Un livre fait le point sur la cybercriminalité

  • Forum
  • Le 8 avril 2021

  • Mathieu-Robert Sauvé

En 5 secondes

Professeur à l’École de criminologie de l’Université de Montréal, Francis Fortin présente un ouvrage collectif sur la cybercriminalité.

Au terme d’une carrière d’analyste et d’enquêteur à la Sûreté du Québec et au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, Francis Fortin a fait une maîtrise et un doctorat qui l’ont conduit à un poste de professeur à l’École de criminologie de l’Université de Montréal en 2014. Son expérience professionnelle et ses recherches l’ont amené à se spécialiser dans le secteur des crimes technologiques. «Internet fait partie de nos vies et les criminels occupent cet espace comme ils occupent depuis toujours l’espace public», commente celui qui a réuni une équipe internationale pour faire le point sur la cybercriminalité dans Cybercrimes et enjeux technologiques, paru aux Presses internationales Polytechnique. Il répond à nos questions.

Quel est l’objectif de ce livre?

Il existe très peu d’ouvrages en français sur ces questions. Dès qu’un fait divers lié à la cybercriminalité fait les manchettes, les médias laissent entendre que la criminalité en ligne augmente, qu’elle va dominer dans l’avenir. Or, Internet n’est plus le far west qu’on a souvent décrit. Plusieurs gouvernements ont voté des lois qui encadrent les activités sur le Web et permettent des interventions policières sur une base quotidienne. Les auteurs que nous avons réunis pour ce livre sont tous des experts de leur domaine et ils nous présentent les méthodes mises en place un peu partout en Occident pour intervenir dans le cyberespace.

Faut-il revoir les lois pour intégrer les crimes perpétrés sur le Web?

Je ne crois pas. Les lois, au Canada en tout cas, sont parfois même exemplaires par exemple en matière d’encadrement de la pornographie juvénile. Mais il existe, il faut bien l’admettre, des obstacles à leur application. Je crois que c’est plutôt à ce chapitre qu’il faut mettre de l’énergie plutôt que dans une réforme du droit.

De quoi devrions-nous le plus nous méfier?

Des rançongiciels, ces technologies pernicieuses qui s'emparent de vos données à votre insu parce que vous avez appuyé sur la mauvaise touche… Pour les récupérer, vous devez envoyer quelques centaines de dollars sous forme de bitcoins. Au début, ce genre de chantage était relativement rare et les rançons étaient exorbitantes. Résultat: les victimes refusaient de payer et prévenaient la police. Aujourd’hui, ce crime est beaucoup plus répandu et les rançonneurs beaucoup moins gourmands. En conséquence, les personnes paient pour récupérer leurs données et n’ébruitent pas leur mésaventure. Les criminels font ainsi de bonnes affaires. Pour empêcher ces malversations, pas besoin de récrire la loi: faites des copies de vos fichiers!

Il ne faut pas être naïf pour autant. Il est vrai que la loi, dans ce domaine comme dans d’autres, est toujours un peu en retard sur la réalité. C’est un peu comme le jeu du chat et de la souris. Ainsi, dans le dark Web ou Web clandestin, on observe plusieurs phénomènes criminels et ce n’est certainement pas facile d’y faire régner la justice.

À qui se destine votre livre?

Aux étudiantes et étudiants inscrits dans les programmes de formation en enquête et sécurité, bien sûr, mais aussi aux divers intervenants du monde de la justice. Je pense aux policiers, procureurs, juges, agents de probation, etc. Les chercheurs universitaires y trouveront aussi matière à réflexion.

Source

Francis Fortin (dir.), Cybercrimes et enjeux technologiques, Montréal, Presses internationales Polytechnique, 2020, 336 p., 64,99 $.

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