Marc-André Legault: optimiser la réponse aux médicaments grâce à la bio-informatique
- UdeMNouvelles
Le 11 octobre 2024
- Virginie Soffer
En combinant génétique et intelligence artificielle, Marc-André Legault, nouveau professeur à la Faculté de pharmacie, cherche à révolutionner la réponse aux traitements médicamenteux.
Marc-André Legault, nouvellement professeur à la Faculté de pharmacie de l’Université de Montréal, vise à mieux comprendre l’influence des variations génétiques sur la réponse aux médicaments afin de transformer les soins de santé. En combinant la statistique génétique, l’épidémiologie génétique et l’apprentissage automatique, il cherche à désigner les patients les plus susceptibles de bénéficier de traitements spécifiques tout en minimisant leurs effets secondaires. Des recherches qui pourraient transformer la médecine personnalisée.
Une piqûre pour la recherche dès la première année d’université
C’est dès la fin de sa première année de baccalauréat en sciences biomédicales que Marc-André Legault a eu la piqûre pour la recherche. Il a effectué un stage à l’École d'optométrie de l’Université de Montréal et a intégré un laboratoire de neurosciences, une expérience qui l’a marqué. Il y a réalisé son premier véritable projet de recherche et il s’y est consacré avec passion. «J’ai vraiment pu mener mon projet de recherche par les expériences, rapporter les résultats, interagir avec le reste de l’équipe», se souvient-il avec enthousiasme.
Puis une rencontre marquante avec un chercheur en bio-informatique a redéfini sa trajectoire. «Il m'avait dit à quel point la bio-informatique était une discipline en émergence et qu’elle s’avérait fort utile en recherche biomédicale afin de résoudre des problèmes concrets», se rappelle-t-il. Fasciné par le potentiel de cette discipline qu’il pourrait allier avec sa curiosité pour les nouvelles technologies, l’étudiant a alors décidé de se spécialiser en bio-informatique.
Dans le courant de ses études, il s’est joint au personnel du laboratoire de Marie-Pierre Dubé à l’Institut de cardiologie de Montréal. Là, il a pu développer ses compétences en matière de développement d’outils bio-informatiques en se concentrant notamment sur la comparaison des méthodes de détection des variations structurales du génome. C’est d’ailleurs là qu’il a cosigné sa première publication scientifique, un travail novateur pour lequel il a fait appel à des jumeaux monozygotes pour comparer différents algorithmes de détection des variations génétiques.
Prévoir l’efficacité de médicaments grâce aux approches omiques
Marc-André Legault explore des approches de pointe dans la pharmaco-omique pour transformer la médecine personnalisée. Plutôt que de se limiter à l’analyse d’un seul gène ou d’une seule protéine, il adopte une vision plus globale, prenant en compte l’ensemble des molécules présentes dans le corps. «En épidémiologie génétique, on se concentre sur des biomarqueurs simples comme le taux de cholestérol pour évaluer les risques de maladies cardiovasculaires. Avec les approches omiques, on analyse l’effet des médicaments sur l'ensemble des protéines dans le corps», explique-t-il.
Dans son doctorat, Marc-André Legault a ainsi analysé les effets de 26 616 protéines sur 1746 phénotypes en se basant sur les données de plus de 413 000 individus de la UK Biobank, une vaste cohorte populationnelle du Royaume-Uni. Ces recherches, accessibles via la plateforme ExPheWAS, permettent de mieux comprendre les liens entre les variations génétiques et différentes maladies.
Avec ces travaux, le professeur a pour objectif de dresser un tableau moléculaire complet de l’état de santé des patients en intégrant des données sur les protéines et d’autres biomarqueurs. Cette approche permettra à terme de sélectionner les médicaments les plus adaptés à chaque individu en tenant compte de son profil biologique unique. «Nous pourrons alors nous servir de ces informations pour prioriser des traitements, en personnalisant les choix de médicaments en fonction de l’état actuel du patient», précise le professeur.
Un aspect clé de ses recherches consiste à modéliser l’effet des médicaments sur des personnes qui ne les prennent pas, en utilisant leurs variations génétiques. «Si une personne porte une variation génétique qui réduit naturellement l’activité d’une enzyme, cela peut imiter l’effet d’un médicament conçu pour inhiber cette enzyme», indique-t-il. Ces modèles s’avèrent ainsi utiles dans la mise au point de médicaments pour aider l’élaboration d’études cliniques ou pour prévoir les effets à long terme de l’utilisation de médicaments.
En tant que chercheur associé à Mila, l’Institut québécois d’intelligence artificielle, Marc-André Legault continue de concevoir des outils bio-informatiques et des algorithmes d’apprentissage automatique pour analyser les conséquences des variations génétiques sur les réponses aux traitements. Ses recherches comprennent aussi le «repositionnement de médicaments», c’est-à-dire l’emploi de traitements existants pour d’autres maladies. Par exemple, un médicament conçu pour soigner la maladie de Crohn pourrait être réutilisé pour traiter l’arthrite après étude de ses effets sur le profil omique des patients.
Des recherches au service des enfants
Marc-André Legault est désormais chercheur au Centre de recherche Azrieli du CHU Sainte-Justine, où il travaille à déterminer quels médicaments prescrits à des adultes pourraient l’être à des enfants. Cela présente un défi de taille pour le chercheur habitué à recourir à des superordinateurs et des banques de mégadonnées: «Chez l'adulte, c'est fréquent d'avoir des cohortes de plus de 500 000 ou de 1 000 000 de participants; chez les enfants, c'est extrêmement rare», dit-il.
«Comprendre à l’échelle moléculaire l’effet des médicaments chez les enfants permettra de mettre l’accent sur les traitements adaptés à leurs besoins spécifiques», poursuit-il, déterminé à améliorer les soins aux jeunes patients.
Transmettre la passion pour la recherche
À côté de ses activités de recherche, Marc-André Legault prend plaisir à transmettre son savoir à ses classes à l’Université de Montréal. Cet hiver, il va leur enseigner la randomisation mendélienne, ce qui est étroitement lié à ses travaux de recherche. «L’enseignement nourrit la recherche, et j’espère communiquer cette passion à mes étudiants et étudiantes», confie-t-il. Pour lui, la plus belle récompense serait de voir une étudiante ou un étudiant inspiré par ses cours se joindre à l’équipe de son laboratoire, prêt à contribuer à la recherche et à mener ses propres projets innovants.