Manipuler le très petit à grande échelle
- UdeMNouvelles
Le 26 mars 2025
- Myreille Larouche
L'équipe de Delphine Bouilly a conçu une technique automatisée pour transférer le graphène à grande échelle, facilitant ainsi la production de puces électroniques pour le diagnostic moléculaire.
L’équipe de Delphine Bouilly, professeure au Département de physique de l’Université de Montréal et directrice de l’Unité de recherche en conception et application de nanobiocapteurs électroniques de l’Institut de recherche en immunologie et en cancérologie, a mis au point une technique originale pour manipuler et déplacer le graphène, un matériau d’un atome d’épaisseur qui entre dans l’assemblage de puces électroniques, pour des applications en diagnostic moléculaire. Les résultats de l’étude, menée par l’étudiante de doctorat Amira Bencherif, ont été publiés dans le journal npj 2D Materials and Applications.
L’efficacité dans la simplicité
Le graphène est un nanomatériau bidimensionnel (2D): il est composé d’une seule couche d’atomes de carbone. Ses propriétés physiques et électroniques le rendent très intéressant pour la fabrication de différents dispositifs technologiques comme des biocapteurs. Il est possible de le synthétiser rapidement et en grandes quantités sur une surface de cuivre, mais il faut ensuite transférer les rubans de graphène de la surface métallique à des disques de production (appelés gaufres) pour permettre l’assemblage simultané de plusieurs puces. Cette étape de transfert est critique et représente un défi majeur pour la production à grande échelle de dispositifs à base de nanomatériaux 2D comme le graphène.
C’est pour combler ce besoin que l’équipe de Delphine Bouilly a conçu une technique originale et inédite de transfert du graphène. L’appareil de transfert créé consiste en un réseau de chambres de verre dans lesquelles des feuilles de cuivre recouvertes de graphène sont placées. Par un système de pompage, les chambres sont remplies, puis vidées, de différentes solutions qui permettent de dissocier le graphène du cuivre et de le transférer sur une gaufre de production préalablement alignée avec les chambres. Le tout se fait ainsi de façon automatisée, sans aucune manipulation, un peu comme une chaîne de montage miniature.
De nouvelles possibilités de fabrication
La technique élaborée présente plusieurs avantages importants. Elle permet d’automatiser une méthode manuelle qui demandait beaucoup de dextérité, ce qui accélère et facilite l’exécution. L’appareil permet également de transférer plusieurs rubans de graphène en parallèle, un aspect clé pour améliorer la vitesse et le volume de transfert. Par ailleurs, le système rend possible l’assemblage vertical de multiples couches de graphène. Enfin, le transfert automatisé en parallèle permet une économie dans l’usage du graphène en limitant les pertes.
L’appareil mis au point par le laboratoire de la professeure Bouilly facilitera la fabrication de dispositifs à base de graphène et d’autres matériaux 2D. Il permettra du même coup d’en augmenter le volume de production. L’utilisation de ces dispositifs comme biocapteurs est en développement dans les laboratoires, notamment aux fins de diagnostic de cancers et d’autres maladies.
À propos de cette étude
L’article «Automated and parallel transfer of arrays of oriented graphene ribbons», par Delphine Bouilly et ses collègues, a été publié dans le journal npj 2D Materials and Applications le 11 août 2024.