Un premier chat au Québec est infecté par la COVID-19

  • Forum
  • Le 16 mars 2021

  • Mathieu-Robert Sauvé
Le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec a été informé de ce premier cas et l’a rendu public le 25 février.

Le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec a été informé de ce premier cas et l’a rendu public le 25 février.

Crédit : Getty

En 5 secondes

La Dre Cécile Aenishaenslin présente son étude exploratoire sur les risques de transmission de la COVID-19 chez les chats.

Cécile Aenishaenslin

L’équipe de la Dre Cécile Aenishaenslin, professeure à la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal, a diagnostiqué un premier cas de COVID-19 chez un chat au Québec. «C’est un chat de la grande région de Montréal qui a vraisemblablement été contaminé par ses maîtres. Il a été isolé comme on le fait avec les personnes qui ont subi un test de dépistage positif au coronavirus», explique la vétérinaire et épidémiologiste en entrevue.

Le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec a été informé de ce premier cas et l’a rendu public le 25 février.

Pour la chercheuse spécialisée dans les zoonoses (maladies transmissibles de l’animal à l’humain et inversement), ce cas ne constitue pas une surprise, car on sait depuis plusieurs mois que certains animaux domestiques peuvent être atteints de la COVID-19; les chats peuvent présenter des symptômes semblables à ceux observables chez les Sapiens: fièvre, toux, abattement. L’Organisation mondiale de la santé animale, de laquelle la Dre Aenishaenslin est membre, tient un registre en temps réel des cas d’infection rapportés chez les animaux.

Selon une mise à jour datée de janvier effectuée par l'Organisation, des infections animales par le SRAS-CoV-2 «ont été signalées par plusieurs pays». Plusieurs espèces se sont révélées sensibles à l’infection. Le cas des visons a été largement médiatisé depuis que des éleveurs scandinaves ont dû abattre des millions d’individus cet hiver. Les furets sont aussi à risque, de même que certains lapins. Chez les animaux domestiques, les chats sont désignés comme des espèces présentant une sensibilité «élevée» à l’infection. Quant à la possibilité qu’ils soient des vecteurs de propagation, c’est une question encore à l’étude.

Chats sous surveillance

Bien qu’il soit connu que les chats puissent être infectés par le virus, la fréquence à laquelle les contaminations surviennent est peu documentée. En collaboration avec plusieurs de ses collègues de la Faculté de médecine vétérinaire, dont les Drs Hélène Carabin, Carl Gagnon, Marie-Claude Blais et Julie Arsenault, et avec la Dre Erin Fraser, vétérinaire spécialisée en santé publique en Colombie-Britannique et professeure associée à l’Université de la Colombie-Britannique, la Dre Aenishaenslin a mis en place dès septembre 2020 un protocole de recherche qui vise à étudier le risque d’infection chez les chats au Québec et dans la province de l’Ouest canadien. Un financement de 40 000 $ a été accordé par l’Agence de la santé publique du Canada.

De son côté, elle est à recruter 40 familles québécoises aux prises avec la COVID-19 et qui possèdent un ou plusieurs chats. En cas de positivité, des analyses en laboratoire permettront d’identifier la séquence génétique du virus pour la comparer avec celle des humains.

Des cas d’infection ont également été documentés chez des chiens, mais ceux-ci se déplaçant rarement seuls à l’extérieur, le risque qu’ils puissent jouer un rôle dans la diffusion du virus en dehors du domicile est moins important; c’est pourquoi la Dre Aenishaenslin s’est concentrée sur les félins. «De nombreuses questions demeurent. Est-ce que les animaux infectés ont une charge virale suffisante pour transmettre la maladie aux humains qui les côtoient? Est-ce que le virus trouvé chez les félins est différent de celui présent chez leurs propriétaires?»

On croit que les risques de transmission félin-humain sont faibles, mais compte tenu du grand nombre de chats dans les foyers québécois, il y a urgence d’en savoir plus. «On ne souhaite pas qu’un chat infecté soit utilisé en zoothérapie ou dans des centres de soins pour personnes âgées par exemple», lance la vétérinaire.

Première au Québec

L’équipe de l’Université de Montréal est la seule au Québec à étudier la transmission chats-humains. En Ontario, l’Université de Guelph mène une étude similaire qui inclut les chiens. Et au moins deux études sont en cours aux États-Unis.

Il s’agit encore d’une étude exploratoire; en analysant les risques de transmission chez un petit nombre de chats, elle permettra d'évaluer s’il est pertinent de lancer une étude à grande échelle.

«Notre étude vise deux objectifs principaux: déterminer la fréquence d’infection chez les chats exposés à un humain infecté et désigner les facteurs de risque pour les chats», résume la vétérinaire, qui ne veut pas inquiéter inutilement la population. Elle-même possède deux chats. «Je crois que la situation actuelle montre bien qu’il faut obtenir plus de connaissances sur les zoonoses. Les gouvernements doivent saisir l’occasion de financer adéquatement les projets de recherche qui s’intéressent à l’interface des santés humaine, animale et des écosystèmes, cohérents avec l’approche Une seule santé.»

Pour joindre la Dre Cécile Aenishaenslin: cecile.aenishaenslin@umontreal.ca

Site Web: https://www.laboratoireuneseulesante.com/