Diplomation et réussite scolaire chez les jeunes immigrants: au-delà des idées reçues
- UdeMNouvelles
Le 12 février 2025
- Catherine Couturier
Un rapport chapeauté par la professeure Isabelle Archambault fait le point sur les taux de diplomation et le rendement aux épreuves uniques des élèves immigrants québécois.
Malgré les défis de l’immigration et de l’apprentissage de la langue, comment va la persévérance scolaire chez les élèves issus de l’immigration? Plutôt bien, si l’on se fie au rapport Taux de diplomation et rendement aux épreuves uniques des élèves issus de l’immigration au secondaire, déposé au ministère de l’Éducation en octobre dernier.
Dirigée par Isabelle Archambault, professeure à l’École de psychoéducation de l’Université de Montréal, l’équipe de scientifiques a ainsi analysé les données sur sept ans du ministère de l’Éducation relatives à 242 800 élèves québécois, soit tous les élèves appartenant à l’une des cohortes entrées au secondaire en 2012, 2013 et 2014. Notons que les données du ministère divisent les élèves issus de l’immigration en deux groupes: les élèves de première génération, nés à l’extérieur du Canada, et ceux de deuxième génération, dont au moins un des deux parents a immigré. Les élèves de troisième génération et plus sont quant à eux ceux dont les deux parents sont nés au Canada depuis une ou plusieurs générations.
La chercheuse explique pourquoi les analyses concernent des données recueillies sur sept ans: «Pour les élèves immigrants, l'examen de la diplomation après cinq ans est généralement biaisé, notamment parce que certains élèves allophones doivent passer par les services de soutien à l’apprentissage du français, ce qui peut ralentir un peu leur parcours.»
Une mise à jour nécessaire
Le dernier exercice similaire remontant à près de 15 ans, il était temps de procéder à une mise à jour. «Plusieurs choses ont changé», peut-on lire dans le rapport; les écoles de partout au Québec accueillent en effet des élèves aux profils de plus en plus diversifiés.
C’est la professeure émérite de l’UdeM Marie Mc Andrew qui avait mené l’une des premières études au Québec sur la réussite, le parcours scolaire et la diplomation chez les élèves issus de l’immigration, publiée en 2011. «Plusieurs acteurs, tant du milieu de la recherche que des écoles, souhaitaient que ces données soient mises à jour», rapporte Isabelle Archambault.
«Ils s’en sortent très bien»
Premier constat: «Les élèves issus de l’immigration s’en sortent très bien, autant sur le plan de la réussite que sur celui de la diplomation et des résultats aux épreuves uniques», résume Isabelle Archambault. Même s’il reste difficile d’établir des comparaisons, puisque la façon de calculer les indicateurs a changé depuis 2011, les taux de diplomation chez les élèves issus de l’immigration de première et de deuxième génération se sont davantage améliorés au fil des années que chez les autres élèves.
Malgré ces taux de réussite et de diplomation élevés, surtout chez les élèves de deuxième génération, les chercheuses ont constaté que ces derniers étaient deux fois moins souvent inscrits dans les programmes de type enrichis. «Nos données ne sont que descriptives, on n’explique pas quoi que ce soit. Mais on peut quand même se demander pourquoi ces élèves sont sous-représentés», soulève Isabelle Archambault.
Parmi les autres constatations, il y a le fait que les élèves fréquentant certains milieux, par exemple une école de milieu défavorisé ou une école publique (plutôt qu’une école privée), présentent de plus faibles taux de diplomation. «Par contre, il est intéressant de noter que les écarts de diplomation observés en fonction des caractéristiques des écoles sont moins élevés chez les élèves de première ou de deuxième génération par rapport aux autres élèves», observe-t-elle.
Du point de vue des résultats aux épreuves uniques, les élèves de première génération ont des résultats en langue plus faible que ceux des élèves de deuxième et de troisième génération. Mais cela ne les empêche pas d’avoir de meilleurs résultats dans les épreuves de mathématiques, de sciences et d’histoire.
Un deuxième volet à venir
Si ce rapport se veut descriptif, un deuxième volet creusera davantage les données. «Nous voulons voir si certains facteurs propres au milieu fréquenté par les élèves – école publique ou privée, milieu francophone ou anglophone, etc. – ou propres aux élèves – langue d’usage, programmes suivis – sont associés à la diplomation et à la réussite», dit Isabelle Archambault.
La chercheuse aimerait également se pencher sur l’un des résultats de ce rapport, soit le fait que le taux de diplomation serait plus faible chez les élèves ayant fréquenté les classes d’accueil par rapport à ceux ayant bénéficié d’autres mesures de soutien à l’apprentissage du français. Mais elle demeure très prudente: «On ne doit absolument pas tirer de conclusions hâtives. Ces résultats cachent certainement autre chose.» Ces chiffres pourraient simplement refléter des particularités régionales (chaque centre de services scolaire choisit son modèle de services pour l’apprentissage du français par exemple).
Même si le premier volet ne répond pas à toutes les questions, ces données restent pertinentes, «ne serait-ce que pour dresser un constat. Elles témoignent qu’en général les élèves issus de l’immigration réussissent bien et ont des taux de diplomation élevés. C’est un message très positif et encourageant», souligne Isabelle Archambault.
À propos de cette étude
Le rapport Taux de diplomation et rendement aux épreuves uniques des élèves issus de l’immigration au secondaire, par Isabelle Archambault et ses collègues, a été déposé au ministère de l’Éducation du Québec en octobre dernier.