Détresse et COVID-19: le personnel hospitalier s’adapte bien malgré tout
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Au front contre le coronavirus Article 8 / 8
Dans un hôpital ou un CHSLD, le stress ressenti par les membres du personnel soignant prend plusieurs visages: anxiété, insomnie, dépression ou encore détresse psychologique. Pour les aider à veiller à leur bien-être, le Dr Nicolas Bergeron, psychiatre et chercheur au Centre de recherche du CHUM (CRCHUM), et Steve Geoffrion, chercheur au Centre de recherche de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal et professeur à l’Université de Montréal, ont lancé en mai dernier une application mobile d’autosurveillance des réactions de stress.
Présentée aujourd’hui dans une conférence du CHUM sur la prévention du suicide, l’analyse récente des données dénominalisées recueillies entre mai et septembre 2020 conduit à un constat optimiste: «La majorité des personnes suivies ont bien récupéré des expériences stressantes qu’elles ont pu vivre. Pour près de 85 % d’entre elles, la détresse ressentie était transitoire. Dans le contexte particulier de la COVID-19, notre étude est l’une des premières dans le monde à brosser le tableau longitudinal de la santé mentale du personnel de la santé», indique le Dr Bergeron, aussi professeur à l’Université de Montréal.
Prévenir la détresse chronique
Dans le cadre de ce projet de recherche, les scientifiques ont recruté 373 participants parmi les employés du CHUM et des centres intégrés universitaires de santé et de services sociaux (CIUSSS) de l’Est-de-l’Île-de-Montréal et de la Capitale-Nationale (médecins, infirmières, préposés aux bénéficiaires et autres). Chaque semaine, ces personnes ont répondu à une série de questions portant, entre autres, sur leur santé psychologique, sur leur exposition au stress et à des situations critiques ainsi que sur le soutien qu’elles ont reçu.
Les deux chercheurs s’entendent pour dire que cette étude ouvre de nouvelles perspectives: comment les équipes pourraient-elles mieux accompagner les personnes en détresse? Devrait-on adapter les stratégies d’accompagnement offertes à l’interne: séances de groupe, séances individuelles, soutien par les pairs, premiers soins psychologiques? D’autres recherches seront nécessaires pour répondre à ces questions.
Pour Steve Geoffrion, «il demeure essentiel de se concentrer sur les travailleurs de la santé qui n’ont pas montré une telle résilience et qui ont vécu de la détresse psychologique pendant cette première vague. Il est aussi capital d’intervenir de façon préventive en santé mentale dans nos établissements pour éviter que la détresse devienne chronique».
De l’aide disponible
Diverses initiatives sont déjà en cours:
· Cinq autres CIUSSS et centres intégrés de santé et de services sociaux ont adopté l’application mobile dans le cadre de la seconde vague.
· Au CHUM, le service de psychologie a mis en place le programme Adapte-COVID pour soutenir les employés durant la pandémie. Les psychologues du CHUM sont ainsi disponibles pour écouter et aider ceux et celles qui en ressentent le besoin.
· Le CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal a mis sur pied le Programme de premiers soins psychologiques et la ligne de soutien psychosociale. Également, le programme d’aide aux employés offre désormais des services aux membres des familles du personnel.
· Finalement, tous les employés sont invités par le chercheur Steve Geoffrion à participer au Défi 100 jours et ainsi à prendre soin d’eux durant quelques minutes par jour et à mesurer comment ils vont dans plusieurs sphères de leur vie.