Fraude-alerte.ca: l’entraide pour lutter contre la cyberfraude

Crédit : Getty

En 5 secondes

La Clinique de cyber-criminologie a créé Fraude-alerte.ca pour favoriser l’entraide dans la lutte contre la cyberfraude.

La première plateforme communautaire de signalement de cas de cyberfraude au Québec et au Canada, Fraude-alerte.ca, a été créée par la Clinique de cyber-criminologie de l’Université de Montréal pour amener les gens à s’entraider dans la lutte contre ce fléau. Déjà, la population répond présente.

«Nous avons plus de 5000 nouvelles personnes qui viennent chaque mois visiter le site depuis que nous avons commencé à le tester en avril dernier pour nous assurer que tout fonctionne bien et que nous sommes capables d’absorber le trafic», indique Benoît Dupont, professeur à l’École de criminologie de l’UdeM et cofondateur de la Clinique de cyber-criminologie.

Et le tout sans publicité. «La plateforme est bien indexée dans les moteurs de recherche, donc les gens nous trouvent en cherchant de l’information sur le Web en lien avec la cyberfraude, souvent après en avoir été victimes», explique le professeur, qui est aussi titulaire de la Chaire de recherche en prévention de la cybercriminalité.

Un nombre élevé de victimes

L’idée de lancer cette plateforme gratuite s’est imposée d’elle-même après la création de la Clinique de cyber-criminologie, en décembre dernier. «Nous voulions apporter un soutien personnalisé aux personnes victimes de cyberfraude, mais nous nous sommes rendu compte que leur nombre était tellement élevé que nous n’arriverions jamais à répondre à toutes les demandes, raconte Benoît Dupont. Nous avons donc décidé de mettre sur pied une plateforme où les gens peuvent s’entraider.»

Les étudiantes et les étudiants en criminologie qui sont formés notamment à aider les victimes de cyberfraude animent la communauté et interviennent dans certains cas. Les informations fournies sur la plateforme par les utilisateurs sont par ailleurs toujours vérifiées par des analystes de la Clinique de cyber-criminologie.

Il y est question de toutes sortes de fraudes: l’hameçonnage par courriel ou par message texte, les appels, les fraudes amoureuses et celles avec la cryptomonnaie sur Internet, etc. «Il y a de petites fraudes et d’autres beaucoup plus importantes qui peuvent toucher 100 ou même 1000 personnes, remarque Benoît Dupont. Ce qu’on voit aussi, c’est que les fraudeurs bougent rapidement. Ils adaptent leurs stratagèmes.»

Obtenir du soutien

Les gens peuvent utiliser la plateforme de manière anonyme ou se créer un compte, ce qui leur permet d’être avertis par courriel si quelqu’un écrit un commentaire sur leur cas.

«Les victimes de fraude qui viennent sur la plateforme voient d’autres personnes qui ont vécu le même genre de situation et elles se sentent moins seules, observe le professeur. Elles se font dire par exemple de ne pas avoir honte, de ne pas rester isolées, d’en parler à leurs proches. Elles y trouvent du soutien et, ensuite, elles réalisent que leur expérience peut aider d’autres gens. Ainsi, ces personnes ne restent pas cantonnées dans leur statut de victimes.»

De plus, l’algorithme de la plateforme est en mesure de déterminer de quel type de fraude la personne qui partage son expérience a été victime et il lui suggère de la documentation pertinente à consulter. «Ainsi, nous pouvons lui donner une liste des gestes à poser et des organisations à contacter à la suite d’un incident, mentionne M. Dupont. Nous pouvons aussi lui prodiguer des conseils pour qu’elle se protège mieux à l’avenir.»

Pour les cas plus complexes qui nécessitent davantage que le soutien des pairs et l’envoi de documents, les victimes la possibilité de contacter directement les analystes de la Clinique pour soutien personnalisé.

La plateforme travaille permet aux services policiers de rester informé des fraudes qui ne leur sont pas signalées. «Nous ne voulons pas marcher sur leurs platebandes et, au besoin, nous recommandons à des victimes d'aller porter plainte à la police», ajoute le professeur.

Une plateforme encore en évolution

Maintenant que des efforts sont déployés pour faire connaître la plateforme auprès du public, Benoît Dupont s’attend à voir une grande hausse des visites. «Nous estimons qu’il y a un peu plus d’un million de victimes de cyberfraude au Québec chaque année, alors nous pourrions avoir plusieurs dizaines de milliers ou même quelques centaines de milliers de visites annuellement», précise-t-il.

Comme la cyberfraude peut toucher des gens qui ont des niveaux de connaissance variés en informatique, le contenu est élaboré pour être facilement compris par tous. «C’est très important et il faut considérer aussi qu’être victime d’une cyberfraude est quelque chose de très stressant et que cela peut perturber temporairement les capacités cognitives des gens, explique le professeur. Nos contenus sont donc très clairs et accessibles.»

Actuellement, la plateforme est uniquement offerte en français. «Mais nous réfléchissons à la question de l'accessibilité des contenus dans d’autres langues, car certaines communautés sont frappées de manière disproportionnée par certaines formes de fraude», poursuit Benoît Dupont.

Sur le même sujet

sécurité criminologie informatique