Quan Nha Hong: le télétravail, c’est du boulot!

Quan Nha Hong

Quan Nha Hong

Crédit : Courtoisie

En 5 secondes

La pandémie a changé la façon dont les employeurs et employés considèrent le télétravail. Une petite révolution qui comporte ses avantages et ses inconvénients, estime l’ergothérapeute Quan Nha Hong.

S’adapter. Un verbe que Quan Nha Hong conjugue souvent et à tous les temps. Née au Vietnam, elle s’est adaptée dès son plus jeune âge à sa terre d’adoption. «Je suis arrivée au Québec avec mes parents à l’âge de deux ans. Pour moi, l’adaptation a été toute naturelle», évoque celle qui a grandi à Sainte-Thérèse, dans les Basses-Laurentides.

D’aussi loin qu’elle se souvienne, Quan Nha Hong a toujours voulu aider les autres. En passant un test d’aptitude au secondaire, un choix de carrière s’est imposé: l’ergothérapie. «Je ne savais pas ce que c’était», dit-elle en riant. L’idée a fait son chemin. La voilà qui travaille aujourd’hui à la rééducation et à la réinsertion dans une optique d’autonomie. Depuis bientôt deux ans, elle transmet ses connaissances avec passion à ses étudiantes et étudiants à titre de professeure adjointe à l’École de réadaptation de l’Université de Montréal.

Retour aux sources

En 2021, en plein cœur de la pandémie, l’ergothérapeute diplômée de l’Université de Montréal revenait à son alma mater après un brillant parcours: une maîtrise en sciences cliniques de l’Université de Sherbrooke, une autre en évaluation et gestion des technologies de la santé de l’UdeM, un doctorat en médecine de famille et soins de santé primaires de l’Université McGill et un postdoctorat en santé et services sociaux effectué à la University College de Londres et à l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux du Québec.

À ce moment-là, comme des millions de gens ici et ailleurs, Quan Nha Hong a dû s’adapter au télétravail imposé par le confinement. En revanche, elle avait une longueur d’avance sur tout le monde. «Des amis, des collègues qui travaillaient à la maison me contactaient pour me demander: “Mon siège est-il adéquat pour les nombreuses heures passées à l’ordi? J’ai mal au dos, que dois-je faire?”» Ces questions et bien d’autres encore lui ont donné l’idée de creuser le sujet et d’entreprendre un projet de recherche sur les enjeux de santé et de bien-être nés de la nouvelle normalité.

«Des troubles musculosquelettiques, qui sont une cause d'incapacité au travail, ont été signalés chez les personnes en télétravail. J’ai voulu explorer les défis auxquels elles sont confrontées», résume celle qui est aussi chercheuse au Centre de recherche interdisciplinaire en réadaptation du Montréal métropolitain.

Télétravail: les pour et les contre

Travailler à la maison permet d’avoir des horaires flexibles et une meilleure concentration. Les déplacements sont réduits au maximum, ce qui signifie moins de stress et plus de temps libre. Sans compter les économies d’essence, de nourriture, de café…

Souvent exercé dans des conditions non optimales – à partir de la table de cuisine, sur une chaise droite et rigide –, le télétravail peut toutefois causer des douleurs. Cou, dos, poignets, hanches: ces parties du corps sont constamment sollicitées. Des gestes répétés dans une position statique peuvent, au fil du temps, entraîner un inconfort temporaire ou même permanent.

Le télétravail représente en outre un défi en termes de gestion de temps. «Il y a quelque chose de pervers dans le télétravail: les gens peuvent travailler même quand ils ne se sentent pas bien; ils sont “présents” alors qu’ils devraient se reposer. À la maison, il n’y a plus de coupures: on oublie de prendre une pause, on lit ses courriels le soir, on y répond le week-end», illustre Quan Nha Hong.

Dans les entretiens qu’elle a menés en ligne auprès d'adultes souffrant de troubles musculosquelettiques et ayant fait du télétravail au cours de la dernière année, la chercheuse a même découvert que certains employés n’osaient pas informer leur employeur de leurs douleurs associées au télétravail de peur de perdre la possibilité de travailler de la maison.

Les résultats préliminaires de sa recherche, présentés au 90e Congrès de l’Acfas, ont permis de cerner divers facteurs qui influent sur l’apparition de la douleur. Des pistes de réflexion seront proposées ultérieurement en vue d’améliorer la santé des personnes en télétravail et de prévenir l’incapacité au travail. «Comme le télétravail ne va pas disparaître, il faut penser à des mesures de prévention et de sensibilisation auprès des travailleurs et des employeurs. Il faudra aussi mettre en place des politiques sur le télétravail pour assurer un environnement sain et sécuritaire», conclut-elle.

Comment éviter les douleurs liées au télétravail? La spécialiste donne quatre conseils:

  • prendre des pauses régulièrement;
  • changer de position fréquemment;
  • s’assurer d’avoir un équipement approprié;
  • éviter l’exécution simultanée de plusieurs tâches (le multitâche) et les réunions à la chaîne.