Le dépistage de la maladie du «bébé-bulle» chez les nouveau-nés permet de sauver des vies

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Le taux de survie des bébés après une greffe de moelle osseuse pour déficit immunitaire combiné sévère a beaucoup augmenté après le début du dépistage en Amérique du Nord, selon une étude d’envergure.

Elie Haddad

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Pour la première fois, une étude a démontré qu’un dépistage néonatal systématique du déficit immunitaire combiné sévère – ou SCID, pour severe combined immunodeficiency - augmente significativement la survie des enfants après une greffe de moelle osseuse.

En effet, selon les travaux co-dirigés par le Dr Elie Haddad, pédiatre et chercheur au CHU Sainte-Justine et professeur au Département de microbiologie, infectiologie et immunologie de l'Université de Montréal, l'introduction progressive d’un dépistage néonatal du SCID depuis 2008 en Amérique du Nord a fait passer le taux de survie de 73 % entre 1982 et 2009 à 87 % entre 2010 et 2018.

Et ce taux grimpe à 92,5% chez les enfants dont le SCID a été dépisté et traité à la naissance, alors qu’il est nettement moindre chez les enfants diagnostiqués après l’apparition de symptômes. En outre, la proportion de bébés greffés sans jamais avoir contracté d'infection était nettement plus élevée, ce qui a joué un rôle majeur dans l’augmentation de la survie de ces enfants.

Cette étude rétrospective accompagnée d’un éditorial a été publiée le 20 juin dans la revue The Lancet.

Une maladie fatale

Le SCID, aussi appelé la maladie des « bébés-bulles », cause un dysfonctionnement majeur des cellules immunitaires et touche de 40 à 80 enfants annuellement en Amérique du Nord. Ces enfants semblent en parfaite santé à la naissance, mais sont extrêmement sensibles aux infections. La maladie est fatale, généralement au cours de la première année de vie, à moins que l'enfant ne reçoive un traitement tel qu’une greffe de moelle osseuse, une thérapie génique ou une thérapie enzymatique.

«L’amélioration du taux de survie post-greffe est stupéfiant et justifie à lui seul l’implantation d’un test de dépistage chez les nouveau-nés pour le SCID et d’autres maladies potentiellement mortelles du système immunitaire. Cette étude met en lumière l’importance des moyens de prévention et de la collaboration en santé de précision», affirme le Dr Elie Haddad, titulaire de la Chaire BMO en immunologie pédiatrique et Chef du département d'immunologie, de rhumatologie et d'allergie au CHU Sainte-Justine.

Déploiement du dépistage néonatal pour le SCID

Plusieurs études suggéraient que le dépistage néonatal systématique du SCID pouvait améliorer le taux de survie des enfants atteints, mais les données ne permettaient pas de l’affirmer. L’étude menée par le Dr Elie Haddad en collaboration avec de nombreux centres nord-américains montre que la hausse du taux de survie des enfants greffés coïncide avec l’implantation d’un test de dépistage dans les différentes juridictions en Amérique du Nord à partir de 2008.

Notons que depuis 2018, tous les États américains procèdent au dépistage préventif du SCID. Au Canada, sept provinces et territoires ont emboité le pas et, au Québec, les travaux sont en cours.

L'adoption progressive du dépistage néonatal a permis de détecter la maladie plus tôt avant l'apparition des symptômes et de prendre toutes les mesures possibles pour prévenir l'infection et d’amorcer rapidement un traitement. Des recherches antérieures avaient d’ailleurs déjà démontré qu’un âge inférieur à 3,5 mois et l’absence d’infection au moment de la greffe améliorent significativement le taux de survie.

«Étant donné qu’on évite à des enfants de mourir et d’avoir des traitements beaucoup plus lourds avec les séquelles qui s’ensuivent, ces résultats inciteront d’autres pays dans le monde à adopter le dépistage néonatal pour le SCID et d’autres maladies immunitaires potentiellement mortelles que le test permet de détecter», affirme le Dr Haddad.

À propos de l’étude

L’article « Measuring the impact of newborn screening on survival after hematopoietic cell transplant for severe combined immunodeficiency: a 36-year longitudinal study from the Primary Immune Deficiency Treatment Consortium » par Monica S. Thakar et ses collaborateurs a été publié le 21 juin 2023 dans The Lancet.

L’étude a été financée par le National Institute of Allergy and Infectious Diseases (NIAD), le National Institutes of Health (NIH), le National Institute of Neurological Disorders and Stroke, le National Heart, Lung, and Blood Institute, le National Cancer Institute et la Fondation CHU Sainte-Justine.

Elie Haddad, Christopher C. Dvorak and Luigi D. Notarangelo ont codirigé cette étude. Ils font tous trois partie du Primary Immune Deficiency Treatment Consortium (PIDTC), qui a pour objectif d’améliorer la survie et la qualité de vie des patients atteints de maladies rares et innées du système immunitaires et qui menacent le pronostic vital.

À propos du CHU Sainte-Justine

Le Centre hospitalier universitaire (CHU) Sainte-Justine est le plus grand centre mère-enfant du Canada et le 2e plus important centre pédiatrique d'Amérique. Il est membre du grand réseau d'excellence en santé de l'Université de Montréal (RUIS). Il compte 5 457 employés dont 1 532 infirmiers et infirmières auxiliaires et 1 000 professionnels en soins, 520 médecins, dentistes et pharmaciens, 822 résidents et plus de 204 chercheurs, 411 bénévoles, 4 416 stagiaires et étudiants de toutes disciplines. Le CHUSJ comprend 484 lits dont 67 au Centre de réadaptation Marie Enfant (CRME), seul centre dédié exclusivement à la réadaptation pédiatrique au Québec. L'Organisation mondiale de la santé a reconnu le CHU Sainte-Justine « hôpital promoteur de la santé ».

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