L’éthique vivante: une nouvelle avenue de l’éthique en santé

L’éthique vivante en santé ne peut se concevoir autrement que dans la participation du plus grand nombre.

L’éthique vivante en santé ne peut se concevoir autrement que dans la participation du plus grand nombre.

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L’équipe du Dr Éric Racine vient de publier un article scientifique posant les fondements d’une vision novatrice de l’éthique en santé: l’éthique vivante.

Eric Racine, Carolyne Favron et Bénédicte D'Anjou

Éric Racine, Carolyne Favron et Bénédicte D'Anjou

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Sous la forme d’un article scientifique publié à la fin janvier dans la revue Medicine, Health Care and Philosophy, l’équipe du Dr Éric Racine, directeur de l’Unité de recherche en éthique pragmatique de la santé à l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM) et professeur à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal, propose pour la première fois une définition formelle de l’éthique vivante et de ses principes fondateurs. Dans une démarche de collaboration créative, cette publication aborde les cadres théoriques, méthodologiques et pratiques qui régissent l’éthique vivante ainsi que les facteurs qui peuvent entraver sa mise en œuvre.

Nommée «éthique vivante», cette approche offre une perspective nouvelle sur l’éthique en mettant de l’avant l’importance du dialogue, de l’autonomisation (empowerment), du coapprentissage, de la cocréation en vue d’établir des orientations en matière de soins de santé et de services sociaux qui visent l’épanouissement et le développement humains. 

Par exemple, sur le plan de la prise en charge médicale, l’éthique vivante situe l’expérience des patients et des membres des communautés concernées au cœur de la démarche de soins. Vivante, cette approche suppose un effort constant et naturel de consultation des parties prenantes ainsi que la prise en compte de leur vécu de manière à adapter la prise en charge à leurs besoins. 

«L’éthique vivante en santé ne peut se concevoir autrement que dans la participation du plus grand nombre. Il y a au cœur de cette notion une volonté fondamentale de briser les silos et les tours d’ivoire traditionnelles dans les milieux universitaires et de la santé par le biais d’une culture de l’écoute et de l’innovation sociale. À terme, c’est ce qui nous permettra d’élaborer une éthique en santé qui soit durable et ancrée dans une vision globale de la santé humaine», explique le Dr Racine.

Faire évoluer la pratique médicale et la centrer sur l’humain

Forte de travaux fondateurs dans le domaine de la neuroéthique, l’équipe du Dr Racine, appuyée par plusieurs collaborateurs, a réalisé une avancée majeure en imaginant une forme d’éthique accessible, participative, adaptative et orientée vers le bien-être humain. Celle-ci ramène au premier plan les aspects qui, bien qu’essentiels au rétablissement de la santé, restent peu considérés dans la pratique médicale. La prise en charge psychologique des maladies chroniques en est un excellent exemple.

«L’éthique vivante nous invite à humaniser la pratique médicale en la décloisonnant», confie le Dr Racine.

Ce concept, l’équipe a voulu l’expérimenter avec la mise en place, en 2022, d’un premier laboratoire d’éthique vivante (É-LABO) qui, en collaboration avec la clinique de l’IRCM et l’Université de Montréal, se penche, entre autres, sur la question de la détresse psychologique de personnes vivant avec une maladie chronique, rare ou complexe. 

«L’expérience du laboratoire d’éthique vivante nous a permis de collaborer étroitement avec des patients. En leur offrant un espace pour parler de la détresse psychologique qu’ils peuvent vivre en raison de leur état de santé et en cherchant à mieux comprendre les multiples facettes de leur détresse, nous avons pu mettre en lumière des aspects méconnus de l’expérience de ces personnes», observe Bénédicte D’Anjou, coordonnatrice de recherche à l’Unité de recherche en éthique pragmatique de la santé.

L’éthique vivante au-delà des frontières

Bien au-delà des projets menés à l’IRCM, le Dr Racine et son équipe ont pris le leadership dans le développement de l’éthique vivante en santé tant au Québec qu’à l’étranger. 

Ainsi, en plus du projet sur la détresse psychologique, l’Unité de recherche en éthique pragmatique de la santé travaille à diverses autres initiatives d’éthique vivante, dont une expérience de laboratoire vivant à l’unité des soins intensifs de l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont, un projet sur les processus de délibération éthique dans les hôpitaux canadiens et un laboratoire d’éthique vivante en réadaptation (LEViER), conçu à l’Institut universitaire sur la réadaptation en déficience physique de Montréal.

À propos de cette étude

L’article «Living ethics: A stance and its implications in health ethics», par Éric Racine et ses collaborateurs, a été publié le 24 janvier 2024 dans Medicine, Health Care and Philosophy.

L’étude a été financée grâce à une bourse de chercheur-boursier de mérite du Fonds de recherche du Québec – Santé et une subvention Connexion du Conseil de recherches en sciences humaines.

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