Redéfinir les crises de santé mentale

Les résultats de l’enquête d’Emilie Hudson ont mis en évidence le contraste entre les termes répandus dans les milieux de soins et ceux utilisés par les personnes ayant vécu une crise de santé mentale.

Les résultats de l’enquête d’Emilie Hudson ont mis en évidence le contraste entre les termes répandus dans les milieux de soins et ceux utilisés par les personnes ayant vécu une crise de santé mentale.

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Une équipe de recherche en sciences infirmières propose une définition actualisée de la crise de santé mentale qui englobe les facteurs avant, pendant et après sa survenue.

Emilie Hudson

Emilie Hudson

Crédit : Courtoisie

Quand on pense à une crise de santé mentale, on imagine souvent une manifestation intense d’un état d’esprit négatif qui survient de manière imprévisible. En milieu clinique, l’évaluation de ce genre de crise s’appuie surtout sur une perspective biomédicale où l’accent est mis sur le diagnostic, les traitements, la médication et la détresse aigüe.   

Or, Emilie Hudson, étudiante de doctorat sous la direction de Marie-Hélène Goulet, professeure à la Faculté des sciences infirmières de l’Université de Montréal, présente dans un article récent une nouvelle définition de ce type de crise qui sort du cadre essentiellement biomédical. 

«Bien que les définitions existantes semblent reconnaître les aspects contextuels de la crise, les concepts sont souvent réduits à la détresse et aux besoins immédiats de l’individu, sans tenir compte des structures sociales et des éléments structurels qui contribuent à la crise, l’atténuent ou aident à la résoudre», explique la doctorante. 

Basée sur une revue de la littérature, cette actualisation prend ainsi en compte les facteurs précipitants de la crise, ses caractéristiques et ses conséquences. 

Une conceptualisation holistique

Marie-Hélène Goulet

Marie-Hélène Goulet

Crédit : Courtoisie

Emilie Hudson le réitère: «La crise de santé mentale concerne beaucoup plus que le service des urgences où la personne doit se déplacer pour recevoir des soins de courte durée, on doit considérer tous les éléments structurels, sociaux et interpersonnels qui jouent un rôle avant, durant et après la crise.» Et ce sont ces diverses dimensions que son analyse a permis de dégager.  

Plusieurs conditions antérieures à la crise ont été mises au jour, comme les vulnérabilités préexistantes, les problèmes relationnels et les difficultés liées aux activités de la vie quotidienne. Pour ce qui est des caractéristiques de la crise, elles englobent notamment sa temporalité et ses symptômes, le déclin fonctionnel qu'elle entraîne et ses effets sur les proches. Finalement, les conséquences de la crise comprennent la recherche d’aide ainsi que les perspectives d’évolution et les dangers futurs.  

Pour des interventions plus adéquates

Parallèlement, les résultats de l’enquête d’Emilie Hudson ont mis en évidence le contraste entre les termes répandus dans les milieux de soins et ceux utilisés par les personnes ayant vécu une crise de santé mentale. Le premier groupe privilégie largement des expressions cliniques telles que urgence psychiatrique ou urgence en santé mentale, alors que le second préfère des termes plus métaphoriques comme effondrement, cercle vicieux ou sentiment d’être dans le brouillard. 

«Ces conclusions nous invitent à voir la santé mentale comme quelque chose de plus global et nuancé et à considérer la personne dans son ensemble. Et cela reconfigure aussi la manière dont on prodigue des soins. On souhaite que les équipes cliniques, mais aussi le corps policier et les intervenants sur le terrain prennent en considération davantage de dimensions pour agir de façon plus adaptée aux besoins de la personne qui leur fait face», conclut l’infirmière.

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