Trois questions à Daniel Jutras sur l’investissement responsable

Daniel Jutras

Daniel Jutras

Crédit : Amélie Philibert

En 5 secondes

Dans la foulée du plan stratégique adopté l’automne dernier, l’Université de Montréal affirme son leadership en matière d’investissement responsable.

Il y a un peu plus d’un an, l’Université de Montréal annonçait de nouvelles cibles de réduction de l’intensité carbone des actions cotées de son fonds de dotation, cibles qui sont déjà en bonne voie d’être atteintes. Or, l’investissement responsable demeure une préoccupation à l’UdeM, souvent placé au cœur des débats sur le développement durable. Le recteur Daniel Jutras a souhaité prendre un moment pour faire le point.

L’approche de l’Université en matière d’investissement responsable repose sur l’atteinte de cibles grâce à l’intégration des facteurs ESG [environnementaux, sociaux et de gouvernance] et à l’engagement actionnarial. Cette approche est-elle sûre?

Les personnes qui souhaitent que l’Université pose des gestes concrets en investissement responsable ont parfois la perception que la direction n’a pas les mêmes valeurs qu’elles, mais je veux leur dire d’entrée de jeu que nous partageons leurs espoirs pour l’avenir et que nous sommes nous aussi préoccupés par l’urgence climatique et bien au fait de ce que dit la science.

Parlons des moyens dont nous disposons. L’approche relative à l’investissement responsable de l’Université de Montréal s’insère dans le plan plus général de développement durable que nous mettons en œuvre, y compris la décarbonation des campus. Elle comporte trois volets: l’intégration des facteurs ESG dans la gestion du portefeuille, l’utilisation de notre pouvoir d’actionnaire pour faire bouger les choses et, plus récemment, l’établissement de cibles de réduction de l’intensité carbone moyenne pondérée de notre portefeuille. Le critère de calcul des émissions carbone associées à nos investissements est largement reconnu comme une balise sérieuse. Nous sommes aussi convaincus d’avoir fait de bons choix quant au périmètre et à l’année de référence de la cible afin que nos engagements soient réels et significatifs. Il ne s’agit pas d’épater la galerie: je souhaite que l’Université accomplisse des gestes forts pour affirmer sa volonté de contribuer à la transition écologique. Notre politique d’investissement responsable est en train de faire ses preuves en ce sens. Elle est aussi susceptible d’évoluer dans le temps.

Plusieurs voix s’élèvent au sein de la communauté pour revendiquer un désinvestissement des énergies fossiles. D’autres universités ont d’ailleurs fait ce choix. Qu’en est-il à l’UdeM?

Jusqu’ici, l’Université de Montréal n’a pas ajouté cette mesure à sa politique d’investissement responsable, mais cette avenue n’est pas exclue. Nous y réfléchissons d’ailleurs de manière approfondie depuis plusieurs mois. Le désinvestissement est différent des autres mesures parce qu’il ne cherche pas d’abord la réduction des émissions de GES attribuables à nos investissements. Il s’agit plutôt d’un geste symbolique et politique pour marquer la distance entre l’Université et l’industrie des énergies fossiles. Pour y parvenir, il faudrait désigner des produits financiers qui nous permettent d’investir dans d’autres secteurs sans augmenter notre empreinte carbone. Il faudrait aussi s’assurer que ces produits nous donnent de bons résultats dans l’atteinte de nos cibles financières parce que les revenus du fonds de dotation servent d’abord à soutenir la population étudiante et la communauté des chercheurs et chercheuses dans leurs projets. De la volonté d’aller plus loin au geste lui-même, il faut que ce soit fait de manière méthodique.

Ce que je peux dire aujourd’hui, c’est que l’Université réfléchit et fait du chemin sur l’enjeu du désinvestissement. On veut bouger dans les mois qui viennent, mais de façon raisonnée et informée.

Plus largement, comment l’Université se penche-t-elle sur la réduction de son empreinte carbone et sa transition écologique?

Toute la communauté nous demande de faire du développement durable une grande priorité dans les années à venir. Dans la foulée du plan stratégique adopté il y a quelques mois, nous discutons d’engagements costauds et mesurables parce que c’est une des responsabilités fondamentales d’une université d’affirmer son leadership sur ces enjeux qui concernent la société tout entière. Un nouveau plan d’action en matière de développement durable piloté par l’Unité du développement durable est en cours de rédaction et nous serons en mesure dès ce printemps de présenter des cibles à partir desquelles nous pourrons travailler dans l’espoir d’avoir la plus grande influence possible sur la transition écologique. Certains gains sont réalisables à court terme. D’autres exigeront des changements plus profonds dans la vie universitaire.