Gériatrie: les vertus de l’art
- UdeMNouvelles
Le 23 octobre 2020
- Béatrice St-Cyr-Leroux
Le médecin gériatre et neurologue Olivier Beauchet étudie les effets des interventions artistiques sur la santé globale des aînés hospitalisés à court terme.
Au départ, le Dr Olivier Beauchet était sceptique.
Le chercheur du Centre de recherche de l’Institut universitaire de gériatrie de Montréal et nouvellement professeur au Département de médecine de l’Université de Montréal ne pensait pas que des interventions artistiques pouvaient améliorer la santé globale des aînés hospitalisés pour de courts séjours gériatriques.
Pourtant, après une année à offrir des ateliers de peinture à des personnes âgées hospitalisées, il a observé une diminution des durées de séjour et du nombre de décès.
«Incroyable, me suis-je dit, se rappelle le Dr Beauchet. L’émotion positive qu’un individu éprouve, émotion non ressentie depuis longtemps parce qu’il est âgé et replié sur lui-même, amène une sensation de bien-être, une envie d’être davantage proactif dans ses soins. Ce qui pourrait expliquer un tel résultat.»
Fort de ce constat, le médecin gériatre et neurologue pilote aujourd’hui un programme de recherche visant à examiner les effets des interventions artistiques sur des paramètres cliniques tels que l’amélioration du bien-être et de la qualité de vie des aînés. Menée au Québec ainsi qu’au Japon, à Singapour et en France, cette étude évalue également la réduction de la fragilité et de l’isolement social de cette population.
Le programme se concentre sur deux catégories d’interventions artistiques réalisées en groupe: des ateliers d’arts plastiques et la participation aux Beaux-Jeudis du Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM), soit des visites guidées interactives offertes aux 65 ans et plus.
De l’art-thérapie?
«Pour moi, c’est plutôt l’un des volets de l’art-thérapie que de l’art-thérapie en soi, précise le chercheur. Dans notre projet, nous accordons une grande importance à la mécanique de groupe. D’une part, oui, il y a la création artistique, mais d'autre part nous nous intéressons beaucoup aux retombées de la socialisation qui y est associée.»
De là découle d’ailleurs un questionnement que le Dr Beauchet souhaite approfondir: est-ce vraiment l’émotion pure suscitée par l’art qui engendre des bienfaits ou est-ce plutôt la socialisation qui accompagne les activités participatives, voire une combinaison des deux?
Le gériatre apporte un élément de réponse: «Nous sommes des individus vertébrés dotés d'un cerveau émotionnel extrêmement puissant qu’on sous-estime énormément et qui peut stimuler la modularité cérébrale. Pour moi, l’art est un support, un catalyseur du lien social.»
L’importance d’agir tôt
Au Canada, et particulièrement au Québec, l’amélioration de l’état de santé des personnes âgées et la lutte contre l’isolement social qu’elles vivent sont des problématiques importantes. Selon le Dr Beauchet, il est primordial d’agir rapidement dans le processus de fragilisation afin de maintenir ces personnes en bonne santé et socialement actives.
«Avec notre programme au MBAM, nous avons montré que nous pouvons inverser ce processus en travaillant avec cette population en amont, c’est-à-dire avant que les troubles cognitifs ou physiques soient trop avancés. La dimension artistique est une intervention attrayante, en plus d’être efficace pour améliorer les états de santé mental et physique et pour accroître la connexion de l’individu avec lui-même et la société.»