Une molécule de l’UdeM sauve des vies

«Je suis très honorée d’avoir pu prendre part à cette étude clinique, menée par une équipe extraordinaire, affirme Monique Russier. Je n’aurais eu aucune chance de vivre sans ça.»

«Je suis très honorée d’avoir pu prendre part à cette étude clinique, menée par une équipe extraordinaire, affirme Monique Russier. Je n’aurais eu aucune chance de vivre sans ça.»

Crédit : Mike Redmond

En 5 secondes

La molécule UM-171, conçue à l’Institut de recherche en immunologie et en cancérologie de l’UdeM, a déjà sauvé plusieurs patients atteints d'une leucémie ou d'un lymphome.

Monique Russier, survivante d’un cancer foudroyant, a été sauvée grâce à la molécule UM-171.

En 2014, lors d’un séjour de randonnée en montagne en Savoie, elle est frappée par une forte fièvre et se met à tousser. Après une prise de sang et une radiographie des poumons, le diagnostic tombe: elle a une leucémie double, particulièrement difficile à traiter. «C’était très brutal», se souvient Monique Russier.

Toujours en France, elle subit une greffe de sang de cordon et, après quelques mois, elle rentre au Québec. Elle est alors suivie par la Dre Sandra Cohen, chercheuse clinicienne au service d’hématologie et d’oncologie médicale de l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont et professeure au Département de médecine de l’Université de Montréal.

Or, quelques mois plus tard, Monique Russier fait une rechute. «C’était vraiment le ciel qui me tombait sur la tête», raconte-t-elle.

Les pronostics sont alors très peu encourageants. Mais elle voit une lueur d’espoir lorsque la Dre Cohen lui parle de l’étude clinique du DGuy Sauvageau, chercheur principal à l’Unité de recherche en génétique moléculaire des cellules souches de l’Institut de recherche en immunologie et en cancérologie (IRIC) de l’UdeM.

Grâce à la molécule UM-171 mise au point à l’IRIC, son équipe est maintenant capable de multiplier les cellules souches présentes dans le sang de cordons ombilicaux pour rendre le greffon plus efficace.

«Il y avait des effets indésirables qui pouvaient être fatals, mais je me suis dit que, si j’avais une chance d’être sauvée, je la prenais, témoigne aujourd’hui Monique Russier. Et je me suis dit aussi que, si jamais ça ne fonctionnait pas pour moi, au moins, ça ferait avancer la science.»

Des vies sauvées

Monique Russier reçoit le greffon UM-171 en septembre 2016. «J’ai senti mon énergie revenir beaucoup plus rapidement que lors de ma première greffe», raconte celle qui, encouragée par son mari et ses deux filles, a fait de grands efforts pour reprendre des forces après l’intervention. Après quatre ou cinq mois, elle avait retrouvé toute l’énergie qu’elle avait avant son diagnostic.

«Je suis très honorée d’avoir pu prendre part à cette recherche, menée par une équipe extraordinaire, affirme la femme de 66 ans. Je n’aurais eu aucune chance de vivre sans ça.»

Et elle n’est pas la seule. Tyler Rabey est un autre survivant «UM-171». Après avoir reçu un diagnostic de lymphome lymphoblastique – un type de leucémie rare et agressive –, il n’a pas répondu aux premiers traitements. On lui a alors dit d’envisager les soins palliatifs pour rester en vie encore quelques mois. Il avait 25 ans.

«J’ai refusé et j’ai eu un traitement de chimiothérapie de dernier recours, relate-t-il. Les chances qu’il fonctionne étaient de 10 à 15 % et, si c’était le cas, j’allais avoir besoin d’une greffe de cellules souches par la suite. J’ai finalement répondu au traitement et j’ai pris part à l’étude clinique UM-171.»

Des lésions nerveuses dues à la chimiothérapie de dernier recours ont cloué le jeune homme à un fauteuil roulant pendant quatre mois et il a mis plus d’un an à guérir, mais il s’en est sorti. «Je n’aurais pas pu y arriver sans les progrès de la médecine», ajoute-t-il.

La recette du succès

C'est en 2014 que les équipes de Guy Sauvageau et d'Anne Marinier ont découvert la molécule UM-171.

Crédit : IRIC

Pour en arriver à ce résultat qui sauve maintenant des vies, plusieurs chercheurs ont dû mettre la main à la pâte. Alors que le DSauvageau voulait trouver une molécule qui allait multiplier les cellules souches dans le sang de cordon, il est allé en discuter avec Anne Marinier, professeure à l’UdeM, chercheuse principale et directrice de la chimie médicinale à l’IRIC.

«Mon équipe a choisi 5280 molécules, la grande majorité synthétisées par les chimistes de l’IRIC et du Département de chimie de l’UdeM. Avec l’équipe du DSauvageau, nous en avons repéré une, la molécule UM-729, que nous avons optimisée pour obtenir UM-171», explique Anne Marinier, qui a travaillé dans l’industrie pharmaceutique pendant 15 ans avant de se joindre au personnel de l’IRIC.

C’est ainsi qu’est née UM-171, prénommée en honneur de l’UdeM.

Les résultats particulièrement prometteurs des études cliniques emballent les chercheurs. «Dans cette étude réalisée sur 22 patients, le taux de mortalité a été de moins de cinq pour cent et il y a eu très peu de récidives, même si certains patients étaient aux soins palliatifs en commençant l’étude», précise le DSauvageau.

«Lorsqu’on choisit d’aller en recherche dans le domaine du médicament, on veut avoir un effet sur la vie des gens, mentionne Anne Marinier. Juste de penser pouvoir guérir un patient, c’est énorme.»

«Depuis que je suis très jeune, j’avais comme rêve de guérir les gens du cancer», déclare pour sa part Guy Sauvageau.

Et ce projet de recherche pourrait maintenant avoir d’autres retombées.

«Ce qu’on sait maintenant de la molécule UM-171, c’est qu’elle permet d’accroître les cellules souches, mais elle joue d’autres rôles, dit le DSauvageau. Et maintenant, on comprend qu’elle peut nous aider à guérir d’autres maladies. Ce qu’on vient de vivre, ce n’est que le premier chapitre.»

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