Dounia Shaaban Kabakibo: la recherche fondamentale au service du très concret

Dounia Shaaban Kabakibo

Dounia Shaaban Kabakibo

Crédit : Courtoisie

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Portrait d’une étudiante de doctorat en physique dont les travaux de recherche préparent le futur des batteries.

Dounia Shaaban Kabakibo tient son amour pour les sciences de son père. C’est lui qui l’a incitée, télescope à la main, à s’intéresser aux étoiles, aux planètes, à la physique. Et surtout, «à aller au fond des choses».

C’est avec lui, sa mère et sa sœur que l’étudiante a quitté la Syrie pour passer deux ans en Arabie saoudite avant de s’installer au Québec, où elle a rapidement appris le français. Son désir de comprendre le monde autour d’elle l’a alors menée à faire un baccalauréat en mathématiques et physique et une maîtrise en physique à l’Université de Montréal.

Aujourd’hui, c’est à l’Institut Courtois et aux côtés de Michel Côté, professeur au Département de physique de l’UdeM, qu’elle entreprend un doctorat dans le domaine de la matière condensée.

Cette science étudie la matière dont les particules sont suffisamment rapprochées pour qu’elles interagissent fortement entre elles en vue de former des solides, des liquides et autres états «exotiques». De ces interactions naissent des comportements uniques qui n’existent pas en présence d’un seul atome ou d'une seule molécule.

Et c’est justement ce qui stimule Dounia Shaaban Kabakibo: la recherche de nouveaux matériaux dotés de propriétés inédites.

Repenser les batteries

Michel Côté

Michel Côté

Crédit : Amélie Philibert, Université de Montréal

La doctorante travaille précisément sur de nouveaux matériaux utilisables dans des batteries dites solides. Actuellement, les électrolytes des batteries – ces substances qui permettent aux ions de circuler – sont surtout composés de liquides ou de gels, ce qui les rend potentiellement inflammables. Or, Dounia Shaaban Kabakibo s’intéresse au potentiel des cristaux.

«Quand on parle de cristal, on parle d’un arrangement d’atomes qui se répète dans l’espace de manière périodique, comme dans le cas du diamant, explique la chercheuse. Ces matériaux solides prolongent le cycle de vie des batteries tout en les rendant plus sécuritaires par la diminution des risques d’incendie. Ils pourraient également offrir une meilleure densité d’énergie, permettant ainsi de concevoir des batteries plus légères.»

Ce type de batteries plus durables et efficaces aurait de nombreuses applications dans un monde de plus en plus alimenté par l’électricité, notamment dans l’industrie automobile. «Nous ne sommes pas encore rendus à produire ces batteries à l’échelle industrielle, les matériaux ne sont pas encore optimaux, mais je suis convaincue que nous allons y arriver», dit-elle.

Un coup de pouce de l’intelligence artificielle

En parallèle à ses travaux à l’Institut Courtois, Dounia Shaaban Kabakibo effectue un stage de recherche à Mila – l’Institut québécois d’intelligence artificielle – sous la direction de Yoshua Bengio, professeur au Département d’informatique et de recherche opérationnelle de l’UdeM.

L’étudiante y fait appel à des modèles d’apprentissage automatique pour tester rapidement des milliers de combinaisons d’atomes afin de déterminer lesquelles seraient susceptibles d'avoir les meilleures propriétés.

«C’est tellement excitant d’être à la frontière entre le monde de l’apprentissage automatique et celui de la physique, s’enthousiasme-t-elle. Je trouve que c’est un peu l’avenir de la recherche scientifique de pouvoir utiliser tous ces outils pour faire avancer nos connaissances.»

Et cette passion pour l’approfondissement des savoirs, la doctorante compte bien la transposer après ses études, sur le marché du travail, que ce soit dans le secteur privé ou celui de la recherche et de l’enseignement.

Faire rayonner la science

Dounia Shaaban Kabakibo a récemment obtenu la première place et le prix du public au premier concours de communication scientifique de Mila grâce à son talent oratoire, sa capacité à vulgariser et sa créativité. La démocratisation de la recherche scientifique occupe une place particulière dans le cœur de la chercheuse.

«Dans une ère de désinformation, je pense que c’est notre rôle en tant que scientifiques d’aller de l’avant et de communiquer les faits aux gens. Aussi, les recherches que nous menons sont souvent subventionnées par des fonds publics, je trouve que c’est important que la société soit informée de ce qui est fait de cet argent-là et des raisons qui motivent notre travail», estime-t-elle.

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