Manque d’oxygène à la naissance: établir plus rapidement les dommages cérébraux

L’un des principaux défis actuels consiste à évaluer rapidement l'étendue des dommages au cerveau afin de prévoir le risque de séquelles ou, au contraire, la possibilité d’une récupération complète.

L’un des principaux défis actuels consiste à évaluer rapidement l'étendue des dommages au cerveau afin de prévoir le risque de séquelles ou, au contraire, la possibilité d’une récupération complète.

Crédit : Getty

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Des bébés placés en hypothermie thérapeutique ont été suivis par électroencéphalograhie et système de neuromonitorage optique pour établir avec précision la gravité des lésions cérébrales.

Mathieu Dehaes et Elana Pinchefsky

Mathieu Dehaes et Elana Pinchefsky

Crédit : Mathieu Dehaes (CHU Sainte-Justine) et Elana Pinchefsky (NeoPeds Academy)

Chaque année, il arrive que des bébés manquent d'oxygène avant ou pendant la naissance, ce qui peut endommager leur cerveau – un problème médical appelé encéphalopathie hypoxique-ischémique. À ce jour, l’hypothermie thérapeutique est la seule approche ayant démontré son efficacité pour limiter les dommages neurologiques engendrés par cette privation d'oxygène. Cependant, même avec ce traitement, le pronostic demeure incertain.

L’un des principaux défis actuels consiste à évaluer rapidement l'étendue des dommages au cerveau afin de prévoir le risque de séquelles ou, au contraire, la possibilité d’une récupération complète. Cette évaluation repose sur un examen d’imagerie par résonance magnétique effectué après la fin du traitement, vers cinq jours de vie, et pour lequel le nouveau-né fragile doit être déplacé en dehors de l'unité des soins intensifs.

Or, une récente étude dirigée par les professeurs et chercheurs Mathieu Dehaes et Elana Pinchefsky, du Centre de recherche Azrieli du CHU Sainte-Justine et de l’Université de Montréal, révèle qu’une approche combinée de techniques de neuromonitorage permet de prédire plus rapidement, sur la base de données quantitatives, l’évolution clinique à court terme de ces nourrissons sans interférer avec leur traitement. 

Pour parvenir à ces résultats, l’équipe de recherche a suivi 52 bébés traités par hypothermie thérapeutique à l’unité des soins intensifs néonataux du CHU Sainte-Justine en utilisant deux technologies complémentaires: l’électroencéphalographie, déjà couramment employée et qui enregistre l’activité électrique du cerveau, ainsi qu'un système de neuromonitorage optique, capable de mesurer plusieurs indicateurs de l’oxygénation et du métabolisme cérébral. Ces outils, non invasifs et utilisables directement au chevet des bébés, évitent tout déplacement, un avantage crucial étant donné la fragilité de ces petits patients. 

La combinaison des mesures de ces deux outils a permis d’établir avec précision la gravité des lésions cérébrales des bébés dès le deuxième jour de traitement.  

L’importance de savoir rapidement

«Actuellement, l’imagerie par résonance magnétique demeure la référence pour évaluer les séquelles à long terme. Elle permet de différencier les cas normaux ou légers des cas graves, mais cet examen n’est généralement réalisé qu’environ cinq jours après la naissance, explique Mathieu Dehaes. L’approche intégrée que nous proposons fournit des données beaucoup plus rapidement, et ce, pour tous les niveaux de gravité.»  

En effet, l’ajout par l’équipe de l’analyse du métabolisme cérébral permet maintenant de différencier les cas modérés des cas normaux ou légers, ce qui représentait un grand défi en clinique. 

Fruits d’un travail en collaboration notamment avec la Dre Anne Monique Nuyt et le Dr Ramy El-Jalbout, médecins au CHU Sainte-Justine et professeurs à la Faculté de médecine de l’UdeM, ces résultats prometteurs ouvrent la voie à une optimisation des protocoles de soins en néonatologie. 

«Aux soins intensifs néonataux, le plus tôt est toujours le mieux, souligne Rasheda Arman Chowdhury, ancienne stagiaire postdoctorale au Centre de recherche Azrieli du CHU Sainte-Justine et première auteure de l’article. Les techniques accessibles que nous avons testées offrent au personnel médical des indicateurs quantitatifs au chevet des nouveau-nés pour désigner ceux à risque d'atteintes modérées ou graves, soutenant ainsi la prise de décision clinique.»

À propos de cette étude

Ce travail est dédié à la mémoire de la Dre Ala Birca, neuropédiatre spécialisée en neuronéonatologie et clinicienne-chercheuse au CHU Sainte-Justine et au Département de neurosciences de l’UdeM, malheureusement décédée précocement durant la réalisation de ce projet de recherche. Sa vision claire des voies que devait prendre la recherche pour améliorer l’avenir de ces enfants et son mentorat exceptionnel ont établi les bases de ce projet. 

L’article «Electroencephalography and optical neuromonitoring predict short-term outcomes in neonates undergoing therapeutic hypothermia for hypoxic-ischemic encephalopathy», par Rasheda Arman Chowdhury, Zamzam Madhi, Béatrice Desnous, Bohdana Marandyuk, Ala Birca, Ramy El-Jalbout, Anne Monique Nuyt, Elana Pinchefsky et Mathieu Dehaes, a été publié dans Scientific Reports. 

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