pendant la Deuxième Guerre mondiale avant de devenir une unité d’enseignement de renommée mondiale.

«Le département, c’est l’œuvre de pionniers qui sont partis de rien en 1920 pour arriver à une unité d’enseignement d’envergure internationale, c’est assez extraordinaire!» lance Matthieu Lavallée, coauteur avec Antoine Thérorêt du livre Projet Manhattan: Montréal au cœur de la participation du Canada à la bombe atomique américaine.

Tout commence avec Joseph-Ernest Gendreau, membre fondateur de la Faculté des sciences, qui occupe en 1920 la première chaire de physique de l’Université de Montréal.

Joseph-Ernest Gendreau revient alors de Paris, où il a étudié pendant une dizaine d’années la physique, la chimie, la médecine et la radiologie, notamment avec Marie Curie, qui vient de découvrir le radium. De retour à Montréal, il enseigne la science des radiations aux futurs médecins, puis fonde en 1922 l’Institut du radium de Montréal, consacré à la recherche sur le cancer. 

Laboratoire ultrasecret

Au milieu de la Deuxième Guerre mondiale, l’histoire du département change. En 1943, la Faculté des sciences déménage dans le nouveau pavillon principal, sur la montagne. C’est là, dans une aile inoccupée, que des physiciens britanniques, français et canadiens s’installent pour travailler secrètement sur la fission de l’uranium à des fins militaires. Ce laboratoire est le seul en dehors des États-Unis à participer au projet Manhattan, qui a mené à la fabrication de la bombe atomique.

«Les travaux étaient ultrasecrets et compartimentés. Les chercheurs étaient affectés à certaines tâches de volets bien précis sans trop savoir ce que les autres faisaient, raconte Matthieu Lavallée. Au total, 580 personnes ont été employées pendant la guerre par ce laboratoire. Pierre Demers, qui va devenir professeur au Département de physique en 1947, était l’un des rares Canadiens français dans l’équipe.»

Après la guerre, les recherches sur la fission nucléaire se déplacent à Chalk River, en Ontario, et se concentrent sur la production d’électricité.

À l’UdeM, le physicien français Marcel Rouault, spécialisé en diffraction des électrons, devient directeur du Département de physique. Puis en 1957, le Montréalais Paul Lorrain prend la relève.

L’essor du département

«Paul Lorrain avait fait ses études à l’Université McGill, puis à l’Université Cornell, aux États-Unis, relate Jean-Robert Derome, directeur du Département de physique de 1987 à 1997. Il a mis l’accent sur le recrutement de professeurs qui faisaient de la recherche dans divers domaines et qui venaient de différentes universités. » Le nombre de chercheurs titulaires d’un doctorat passe ainsi de 3 en 1957 à 27 en 1966.

L’astrophysique entre à ce moment au département, avec la venue du théoricien Serge Lapointe, puis d’Hubert Reeves, professeur de 1960 à 1964.

En 1966, le département acquiert l’accélérateur de particules nucléaires qui était situé au laboratoire de Chalk River. «Ça a permis de recruter une dizaine de professeurs-chercheurs en physique nucléaire. Je suis arrivé dans ces années-là, en 1967», indique Jean-Robert Derome. 

Dans les années 60, le département se développe donc rapidement et les groupes de recherche se multiplient avec entre autres la physique des plasmas et la physique de la matière condensée. Cet essor est suivi en 1978 de l’ouverture de l’Observatoire du Mont-Mégantic.

Mais malgré toutes ces avancées, les femmes se font rares, très rares. «Quand je suis devenu directeur du département en 1987, on a tenu à engager des professeures, souligne Jean-Robert Derome. On a aussi soutenu des étudiantes pour qu’elles poursuivent des études doctorales, en espérant qu’elles reviendraient enseigner au département.»

L’actuelle directrice de l’unité, Nicole Saint-Louis, est l’une des professeures arrivées durant ces années-là. «Quand je suis entrée au département, en 1993, j’étais la deuxième professeure après Joëlle Margot. On a longtemps été les seules femmes et récemment sont venues s’ajouter Julie Hlavacek-Larrondo, Laurence Perreault-Levasseur et Delphine Bouilly.»

La présence d’étudiantes s’est aussi accélérée, même si la parité hommes-femmes n’est toujours pas atteinte. À titre d’exemple, 21 femmes ont obtenu un diplôme de premier cycle au cours des 50 premières années d’existence du Département de physique. Il y a eu autant de bachelières entre 2017 et 2019.

Vers l’avenir

De la recherche sur la matière noire de l’Univers en passant par le boson de Higgs et les exoplanètes, les dernières décennies ont été témoins de découvertes auxquelles des membres des communautés diplômée, scientifique et enseignante de l’UdeM ont participé. Et l’avenir est riche en promesses.

«Je dirais que deux secteurs ont le potentiel de changer la donne avec des outils extrêmement puissants, estime Nicole Saint-Louis: les sciences de l’information quantique – dont le professeur Gilles Brassard est pionnier –, et l’intelligence artificielle, qui nous permet d’exploiter des données qu’on n’aurait jamais pu traiter avec nos cerveaux humains. Dans ces deux cas, on est bien placés à Montréal.»

Journée de fête le 20 octobre

Le Département de physique fêtera son centenaire au cours d’une journée d’activités au campus MIL le 20 octobre prochain.

La journée de fête comprend la projection d’un film sur l’histoire du laboratoire lié au projet Manhattan, suivie d’une table ronde sur ce pan de l’histoire du département.

Les étudiantes et les étudiants aussi seront à l’honneur et présenteront leur recherche dans le cadre d’une exposition.

  • Horaire des activités: de 13 h 30 à 18 h.
  • Lieu: campus MIL, en présence et dans le respect des conditions sanitaires.
  • L’inscription est obligatoire.