Nicole Petiquay, gardienne de la langue atikamekw

De gauche à droite: Constant Awashish, Grand Chef de la Nation Atikamekw, Nicole Petiquay, lauréate du Prix de la valorisation des langues autochtones 2022 et Daniel Jutras, recteur de l'Université de Montréal.

De gauche à droite: Constant Awashish, Grand Chef de la Nation Atikamekw, Nicole Petiquay, lauréate du Prix de la valorisation des langues autochtones 2022 et Daniel Jutras, recteur de l'Université de Montréal.

Crédit : Amélie Philibert / Université de Montréal

En 5 secondes

Nicole Petiquay a reçu le Prix de la valorisation des langues autochtones pour son important travail en vue de partager et de valoriser la langue atikamekw.

«Je ne m’attendais pas du tout à ça, ça fait chaud au cœur. Mais quand je regarde tout le travail que j’ai réalisé dans les dernières années, je me dis que j’ai apporté ma contribution!» dit avec le sourire en coin Nicole Petiquay, lauréate 2022 du Prix de la valorisation des langues autochtones de l’Université de Montréal. Ce prix vise à reconnaître le travail des personnes autochtones engagées dans la préservation et la transmission de leurs langues. Instauré en 2020 par le comité Kwe Kwe, en partenariat avec la secrétaire générale associée à l’équité, à la diversité et à l’inclusion et aux relations avec les Premiers Peuples, le Prix s’insère dans les efforts déployés autour de la Décennie internationale des langues autochtones (2022-2032) pour souligner les cultures autochtones.

La coordonnatrice des services linguistiques atikamekw au Conseil de la Nation Atikamekw a reçu son prix ce 22 juin, au lendemain de la Journée nationale des peuples autochtones. La cérémonie était animée par Louis-Philippe Boivin-Grenon, diplômé de la Faculté de droit, et diffusée en direct en ligne.

Gardienne de la langue atikamekw

Originaire de Wemotaci, Nicole Petiquay a enseigné durant 19 ans l’atikamekw au primaire. «Quand j’ai commencé, je ne savais ni lire ni écrire l’atikamekw», raconte-t-elle. Marthe Coocoo, qui a beaucoup travaillé à la préservation de la langue, l’enseignait alors «et je la remercie, c’est là où j’ai eu le goût d’apprendre», ajoute la lauréate. Depuis, elle a continué de s’imprégner des savoirs sur la langue et de parler aux aînés. Elle a également fait un certificat à l’Université Laval pour devenir technolinguiste.

Depuis 2008, elle coordonne au Conseil de la Nation Atikamekw une équipe qui offre des activités relatives à la langue dans les trois communautés atikamekw (Wemotaci, Manawan et Opitciwan). Dans les dernières années, Nicole Petiquay a entre autres travaillé sur le dictionnaire en ligne atikamekw, un projet de longue haleine réalisé avec plusieurs partenaires. «C’est un outil de plus pour nos jeunes, mais c’est aussi un repère pour tout le monde», remarque-t-elle. Même si l’atikamekw se porte plutôt bien (la langue est parlée par 90 % des membres des trois communautés), Mme Petiquay note toute de même une certaine fragilité. «Je l’entends quand les jeunes la parlent, ils utilisent beaucoup de mots en français, et moi-même je le fais», constate-t-elle.

Elle a par ailleurs collaboré à des recherches sur la langue atikamekw menées par la chercheuse Marie-Odile Junker, de l’Université Carleton, notamment pour concevoir et distribuer un vaste sondage sur les compétences et attitudes vis-à-vis de la langue maternelle. «Il n’y a pas beaucoup d’écrits sur la langue atikamekw. Mon but, c’est de faire connaître cette langue», explique Nicole Petiguay, qui était aussi responsable de la diffusion des résultats du sondage auprès des communautés atikamekw.

Passeuse de savoir

Chargée de cours au Département des sciences de l’éducation de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), Nicole Petiquay a formé le personnel enseignant et les éducatrices des trois communautés. Elle a donné les cours 1 et 2 sur les fondements pour l’enseignement de la langue algonquienne dans le microprogramme en langue atikamekw instauré par l’UQTR pour former les enseignants et enseignantes atikamekw. «Ça a été une réussite, même les directions d’école étaient emballées», estime-t-elle. Une autre cohorte est prévue cet automne ou l’hiver prochain.

«Il faut conserver et sauvegarder la langue. C’est ce qui me nourrit dans mon travail», souligne celle qui souhaiterait donner encore plus de cours de langue atikamekw. Voir les jeunes enfants utiliser l’atikamekw (grâce notamment au programme d’enseignement bilingue au primaire) l’encourage toutefois. Depuis 1992, la communauté de Wemotaci offre en effet la maternelle entièrement en atikamekw, puis introduit le français progressivement jusqu’à la sixième année, où 90 % de l’enseignement est fait en français et 10 % en atikamekw. À Manawan, on propose les deux programmes aux parents (français ou bilingue), tandis que l’enseignement se déroule en français à Opitciwan.

Entourée de son équipe, Nicole Petiquay espère continuer de partager son amour pour sa langue maternelle. «Je dis tout le temps à la blague que mon objectif, c’est que toute la planète parle atikamekw. Ça me nourrit!» conclut-elle.

  • Crédit : Amélie Philibert
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