Crise climatique et enfants: l’urgence d’agir pour leur santé mentale

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Un nouveau document de recherche fait état des effets néfastes des changements climatiques sur la santé mentale des enfants et des adolescents.

«Les menaces liées aux changements climatiques peuvent augmenter de manière additive, interactive et cumulative le risque de psychopathologies chez les jeunes, et ce, de la conception jusqu’à l’adolescence.»

Tel est le constat général qui se dégage d’un article scientifique signé par Francis Vergunst, chercheur postdoctoral en santé publique à l’Université de Montréal, et Helen Louise Berry, professeure à l’Université de Sydney.

Publié dans la revue Clinical Psychological Science, l’article s’appuie sur une perspective développementale pour démontrer que les changements climatiques affectent déjà le développement psychologique des enfants du monde entier. «Ces effets commencent avant la naissance et s’étendent tout au long de la croissance, et ils s’accéléreront avec l’avancée des changements climatiques», croit Francis Vergunst, spécialisé en développement des enfants.

Le développement compromis, de la grossesse à l’adolescence

Francis Vergunst

Selon les auteurs de l’article, avant même la naissance de l’enfant, les facteurs de stress aigus liés à des évènements climatiques extrêmes – tels que des ouragans, des incendies de forêt et des inondations – peuvent traumatiser la mère physiquement et mentalement. «Ces expériences peuvent nuire au développement du fœtus et accroître les risques de retards de développement cognitif par exemple», précise M. Vergunst.

Le chercheur postdoctoral ajoute que les facteurs de stress subaigus, comme les vagues de chaleur, sont liés à un risque accru de complications obstétriques et de naissances prématurées, «des facteurs de risque bien établis pour plusieurs troubles psychiatriques majeurs».

Ensuite, les auteurs abordent la période de la naissance à l’âge de cinq ans, où les enfants sont alors très vulnérables aux maladies infectieuses, aux toxines environnementales, à l’exposition à la chaleur et à la déshydratation. D’abord physiques, ces problèmes peuvent aussi retarder le développement sur les plans de la cognition et du langage.

Au cours de la période de la moyenne enfance (de 6 à 12 ans), les enfants restent vulnérables aux facteurs de stress environnementaux, mais deviennent également plus aptes à comprendre les changements climatiques et leurs répercussions sur leur avenir. Pour Francis Vergunst, «cette prise de conscience peut engendrer du stress, du désespoir, de l’anxiété et de la frustration envers les générations précédentes».

Les adolescents tout aussi à risque

Francis Vergunst rappelle que l’adolescence est marquée par des changements physiologiques, hormonaux et sociaux majeurs, et que la moitié des troubles psychiatriques sont établis avant l’âge de 18 ans.

«Les changements climatiques font monter la pression à cette étape de la vie en augmentant la fréquence, l’intensité et la durée des facteurs de stress liés aux conditions météorologiques, affirme-t-il. L’exposition à de tels évènements est associée à un risque accru de trouble de stress post-traumatique, d’anxiété et de dépression, qui compromettent à long terme la résilience en matière de santé mentale.»

«Il n’y a pas de temps à perdre»

Le document de recherche de Francis Vergunst et sa collègue expose ainsi sur les plans théorique et empirique l’influence de la crise climatique sur la santé et le bien-être psychologiques des jeunes générations, de la conception à l’âge adulte.

Mais c’est également un plaidoyer pour l’urgence de mettre en œuvre des actions rapides et efficaces pour réduire ce fardeau, une question majeure, selon eux, de «justice internationale et intergénérationnelle».

À cet effet, ils défendent l’idée d’intégrer les jeunes dans les discours et les mesures d’atténuation des changements climatiques afin de jeter les bases d’une nouvelle génération de citoyens engagés et de dirigeants efficaces.

«Donnons-leur le sentiment de faire partie des solutions et qu’ils peuvent être plus que des témoins impuissants dans ce lent accident de train qu’est leur avenir», conclut Francis Vergunst.