La nouvelle station Édouard-Montpetit et ses possibilités

En 5 secondes Le REM a maintenant une station sur le campus principal de l’UdeM, un projet spectaculaire au potentiel élevé, mais qui soulève aussi des questions.
La station Édouard-Montpetit est la plus ambitieuse du Réseau express métropolitain (REM).

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Le REM est arrivé à l’UdeM! Article 1 / 3

Située à plus de 70 m de profondeur, la station Édouard-Montpetit est la plus ambitieuse du Réseau express métropolitain (REM). Derrière les chiffres et les prouesses d’ingénierie, ce nouveau lien sous la montagne semble constituer une occasion d’agir en matière d’accessibilité et d’urbanisme. 

Jean-Philippe Meloche, professeur à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’Université de Montréal et expert en économie urbaine, décortique cette nouvelle structure. 

Questions Réponses

La station Édouard-Montpetit du REM a été un chantier impressionnant. Quel en était l’attrait? 

L’investissement, bien que colossal, répondait à un besoin stratégique: relier la ligne bleue du métro au REM. Ce raccordement double l’accès au centre-ville et soulage la ligne orange, déjà saturée. Par comparaison, ce lien a coûté une fraction de ce qu’aurait représenté la création d’une ligne complète, comme la fameuse ligne rose envisagée par le passé. On a donc économisé une ligne de métro, je dirais. 

Que change cette station pour l’Université de Montréal? 

Beaucoup de choses. La station Université-de-Montréal est l’un des pôles les plus fréquentés du métro. Le campus principal de l’UdeM, construit à flanc de montagne, a toujours été un peu isolé, malgré un accès facile. 

L’arrivée du REM change la donne. Les étudiantes et étudiants et les membres du personnel venant de la Rive-Sud ou de l’ouest de l’île auront désormais un lien direct et rapide vers le campus. Pour quelqu’un qui habite à Brossard, par exemple, le trajet jusqu’à l’UdeM pourrait se faire en 20 minutes, sans correspondance complexe. Il faudra voir comment les gens vont l’utiliser, mais je pense qu’il va y avoir beaucoup de résidants de l’est qui vont passer par la station Édouard-Montpetit pour se rendre au centre-ville et non pas par la station Jean-Talon.  

L’Université a milité pour quelque chose qui allait lui profiter, mais je pense qu’il faut revoir la vision du campus maintenant qu’il est rattaché au centre-ville. Les gens du centre-ville peuvent venir nous voir en trois minutes, plutôt qu’en faisant le tour de la montagne. Il y a là un potentiel de remodelage de l’Université, d'autant que le CEPSUM devient accessible directement du centre-ville. 

Est-ce que cette nouvelle liaison pourrait modifier la taille de la population étudiante de l’UdeM? 

Absolument. Jusqu’à présent, les étudiants et étudiantes de la Rive-Sud choisissaient plus souvent l’UQAM, tout simplement parce que les déplacements étaient plus simples. Le REM efface cette barrière. L’Université de Montréal devient reliée à Brossard presque aussi facilement que l’est l’UQAM. Ce changement pourrait transformer les choix d’établissement, surtout pour des programmes similaires.  

Peut-on s’attendre à ce que le REM réduise la circulation automobile? 

On a les outils pour réduire le trafic automobile. Or, le gouvernement souffle le chaud et le froid. On veut moins de voitures sur les routes, mais on ne fait absolument rien pour diminuer leur présence. Par exemple, les taxes sur les carburants sont relativement basses.  

Le métro et le REM s’inscrivent dans des contextes très différents. Comment situer cette nouvelle station dans l’histoire du transport montréalais? 

Quand le métro a été inauguré dans les années 1960, on était dans une période de déclin du transport en commun. Les familles quittaient le centre-ville pour les banlieues, et l’automobile et la construction d’autoroutes dominaient. Le métro a freiné cette tendance sans l’inverser complètement. 

La ligne bleue, ouverte à la fin des années 1980, prolongeait cet effort, notamment pour desservir l’Université de Montréal. Mais cette ligne n’a jamais atteint son plein potentiel d’achalandage. Avec le REM et le prolongement vers Anjou, peut-être qu’on aura des volumes de transport sur la ligne bleue qui vont être conséquents par rapport à ce qui avait été évalué. 

Aujourd’hui, le contexte est différent. Le REM a été pensé alors que la demande en matière de transport en commun était forte. Mais la pandémie a fait chuter de manière importante cette demande. Cette nouvelle ligne aura probablement un achalandage inférieur à ce qui a été estimé. Et cela va coûter cher à tout le monde. 

Justement, à quoi peut-on s’attendre en termes de coût? 

Le REM est un très beau jouet, de grande qualité. Tout comme la station Édouard-Montpetit, qui a coûté excessivement cher en raison du défi technique qu’elle a représenté. Donc, on a un système de transport en commun qui est de très haut niveau et l’on n’a pas encore commencé à payer. Ce sera coûteux si l’achalandage est moindre que prévu. Si moins de billets sont vendus, il va falloir taxer davantage la population parce que le coût, lui, ne changera pas.  

On a peut-être misé sur un trop bon projet en allant au-dessus de nos moyens. Mais je pense qu’avec le temps ça ira mieux et ceux qui en hériteront dans quelques années nous en seront reconnaissants. 

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