Montréal en 2061: la ville aux cent vélos

  • Forum
  • Le 14 septembre 2020

  • Mathieu-Robert Sauvé
Avec ses 5,2 millions d’habitants, la région de Montréal, en 2061, comptera des quartiers densément peuplés, mais à échelle humaine, où de très nombreux déplacements se feront à pied, à vélo ou en transport en commun à propulsion électrique.

Avec ses 5,2 millions d’habitants, la région de Montréal, en 2061, comptera des quartiers densément peuplés, mais à échelle humaine, où de très nombreux déplacements se feront à pied, à vélo ou en transport en commun à propulsion électrique.

Crédit : Getty

En 5 secondes

Des chercheurs présentent le «scénario optimiste» de la ville du futur, où les familles vivent en ville et adoptent le transport actif, le télétravail et l’enseignement à distance.

Avec ses 5,2 millions d’habitants, la région de Montréal, en 2061, comptera des quartiers densément peuplés, mais à échelle humaine, où de très nombreux déplacements se feront à pied, à vélo ou en transport en commun à propulsion électrique. Les blessures causées par les accidents de la route auront diminué et l’usage répandu du télétravail et du téléenseignement aura réduit considérablement les émissions de gaz à effet de serre produites par les véhicules.

Voilà, du moins, le «scénario optimal» présenté par les auteurs d’une étude interdisciplinaire visant à imaginer la ville du futur en ciblant les retombées des déplacements sur l’environnement et la santé publique. Ils livrent dans la revue Environmental Research les résultats de leur recherche financée par les Instituts de recherche en santé du Canada, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada et Ouranos. «Le scénario optimal ne se réalisera pas tout seul. Il faudra que l’État instaure des mesures incitatives pour faire cesser l’étalement urbain», explique Audrey Smargiassi, professeure à l’École de santé publique de l’Université de Montréal.

Première auteure de l’étude menée par une équipe internationale comptant 13 spécialistes du génie civil et de la santé publique, Mme Smargiassi précise qu’un des plus importants défis à relever pour que la région montréalaise se développe de façon optimale consiste à diminuer le plus possible les distances entre le point de départ et la destination que le citadin doit parcourir dans sa journée de travail typique. «Nous avons constaté que la distance zéro que constitue le télétravail pouvait apporter une réduction moyenne considérable des déplacements. Si les gens travaillent et étudient à partir de leur domicile, ils ne produisent pas de pollution due au transport!» dit-elle. Cette projection, souligne-t-elle, s’est faite bien avant la pandémie. Il y a quelques mois encore, le télétravail et l’enseignement à distance apparaissaient comme des approches peu réalistes à grande échelle…

Ville contre banlieue

Audrey Smargiassi

En l’absence d’incitatifs fiscaux pour favoriser le retour à la ville (par exemple une taxe à la banlieue), la tendance actuelle à l’étalement urbain va se poursuivre durant les prochaines décennies. On devra alors multiplier les tronçons d’autoroutes et construire de nouvelles voies d’accès au centre-ville pour permettre le déplacement des individus de plus en plus éloignés de leur lieu de travail.

Même avec des moyens de transport plus écologiques comme les autos électriques, les risques d’accidents routiers demeureront élevés. «Ce sont les traumatismes qui sont le plus sérieux problème de santé publique lié aux transports. Si le nombre de déplacements motorisés augmente, on peut s’attendre à une hausse proportionnelle d’accidents de la route. Sans parler de l’effet des moyens de transport sur la qualité de l’air», ajoute la professeure Smargiassi. Dans le scénario optimal, on prévoit une baisse des conséquences sanitaires, dont les blessures causées par la route, de 30 %.

Les résultats de l’étude montréalaise confirment ce que la littérature scientifique semble démontrer depuis quelques années: des changements majeurs dans les pratiques d’urbanisme et une augmentation de l’offre des services de transport urbain sont «nécessaires et possibles» afin de réduire les répercussions environnementales et sanitaires des déplacements humains.

Il va sans dire que les auteurs ne sont pas en faveur de la construction de nouvelles routes. Même le Réseau express métropolitain apparaît comme allant dans la mauvaise direction, puisqu’il promet de relier les banlieues au centre-ville en un temps record.

Montréal laboratoire

Ce n’est pas par hasard que les chercheurs et chercheuses ont choisi d’étudier la région métropolitaine de Montréal pour tester leurs modèles. Seconde région urbaine en importance au Canada après celle de Toronto, son territoire couvre 8327 km2 sur lesquels vivent quelque quatre millions de personnes, soit environ 10 % de la population canadienne. Au cours des 40 prochaines années, cette population est appelée à croître considérablement; il sera intéressant de voir de quelle façon elle choisira d’évoluer. Le rêve de la maison unifamiliale avec une auto à la porte sera peut-être remplacé par un appartement dans un arrondissement urbain où l’essentiel des déplacements se fait à pied ou à vélo.

Et où l’on travaille de la maison, évidemment.

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