Dix mythes sur le sommeil

En 5 secondes

On y consacre le tiers de notre vie. Pourtant, une aura de mystère l’entoure. Sommeil, qui es-tu?

Malgré plusieurs décennies de progrès scientifiques, il existe toujours plusieurs idées populaires et fausses croyances quant aux bras de Morphée. Roger Godbout (psychologie 1988), professeur à l’Université de Montréal et directeur scientifique du laboratoire et de la clinique du sommeil de l’hôpital Rivière-des-Prairies, rétablit les faits sur 10 mythes répandus.

1. Être en déficit d’une heure de sommeil par nuit n’est pas nuisible

Faux. Si l’on portait des souliers qui étaient un point trop petit, on n’en mourrait pas, mais à la longue, ça deviendrait très difficile. Pareil pour le sommeil: il n’est pas compressible.

Le nombre d’heures de sommeil dans une nuit, propre à chacun, importe pour avoir un équilibre entre les phases du sommeil: lent, lent profond et paradoxal. Quand on change l’heure au printemps, on voit les répercussions sur la fréquence des accidents vasculaires et des infarctus du myocarde, sur le manque d’attention, la somnolence. Perdre une seule heure de sommeil a un effet sur la performance, la prise de décision, le temps de réaction, l’humeur, l’impulsivité et l’irritabilité.

Dormir moins veut également dire guérir moins vite, réparer plus difficilement ses tissus et lutter moins efficacement contre la grippe.

2. L’alcool permet de mieux dormir

Faux. L’alcool permet peut-être de s’endormir plus rapidement. Comme les somnifères, il inhibe les structures qui acheminent les informations vers le cortex cérébral. En présence d’alcool, le cerveau est donc plus tranquille.

Cependant, l’alcool a des effets sur bien d’autres composantes. Normalement, quand on dort, l’horloge biologique fait baisser la température corporelle de quelques dixièmes de degré Celsius et l’alcool empêche cette fonction. Il perturbe aussi les phases du sommeil, notamment le sommeil paradoxal.

3. On apprend mieux lorsqu’on étudie avant de se coucher

Vrai. La performance à un test sera meilleure si l’on a connu une bonne nuit de sommeil avant au lieu d’avoir passé une nuit blanche à étudier. Quand on apprend quelque chose, cette nouvelle information est mise dans la mémoire temporaire, qui fait appel à l’hippocampe cérébral, et attend de passer dans la région où elle deviendra permanente, soit le cortex cérébral. Ce transfert ne se fait que pendant le sommeil pour certains types d’apprentissage.

4. La mélatonine aide à s’endormir

Vrai et faux. Rappelons que la mélatonine n’est pas un somnifère. Il s’agit plutôt d’une «hormone de la noirceur». Elle est sécrétée la nuit par tous les êtres vivants pour indiquer à l’organisme qu’il fait noir.

Quand on la prend toute seule oralement, c’est bien rare qu’elle ait l’effet désiré. Elle peut aider à dormir lorsqu’elle est appuyée par certains comportements. D’abord, elle doit être prise quotidiennement et à la même heure, sans exception. Ensuite, on doit adopter une bonne hygiène de sommeil: des heures de coucher et de lever sensiblement les mêmes tous les jours, un environnement physique bien adapté au sommeil et des activités calmes avant d’aller au lit.

5. Le sommeil est plus réparateur avant minuit

Faux. La qualité du sommeil est une question de phase, elle ne dépend pas de l’heure du coucher. Les phases responsables de la récupération physique surviennent en début de nuit et les heures importantes pour la récupération cognitive arrivent en fin de nuit, par cycles de 90 minutes. Chaque cycle est composé de toutes les phases du sommeil: sommeil lent surtout en début de nuit, puis paradoxal surtout en fin de nuit, indépendamment de l’heure à laquelle on se couche.

6. On peut récupérer le manque de sommeil de la semaine en dormant plus la fin de semaine

Faux. On ne récupérera pas complètement les cinq nuits insuffisantes de la semaine, mais seulement la précédente et peut-être un peu de celle avant. Le sommeil perdu des premières nuits l’est à jamais. Les conséquences du manque de sommeil, comme la mauvaise humeur, persisteront la fin de semaine.

7. Les écrans nuisent au sommeil

Vrai. La longueur d’onde bleue est celle qui inhibe le plus puissamment la sécrétion naturelle de la mélatonine. Le problème n’est pas seulement le contenant, mais aussi le contenu. Il faut éviter de s’exposer à des contenus violents ou trop stimulants, même agréables, peu de temps avant d’aller au lit.

8. Il ne faut pas manger juste avant de se coucher

Vrai et faux. Il vaut effectivement mieux ne pas trop manger avant de se glisser entre les draps, puisque la digestion active les systèmes nerveux central et périphérique. La nourriture grasse ou épicée peut aussi entraîner des reflux qui peuvent nous réveiller. Par contre, une petite collation avant de se coucher n’est pas dommageable, surtout si elle fait partie d’une routine.

9. L’activité physique aide à mieux s’endormir

Plutôt vrai. L’activité physique permet de se détendre et de détourner son attention, un peu comme la méditation peut le faire. Bouger contribue à une meilleure santé physique générale, on aura donc une meilleure respiration, moins de courbatures, davantage de flexibilité, etc.

Aller marcher peu de temps avant de se mettre au lit peut aider à s’endormir, mais un exercice trop intense va reporter l’heure d’endormissement, car il activera grandement le système nerveux sympathique.

10. Les siestes de 20 minutes ont un effet bénéfique

Plutôt vrai. Au cours de mon doctorat, nous avions fait faire des siestes à des gens en santé qui n’en faisaient normalement pas et avions testé leur temps de réaction avant et après. Nous avions constaté que la performance augmentait après la sieste, qu’ils répondaient plus rapidement et commettaient moins d’erreurs.

Cependant, si les siestes sont moindrement plus longues, elles auront des répercussions sur la nuit suivante, puisque la dette de sommeil qu’on accumule dans la journée aura déjà été partiellement remboursée.

Sur le même sujet

sommeil recherche professeurs