Un entraînement physique et cognitif pour contrer le déficit cognitif léger chez les aînés

Combiner l’activité physique et l’entraînement cognitif a permis d'améliorer les capacités cognitives des participants de l'étude.

Combiner l’activité physique et l’entraînement cognitif a permis d'améliorer les capacités cognitives des participants de l'étude.

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Un programme combinant activité physique et entraînement cognitif permet d’améliorer les capacités cognitives des gens âgés aux prises avec un déficit cognitif léger, selon une étude pancanadienne.

Les symptômes de déficit cognitif léger qui se manifestent chez les personnes âgées peuvent être ralentis, voire inversés, grâce à un programme qui combine activité physique et entraînement cognitif, d’après les résultats d’une étude clinique réalisée auprès de 175 aînés ayant reçu un diagnostic de ce trouble. 

Ces résultats, publiés dans le JAMA Network Open, sont le fruit des travaux menés par des chercheurs et chercheuses de cinq universités canadiennes sous la direction du Dr Louis Bherer, professeur titulaire au Département de médecine de l’Université de Montréal.

Une comparaison sans pareille

Il existe plusieurs études qui ont mesuré les bienfaits de l’activité physique, des exercices cognitifs et de la prise d’un supplément de vitamine D sur la santé mentale des personnes âgées, mais aucune n’avait encore comparé une combinaison de ces approches, en incluant des groupes témoins à chacune.  

L’équipe de recherche* a remédié à la situation en comparant l’efficacité de ces trois interventions selon cinq combinaisons:  

  • entraînement physique, exercices cognitifs et supplément de vitamine D; 
  • entraînement physique, exercices cognitifs et placébo de vitamine D; 
  • entraînement physique, exercices cognitifs placébos et supplément de vitamine D; 
  • entraînement physique, exercices cognitifs placébos et placébo de vitamine D; 
  • exercices d’étirement, exercices cognitifs placébos et placébo de vitamine D.

De meilleures capacités cognitives

Afin de mesurer l’évolution des capacités cognitives des participants tout au long de l’étude, l’équipe de recherche a eu recours à un outil appelé ADAS-Cog-13. Il permet d’évaluer 13 aspects des fonctions cognitives – dont la mémoire, l’orientation, la compréhension et l’utilisation du langage – selon un pointage de performance, un score total plus élevé indiquant une plus grande détérioration cognitive et inversement.  

Ainsi, c’est la combinaison de l’activité physique et de l’entraînement cognitif qui a donné les meilleurs résultats. Les personnes de ce groupe ont vu leurs capacités cognitives s’améliorer à l’issue des 20 semaines et les améliorations étaient encore présentes six mois après la fin de l’étude. 

«Non seulement ces résultats étaient significatifs sur le plan statistique, mais ils l’étaient aussi sur le plan clinique: la mémoire épisodique, la capacité d’attention et le sens de l’orientation se sont véritablement accrus», explique Louis Bherer. 

Pris isolément, le programme d’activité physique a aussi eu un effet positif sur les capacités cognitives, mais dans une moindre mesure.  

De l’autre côté du spectre, les personnes du groupe témoin ont vu leurs capacités diminuer à l’issue des 20 semaines. 

Par ailleurs, la supplémentation en vitamine D n’a eu aucune influence sur la cognition durant l’étude, bien que la littérature sur le sujet laisse entendre qu’elle pourrait jouer un rôle. Selon Louis Bherer, l'absence d'une amélioration liée à la prise de vitamine D «peut être le fait de valeurs sériques normales-élevées chez nos participants, alors que les avantages d'une supplémentation en vitamine D ne sont observables qu'en cas de carence grave».

Un programme sur quatre mois

Louis Bherer

Louis Bherer

Crédit : Courtoisie

Âgées de 60 à 85 ans, les 175 personnes qui ont pris part à l’étude étaient toutes atteintes d’un déficit cognitif léger. Leur recrutement s’est effectué de 2016 à 2020.  

«Quatre critères indiquent la présence d’un déficit cognitif léger, dit Louis Bherer. Les gens qui en souffrent ont des pertes subjectives et objectives de mémoire ou d’attention – ou les deux à la fois –, mais ils sont aptes à accomplir leurs tâches quotidiennes et ne sont pas atteints de démence.»  

Les participants se sont engagés à suivre le protocole de recherche pendant 20 semaines consécutives. 

Les séances d’entraînement physique consistaient à effectuer des exercices combinant aérobie et force musculaire à une intensité qui entraîne une augmentation du rythme cardiaque et un essoufflement.  

Les exercices cognitifs reposaient sur des tâches de prise de décision où la vitesse d’exécution et l’attention divisée étaient sollicitées, à partir d’une application accessible sur tablette élaborée dans le laboratoire du professeur Bherer. 

La supplémentation en vitamine D était de 10 000 unités internationales, à raison de trois fois par semaine.

L’importance de bouger, d’activer ses neurones et de socialiser

Selon Louis Bherer, il faut viser de nouveaux apprentissages, stimuler la prise de décision rapide et socialiser au moins deux fois par semaine. «Le plus important est de trouver des activités qu’on aime et de les varier à l’occasion», suggère-t-il.

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Les résultats de cette étude confirment que, si l’activité physique favorise le maintien d’une bonne santé cognitive, l’ajout de jeux ou de tâches qui stimulent les neurones y contribue davantage.  

Mais quel type d’efforts physiques et cognitifs faut-il consentir afin d’obtenir une réelle amélioration des fonctions cognitives une fois le cap de la soixantaine franchi? 

«Il faut atteindre un niveau d’activité aérobique d’endurance qui donne chaud – comme la marche rapide, le vélo ou la natation – et les résultats sont meilleurs en entraînant aussi la force musculaire», mentionne Louis Bherer, qui est également directeur du Centre ÉPIC de l’Institut de cardiologie de Montréal. 

Il recommande d’effectuer ces exercices au moins trois fois par semaine, sinon quatre.  

«Les exercices aérobiques et musculaires favorisent la libération de protéines qui ont un effet neurotrophique sur les cellules du cerveau», précise-t-il.  

Pour ce qui est de la stimulation cognitive, Louis Bherer conseille de s’y adonner presque tous les jours. «Il faut essayer de faire de nouveaux apprentissages et stimuler la prise de décision rapide, par exemple avec des jeux qui exigent de répondre à deux stimulus en même temps et qui fournissent en outre une rétroaction afin de repousser ses limites», observe-t-il. 

«Il est aussi suggéré d’avoir des interactions sociales au moins deux fois par semaine, en sortant idéalement de chez soi pour se stimuler, conclut Louis Bherer. Le plus important étant de trouver des activités qu’on aime et de les varier à l’occasion afin que les activités tant physiques que cognitives durent dans le temps.»  

 

* L’équipe de recherche était composée de scientifiques de l’Université Western, l’Université de Waterloo, l’Université Wilfrid Laurier, l’Université de la Colombie-Britannique et l’Université de Montréal.

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