Quand un cours novateur passe par la philanthropie

  • Forum
  • Le 12 décembre 2019

  • Dominique Nancy
David Montminy, doctorant en philosophie et chargé d’enseignement à l'Université de Montréal.

David Montminy, doctorant en philosophie et chargé d’enseignement à l'Université de Montréal.

Crédit : Camille Gladu-Drouin

En 5 secondes

Les cours HORizon mettent l’accent sur l’interdisciplinarité, les grands enjeux de société et l’innovation pédagogique.

Lorsque les 36 étudiants du cours HORizon Risques et défis du 21e siècle se sont présentés en classe pour la première fois, ils savaient qu’ils n’assisteraient pas à un cours magistral dans un amphithéâtre. Mais ils étaient loin de se douter qu’ils joueraient à Jeopardy!

Pour les besoins du cours, David Montminy, doctorant en philosophie et chargé d’enseignement à l'Université de Montréal, a modifié un peu l’approche du jeu télévisé américain. «Il ne fallait pas trouver les questions, mais plutôt les réponses dans les différentes catégories, précise-t-il. Tout le reste était assez semblable au jeu-questionnaire. Lorsqu’un des joueurs avait la bonne réponse, il prenait la main et décidait du nombre de points pour la réponse suivante tout en sélectionnant la catégorie.»

Cette façon de faire est tout sauf traditionnelle. Mais l’approche suscite l’intérêt des étudiants et étudiantes et leur permet d’apprendre en s’amusant. C’est ainsi que l’innovation pédagogique prend tout son sens.

Ce climat d’apprentissage dynamique est au cœur des cours HORizon, qui ont pour but d’assurer une formation axée sur de grands enjeux de société aux étudiants du doctorat de la Faculté des arts et des sciences (FAS) de l’Université de Montréal.

«Les cours, basés sur des projets d’équipe et la collaboration interdisciplinaire, sont bâtis autour de l’apprentissage par problèmes et enquêtes au lieu d’être des prestations magistrales, explique David Montminy. Dans l’approche par problèmes ou enquêtes, les solutions ne viennent pas de l’enseignant, mais des discussions entre les groupes interdisciplinaires d’étudiants. Par exemple, pour le travail d’équipe, ils doivent définir eux-mêmes un problème, proposer des solutions et présenter leur projet et leur démarche d’enquête.» Les étudiants et étudiantes ont la possibilité de réaliser un documentaire sur la taxe carbone ou de créer un site Internet qui répertorie les ressources et outils pour aider la population de Montréal à adopter un mode de vie plus durable.

D’après le doctorant, ce type d’enseignement permet de mettre de l’avant les interventions les plus appropriées selon un plan d’action: que ce soit dans le cadre d’un jeu, d’un laboratoire ou d’une simulation, l’étudiant est l’artisan de ses apprentissages, avec le soutien du professeur. «Dans ce genre d’approche, l’enseignant est plus un accompagnateur», mentionne M. Montminy.

Soulignons que le Centre de pédagogie universitaire de l’UdeM a soutenu la formation des doctorants à cette nouvelle stratégie pédagogique, inspirée de l’approche élaborée au College of Discovery, Creativity and Innovation du Taylor Institute for Teaching and Learning de l’Université de Calgary. Les doctorants ont également rencontré des professeurs et des étudiants de l’Université McMaster d’un programme de baccalauréat où l’apprentissage par l’enquête est à l’avant-plan.

Cours offerts aux étudiants de divers horizons

Même s’il s’appuie sur des préceptes philosophiques éprouvés, le cours conçu par le doctorant en philosophie ne s’adresse pas spécifiquement à ceux et celles désireux de s’engager dans cette discipline. De fait, il est ouvert à tous les étudiants de premier cycle de l’UdeM et de ses écoles affiliées. Il vise à enrichir la formation en «développant des compétences en gestion de projets, en communication, en résolution de problèmes et en innovation sociale», peut-on lire dans le document de présentation.

Cet enseignement donné depuis septembre par la FAS est offert grâce au don de un million de dollars accordé à la faculté pour soutenir la création d’un nouveau programme de bourses d’excellence au doctorat: les bourses Fellows HORizon Louis Gagnon. Le donateur et président des opérations canadiennes d’Intact Corporation financière, également diplômé en sciences économiques de l’UdeM, veut offrir l’occasion à des étudiants et étudiantes du doctorat de concevoir et donner un cours sur de grands enjeux de société.

