La colle la plus puissante de la nature maintenant efficace en milieu humide ET salé
- UdeMNouvelles
Le 26 octobre 2021
- Béatrice St-Cyr-Leroux
Le professeur et chercheur Yves Brun et son équipe ont expliqué le mécanisme permettant au plus puissant bioadhésif de coller à des surfaces mouillées et salées.
Yves Brun, microbiologiste de renom et professeur titulaire au Département de microbiologie, infectiologie et immunologie de l’Université de Montréal, l’a découverte il y a plusieurs années. La bactérie non pathogène Caulobacter crescentus produit naturellement une colle extrêmement puissante afin d’adhérer aux surfaces humides qui caractérisent ses environnements favoris que sont les canalisations et l’eau douce.
Cet adhésif naturel et inoffensif, appelé holdfast, fonctionne ainsi excessivement bien sur les surfaces mouillées, ce qui est plutôt rare pour les colles en général. Mais dans des environnements aqueux où le niveau de salinité est élevé, comme la mer, mais aussi en présence de tissus humains, il perd alors toutes ses propriétés adhérentes.
Yves Brun et son équipe souhaitaient renverser la vapeur et ils ont trouvé la solution, parue récemment dans iScience.
Polyvalente et verte
Les chercheurs ont compris comment améliorer l’adhésion du holdfast dans des environnements à forte salinité en se penchant d’abord sur une parente marine de Caulobacter crescentus, soit Hirschia baltica. En comparant les deux cousines, ils ont constaté qu’elles possédaient les mêmes gènes pour synthétiser le holdfast, donc qu’elles utilisaient le même type de colle. Ils ont aussi vu que le holdfast de Hirschia baltica était très performant en milieu salin, qui constitue son environnement naturel.
«En manipulant le niveau d’expression d’un gène particulier dont la fonction est de modifier légèrement la composition et la charge du holdfast, nous avons vu que les propriétés de celui-ci changeaient chez les deux cousines bactériennes, permettant ainsi d’améliorer la performance de la colle dans un milieu salin», précise le chercheur postdoctoral et auteur principal de l’étude Nelson Chepkwony.
Aux yeux d’Yves Brun, cette étude marque un pas important vers la mise au point d’adhésifs «verts» pouvant servir dans des contextes où il y a présence d’eau salée (comme dans l’industrie navale ou en plomberie), mais aussi dans les milieux hospitaliers, à titre d’adhésifs chirurgicaux.
«Le holdfast est une colle entièrement organique, alors que les colles industrielles sont majoritairement des dérivés du pétrole qui produisent donc des déchets toxiques, affirme-t-il. De plus, rappelons que cette colle provient d’une bactérie non pathogène qui peut être facilement reproduite en très grande quantité. L’impact environnemental de sa production est donc moindre. Et avec ce que nous venons de trouver, nous savons maintenant que nous pouvons changer les propriétés de la colle pour l’adapter à l’application désirée. Nous pensons aussi que l’étude de la diversité des bactéries apparentées à Caulobacter crescentus dans des environnements variés pourrait nous permettre de découvrir d’autres colles avec des propriétés utiles.»