Des jardins des Premiers Peuples à l’Université de Montréal

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Dans une perspective de décolonisation, des aires extérieures vouées à la sensibilisation aux cultures autochtones et à la valorisation identitaire sont en cours d’aménagement à l’UdeM.

Afin d’offrir des emplacements extérieurs voués à la reconnaissance et au partage des savoirs autochtones, l’Université de Montréal aménage plusieurs jardins des Premiers Peuples sur ses campus. Ces jardins permettront également la découverte de plantes médicinales utilisées traditionnellement par les Autochtones et l’enseignement en dehors des salles de classe.

Un financement de près de 300 000 $ a été alloué à la Faculté de l’éducation permanente (FEP) et à la Faculté de médecine de l'UdeM par le ministère de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie pour la création de ces jardins, l’organisation d’ateliers de sensibilisation, de sécurisation et de valorisation culturelles autochtones et la réalisation d’une œuvre collective autochtone.

Un projet de cocréation

Ce projet est réalisé en collaboration avec de nombreuses unités et facultés de l’Université de Montréal, soit l’Unité du développement durable, la Direction des immeubles, la FEP et les facultés de médecine, de l’aménagement et des arts et des sciences.

De nombreuses organisations se sont jointes au projet: le Jardin botanique de Montréal, les centres intégrés universitaires de santé et de services sociaux de l’Ouest-de-l'Île-de-Montréal et de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec, le CHUM et les Centres de la jeunesse et de la famille Batshaw.

Et surtout ce projet a été cocréé avec de multiples porteurs de savoirs autochtones comme Michel Durand Nolett. Le Centre d’amitié autochtone du Lac-Saint-Jean et le Réseau québécois de mentorat autochtone ont par exemple été consultés.

«Ce projet interdisciplinaire et intersectoriel permet le partage des expertises et des savoirs entre les différentes parties engagées. Il s’agit d’une cogestion circulaire comme le proposent les porteurs de savoirs autochtones du projet. Nous avons travaillé ensemble selon l’approche du double regard, où nous entremêlons science occidentale et mode de connaissance autochtone», explique Chantal Levesque, responsable de programme à la FEP et instigatrice du projet.

Aménagement de plusieurs jardins des Premiers Peuples

Différents lieux extérieurs pour se recueillir et se reconnecter avec la nature sont en cours d’aménagement sur le campus de la montagne.

Dès 2014, sous l’impulsion d’Alexandre Beaudoin, conseiller à la biodiversité de l’UdeM, une forêt nourricière a vu le jour près des résidences. Des espèces indigènes ont ainsi été plantées par le groupe d’agriculture urbaine de l’UdeM P.A.U.S.E. (Production agricole urbaine soutenable et écologique). Cet espace vert va devenir un jardin des Premiers Peuples.  

Trois autres jardins verront aussi le jour: près de la halte-garderie Le Baluchon, près de l’avenue Decelles et sur le campus de l’UdeM en Mauricie. Ce sera alors la possibilité de «se servir de ces jardins comme des terrains d’enseignement vivants sur le territoire», déclare Chantal Levesque.

Le CHUM et d’autres établissements de santé sont en train de créer à leur tour des jardins avec des plantes médicinales en collaboration avec l’Université et des partenaires autochtones.

Un jardin consacré aux femmes autochtones

Un des jardins prévus sera consacré aux femmes autochtones. Les travaux d’aménagement ont été amorcés juste avant l’arrivée de l’hiver à l’angle de l’avenue Decelles et du chemin de la Tour. Les premières étapes du projet sont moins visibles, puisqu’il s’agit de plantations au sol. «Plus de 250 plantes ont été mises en terre à la fin de l’été et pour le moment nous avons un très bon taux d’implantation et de survie», indique Alexandre Beaudoin.

Différentes plantes médicinales orneront le jardin selon trois couleurs dominantes: le mauve, à la mémoire de Joyce Echaquan; l’orange, en souvenir des enfants des pensionnats; et le rouge, pour se remémorer les femmes et les filles autochtones disparues.

«Nous allons pouvoir récolter ces plantes et faire des ateliers de transformation avec les porteurs de savoirs autochtones, mentionne Pierre Haddad, professeur à la Faculté de médecine. Nous pourrons établir des ponts entre la science autochtone et la science moderne et essayer de traduire les savoirs traditionnels en savoirs scientifiques. Nous ne parlons pas du tout de validation, car l’usage de ces plantes est validé par des milliers d’années d’expérience! Nous souhaitons mieux comprendre quelles sont leurs propriétés.»

Des ateliers de sensibilisation et de sécurisation

Des ateliers expérientiels de sensibilisation et de sécurisation ouverts à tous et à toutes animés par des Autochtones ont déjà eu lieu et d’autres vont se poursuivre cet hiver et ce printemps. Dans un atelier, des étudiantes et étudiants de l’École de bibliothéconomie et des sciences de l’information étaient invités à créer un bâton de parole. Un autre atelier portait sur les plantes médicinales.

Ces activités seront suivies d’une série de conférences sur la réalité des femmes autochtones.

Enfin, une œuvre collective autochtone sera installée sur le campus. Toute la communauté universitaire sera invitée à y participer.