«La volonté du donateur est de souligner l’importance d’avoir des acteurs du milieu de l’enseignement qui se penchent activement sur des enjeux contemporains de notre société et de promouvoir l’interdisciplinarité et l’innovation pédagogique», fait valoir David Montminy, l’un des deux boursiers 2019 Fellows HORizon Louis Gagnon. L’autre bourse a été accordée à Morgan Botrel, doctorante en sciences biologiques, qui assumera la conception et la charge du cours HORizon à l’hiver 2020. 

Les thématiques des cours changent annuellement, signale David Montminy. Les cours des lauréats ont pour thème «Planète Terre 1,5 °C: comment limiter le réchauffement planétaire dans un contexte d’indifférence et de scepticisme face à la science?» Ils sont inspirés notamment des principes du développement durable de l’Unesco.  

«Le cours que je donne est axé sur la philosophie des sciences alors que celui de Morgan mettra l’accent sur l’écologie et la biologie.» Pour David Montminy, limiter le réchauffement climatique passe nécessairement par l’analyse des arguments utilisés par les climatosceptiques. «Dans les quatre premières rencontres, on étudie les faits sur la climatologie et le climatoscepticisme à l’aide des principes de grands penseurs comme Aristote, Hume et Quine, mais je prends aussi des exemples dans toutes les disciplines. L’idée est de former les étudiants à utiliser les outils méthodologiques, conceptuels et philosophiques pour pouvoir faire la démonstration que le scepticisme à l’égard de certaines prédictions scientifiques n’est pas justifié.»

C'est un peu de cette cohérence qu'il souhaite apporter dans le cadre de son cours et de ses recherches doctorales.

Bourses Fellows HORizon Louis Gagnon

Louis Gagnon

En plus de ses activités de chargé de cours, David Montminy termine son doctorat sous la direction de Frédéric Bouchard et Vincent Larivière, respectivement professeur au Département de philosophie et doyen de la FAS et professeur à l’École de bibliothéconomie et des sciences de l’information. Son thème: la nature des changements à apporter à l’épistémologie des sciences considérant l’utilisation des données de masse et l’intelligence artificielle. Il tente de raffiner les connaissances sur le sujet, notamment de savoir si ces technologies modifient ou non la méthode scientifique. «J’essaie de voir s’il y a de réels changements à effectuer ou s’il s’agit plutôt d’un simple recadrage.»

David Montminy se dit très honoré d'avoir obtenu la bourse Fellows HORizon Louis Gagnon. L'objectif de cette bourse, qui est de soutenir l’apprentissage en lien avec l'orientation des choix environnementaux et la démythification de l’utilisation des sciences, concordait avec ce qu'il voulait faire. C'était pour lui une source à la fois de stimulation et de valorisation.

«J’avais déjà une expérience en enseignement, mais je n’avais pas de formation en pédagogie. Maintenant, j’ai des outils approuvés par des spécialistes en pédagogie!»

Serez-vous l’un des deux lauréats Fellows HORizon 2020?

Chaque année, la Faculté des arts et des sciences (FAS) remet deux bourses Fellows HORizon Louis Gagnon, totalisant 48 000 $, à des étudiants et étudiantes du doctorat. Les lauréats doivent mettre sur pied un cours chacun sur un thème contemporain ciblé.

La thématique pour 2020-2021: «Pas de plan(ète) B: comment concilier les impératifs de la vie moderne avec l'urgence d'adopter des modes de consommation et de production durables?»

«Ce programme de bourses prévoit un voyage de formation dans une université qui a acquis une expertise dans les approches pédagogiques d’apprentissage actif par l’enquête ainsi qu’un soutien personnalisé du Centre de pédagogie universitaire de l’UdeM. Les deux boursiers suivront notamment une formation en technopédagogie, médias et méthodologie qui les outillera pour la préparation de leurs cours respectifs. Ces formations sont également financées par le don de M. Gagnon», souligne la vice-doyenne aux études de la FAS, Sophie Parent.

Les personnes désireuses de soumettre leur candidature sont invitées à remplir le formulaire de demande sur le site de la FAS et à le retourner d’ici le 6 janvier 2020 à 17 h.