La génétique au service des jeunes cœurs malades

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L'équipe du Dr Gregor Andelfinger a fait une découverte majeure pour la compréhension des mécanismes d’une cardiopathie congénitale commune.

Gregor Andelfinger

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Une équipe de recherche du CHU Sainte-Justine et de l’Université de Montréal a découvert un nouveau mécanisme responsable d’une maladie congénitale courante de la valve aortique. Les résultats de cette étude, obtenus grâce à une collaboration avec le Hebrew University Medical Center, sont présentés dans la prestigieuse revue Nature Genetics.

Deux pour cent de la population présente une cardiopathie valvulaire, un chiffre non négligeable. En dépit de cette fréquence élevée, et malgré les nombreux indices quant au rôle de la génétique dans les maladies aortiques, seuls quelques gènes ont pu être découverts jusqu'à présent. Ici, le gène ADAMTS19 est mis en cause dans une maladie de la valve aortique.

«Les maladies valvulaires cardiaques peuvent toucher l’une des quatre valves du cœur, soit la valve tricuspide, pulmonaire, mitrale ou aortique. Nous nous sommes intéressés à des patients qui ont une valve aortique bicuspide ‒ c’est-à-dire une valve aortique qui n’est constituée que de deux feuillets fonctionnels au lieu des trois normalement attendus», explique le Dr Gregor Andelfinger, cardiologue pédiatrique et chercheur au CHU Sainte-Justine et à l'Université de Montréal. La plupart des patients atteints sont asymptomatiques au début de leur vie. À l’âge adulte, cette valve bicuspide peut entraîner une fuite ou un rétrécissement aortique précoce, menant à un essoufflement ou une fatigue inhabituelle à l’effort.

Cette découverte découle du suivi d’une famille au CHU Sainte-Justine; deux des trois enfants de cette famille sont atteints de cette variation congénitale, ce qui a permis de mettre au jour le gène responsable, ADAMTS19, qui jusqu’à aujourd'hui n’avait pratiquement jamais été caractérisé par d’autres équipes médicales et encore moins associé à cette maladie.

«Pour trouver le rôle de ce gène, nous avons utilisé un modèle préclinique présentant les mêmes caractéristiques pathologiques que nos jeunes patients. Cela nous a permis d’analyser la fonction du gène dans le détail et de définir les mécanismes de la maladie, mentionne Florian Wünnemann, premier auteur de l’étude. Grâce au séquençage de cellules uniques ‒ une nouvelle technologie qui permet d’établir le profil génétique d’une seule cellule dans le tissu cardiaque par exemple ‒, on arrive à déterminer très précisément le type cellulaire qui est responsable de la maladie. Cela nous a énormément aidés à montrer les conséquences moléculaires de la mutation.»

En effet, les données indiquent que la mutation chez les patients change l’action du gène régulateur des mouvements dans les valves. De fil en aiguille, une équipe de recherche israélienne du Hebrew University Medical Center qui a découvert exactement le même gène a contacté le groupe du DAndelfinger, venant appuyer l’hypothèse de l’équipe montréalaise.

On estime que près de 4000 chirurgies valvulaires sont effectuées au Canada chaque année, un chiffre en constante croissance en raison du vieillissement de la population. Le fardeau économique est évalué à près d’un milliard de dollars par an, sans compter le poids de la souffrance pour les patients et leur entourage.

Le CHU Sainte-Justine est un centre d’expertise provincial de premier ordre en maladies génétiques rares, tant pour la qualité et le nombre de projets de recherche menés que pour la prise en charge clinique mais aussi le transfert des connaissances. La découverte de la cause génétique d’une quarantaine de maladies rares par des équipes du CHU Sainte-Justine au cours des dernières années est une illustration éclatante de cette expertise.

À propos de l’étude

L’article «Loss of ADAMTS19 causes progressive non-syndromic heart valve disease» a été publié dans la revue Nature Genetics le 16 décembre 2019. Le premier auteur est Florian Wünnemann, ancien étudiant au doctorat sous la supervision du Dr Gregor Andelfinger. L’auteur principal est le Dr Andelfinger, professeur titulaire au Département de pédiatrie de l’Université de Montréal et cardiologue pédiatrique, chercheur et chef de l'axe de recherche Pathologies fœtomaternelles et néonatales au CHU Sainte-Justine. L’étude a été soutenue par la Fondation des maladies du cœur et de l’AVC du Canada, la Fondation Leducq, la Chaire de recherche en génétique cardiovasculaire de la Banque Nationale et le Fonds de recherche du Québec − Santé.

À propos du CHU Sainte-Justine

Le Centre hospitalier universitaire (CHU) Sainte-Justine est le plus grand centre mère-enfant du Canada et le 2e plus important centre pédiatrique d'Amérique. Il est membre du grand réseau d'excellence en santé de l'Université de Montréal (RUIS). Il compte 5 457 employés dont 1 532 infirmiers et infirmières auxiliaires et 1 000 professionnels en soins, 520 médecins, dentistes et pharmaciens, 822 résidents et plus de 204 chercheurs, 411 bénévoles, 4 416 stagiaires et étudiants de toutes disciplines. Le CHUSJ comprend 484 lits dont 67 au Centre de réadaptation Marie Enfant (CRME), seul centre dédié exclusivement à la réadaptation pédiatrique au Québec. L'Organisation mondiale de la santé a reconnu le CHU Sainte-Justine « hôpital promoteur de la santé ».

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