Que peut la philosophie politique pour la justice en matière de droit au logement?

Les réflexions autour des concepts de liberté, d'égalité et de justice, que la philosophie politique aborde de manière interdisciplinaire, seront au cœur du colloque.

Les réflexions autour des concepts de liberté, d'égalité et de justice, que la philosophie politique aborde de manière interdisciplinaire, seront au cœur du colloque.

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Un colloque sur le logement et la justice sociale aura lieu à l’Université de Montréal les 9 et 10 mai.

Alexandre Petitclerc

Alexandre Petitclerc

Crédit : Courtoisie

Alors que la crise du logement s’exacerbe tant au Québec qu’à l’étranger, un colloque sur le logement et la justice sociale se tiendra à l’Université de Montréal. À cette occasion, nous avons parlé à Alexandre Petitclerc, doctorant en philosophie politique à l’UdeM sous la direction de Christian Nadeau, à l’origine de ce colloque.

Quelles répercussions a la crise du logement sur les individus?

Les effets sur les gens sont protéiformes. Le premier a trait à l'accessibilité, avec des difficultés à trouver un logement non seulement dans de grandes métropoles, mais également dans des régions plus rurales. C’est le cas au Québec et ailleurs dans le monde. Un véritable déficit sur le plan de l'offre se fait sentir. Cependant, le discours public actuel semble trop axé sur l'offre et la demande, négligeant d'autres aspects. On insiste beaucoup sur la construction de nouveaux logements et les implications en termes de politiques publiques, qu’on pense notamment à la densité de population et à l'occupation du territoire. Des mesures sont aussi mises en place destinées à favoriser l'accès au logement pour certains groupes. Mais le principal problème est le coût du logement pour de nombreuses personnes. 

L'accessibilité limitée au logement entraîne une augmentation importante des coûts. Ce phénomène touche tant les nouveaux acheteurs, qui n'ont pas encore accès à la propriété, que les locataires de manière disproportionnée. Cela exerce une pression considérable sur le budget des individus, dont la capacité à dépenser pour se nourrir, se divertir, voire se procurer d'autres biens essentiels, diminue. En fin de compte, le loyer est souvent le dernier poste budgétaire sur lequel les gens peuvent rogner, ce qui est susceptible de les conduire à la rue. Cette situation entraîne une augmentation du stress et complique la planification future ainsi que l'intégration au sein de la communauté et même de la société démocratique dans son ensemble. Le logement est perçu comme un élément fondamental et central dans la vie des individus, un point de départ pour se projeter dans l'avenir. Lorsque cette base est compromise, cela engendre des inégalités. 

Quelles questions de justice sociale cela soulève-t-il?

Pour envisager l'avenir du logement, il est crucial de comprendre le rôle qu'il joue dans l'instauration d'une forme de justice sociale en favorisant un sentiment d'égalité entre les individus dans la société.  

Dans nos démocraties, l'accès au logement n'est pas uniforme pour tous. Il est donc essentiel de prendre en compte les groupes socialement défavorisés en matière de logement tout en réfléchissant au privilège associé à la possession d'un logement. Au cours des dernières décennies dans nos sociétés libérales démocratiques, de nombreuses notions étaient considérées comme acquises, telles que la propriété privée, les revenus des propriétaires de biens locatifs, les avantages fiscaux liés à la valorisation immobilière. Ces questions soulèvent également des interrogations sur la justice intergénérationnelle, notamment dans un contexte où l'héritage joue un rôle central dans l'accès à la propriété. Il est essentiel de prendre en compte les disparités entre les générations. Nous sommes confrontés à des enjeux de justice sociale auxquels nous devrons répondre. 

Qu’est-ce que la philosophie politique peut faire pour la justice en matière de droit au logement?

Je suis partisan d'une approche qui intègre une réflexion théorique tout en s'appuyant sur des éléments concrets du monde réel. Mon objectif n'est pas de concevoir un monde abstrait où le logement serait accessible à tous, mais plutôt d'examiner comment résoudre concrètement ce problème. 

Actuellement, le discours est fortement axé sur l'offre. La politique peut enrichir le débat en abordant des questions peut-être plus abstraites, mais essentielles pour la coexistence sociale. Il est temps de réévaluer des concepts largement répandus et souvent considérés comme acquis, tel le rôle de la propriété privée dans l'accentuation des inégalités liées au logement. Nous pourrions repenser les limites de l'accumulation de capitaux. 

Ensuite, la philosophie politique peut stimuler une réflexion sur le droit au logement: qu'implique-t-il? Quelle est la portée juridique de ces questions dans des sociétés fondées sur des principes communs tels que l'égalité pour tous? L'accès au logement s’inscrit-il comme moyen de défense de l'égalité? Ces réflexions autour des concepts de liberté, d'égalité et de justice, que la philosophie politique aborde de manière interdisciplinaire, seront au cœur de notre colloque. 

Aide-mémoire

Quoi? Colloque «Logement et justice sociale» 

Quand? Les 9 et 10 mai 

Où? Au campus MIL, 1375, avenue Thérèse-Lavoie-Roux, salle A-3521 

Entrée libre 

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