Réflexions sonores

L’exposition «La couleur du temps, le son d’un espace» propose de mixer les vinyles de Charles Gagnon et d’écouter le résultat.

L’exposition «La couleur du temps, le son d’un espace» propose de mixer les vinyles de Charles Gagnon et d’écouter le résultat.

En 5 secondes

Le Centre d’exposition de l’UdeM présente l’exposition immersive «La couleur du temps, le son d’un espace», d’où vous pourrez repartir avec un vinyle de la vaste collection de Charles Gagnon.

L’exposition coproduite par le laboratoire de recherche-création La création sonore: cinéma, arts médiatiques, arts du son a pour commissaires Karine Bouchard et Serge Cardinal et présente les œuvres médiatiques des artistes Jean-François Côté, Ariel Harrod et Claire Renaud. Le projet offre un regard poétique sur l’enregistrement sonore. Les œuvres pourront être vues jusqu’au 13 août au Centre d’exposition de l’Université de Montréal.

L’exposition se divise en deux parties comme les deux faces d’un vinyle.

Face A: dans une première pièce, le visiteur est immergé dans l’infiniment grand. Autour de lui, quatre gigantesques disques lui font face, comme les quatre éléments dont les sons lui parviennent.

Face B: le spectateur est invité à rentrer dans différentes boîtes plus restreintes comme des chambres d’écho. Ces lieux accueillent des compositions sonores originales qui mixent différents sons historiques. Une première boîte noire contient des compositions sonores originales à partir des premières traces de son qui ont pu être enregistrées grâce au nouveau dispositif de l’époque, le phonautographe. Une autre œuvre sonore revisite les premières voix captées à partir d’un phonogramme. Le spectateur pénètre ensuite dans une boîte aux allures de temple immaculé pour écouter un remixage du White Album des Beatles. Puis, il finit par s’installer dans l’atelier du peintre Charles Gagnon, où il peut mixer différents vinyles et repartir avec l’un d’eux.

La collection de disques de Charles Gagnon: là où tout a commencé

La collection de disques de Charles Gagnon

La collection de disques de Charles Gagnon

Crédit : Guy L’Heureux

Charles Gagnon possédait une collection éclectique de 3000 vinyles qu’il écoutait en peignant. En 2017, lorsque la Phonothèque québécoise a fermé, une partie de sa collection a été rapatriée au laboratoire La création sonore: cinéma, arts médiatiques, arts du son, de l’Université de Montréal, dirigé par le cocommissaire Serge Cardinal. «Ce geste a ainsi constitué la genèse des recherches qui ont mené à l’exposition La couleur du temps, le son d’un espace. L’exercice a tout d’abord impliqué de mettre en parallèle le processus de création de Charles Gagnon avec celui du collectif transdisciplinaire de commissaires et d’artistes du projet, de réévaluer l’atelier comme lieu d’action de la création et de réfléchir à la manière dont la musique et ses objets s’immiscent dans le processus créatif», explique la cocommissaire Karine Bouchard.

Le lien entre création musicale, création sonore et création visuelle est mis de l’avant durant toute l’exposition. Nous nous déplaçons ainsi à travers différentes configurations muséales. Nous pénétrons dans un cube blanc, ce dispositif scénique ayant largement été utilisé dans les musées d’art moderne afin de neutraliser l’espace: tout est peint en blanc uniforme et les fenêtres sont condamnées pour un éclairage homogène. Ici, il est parsemé de multiples pochettes du White Album des Beatles. Nous sommes également invités à rentrer dans une black box, un autre dispositif d’exposition, soit une pièce carrée peinte en noir ayant servi à montrer des performances expérimentales. Dans La couleur du temps, le son d’un espace, nous assistons également à une performance technique: celle du son capté pour la première fois par Édouard-Léon Scott de Martinville. Et nous pouvons aussi visiter une period room, une salle de musée censée reconstituer un lieu historique et qui représente ici malicieusement le logo de l’étiquette HMV en trois dimensions: un Russel Jack terrier écoutant la voix de son maître sur un phonographe.

L’infini de l’enregistrement

Un des quatre cercles représentant la terre

Un des quatre cercles représentant la terre

Crédit : Guy L’Heureux

En 1977, la NASA a envoyé dans l’espace le disque d’or Les sons de la terre, destiné à expliquer à quoi ressemble la civilisation terrienne s’il parvenait aux mains d’êtres extraterrestres. Il comprenait notamment divers bruits d’éléments naturels, des musiques du monde, mais également des photos d’humains et de la nature. Et si c’était à refaire, qu’enverrait-on aujourd’hui? Qu’enregistrerait-on sur ce disque pour parler de notre civilisation?

Pour les artistes, il est toujours d’actualité de représenter les quatre éléments: l’air, l’eau, la terre et le feu. Ainsi les représentent-ils sur quatre disques. Sur l’un, un avion passe dans le ciel. Sur un autre, la chute Montmorency s’écoule. Sur le troisième, la terre de l’île d’Orléans est représentée. Et une grange brûle sur un quatrième. Sous chacun d’eux, un son propre au vinyle usé par le temps est diffusé: tantôt bruit blanc, crépitement, grésillement, bruit de sillon ou de fumée. «Il est question d’écouter ces disques: le regard mène à l’écoute. Aussi, ce qui est intéressant est d’abord le brouillage de ce que pourraient représenter les images: entre un avion dans le ciel et une égratignure sur un sillon, entre une terre où se trouve un homme et le centre d’un disque, entre le feu d’une grange qui brûle et le noir de fumée utilisé pour graver les premiers sons sur un cylindre, entre une chute et la représentation d’un bruit blanc. Le son procède d’un même jeu d’aller-retour: entre le son du disque et le son d’une chute, d’un feu, du vent et de la terre», note Karine Bouchard.

«On est dans l’expression de la matière à l’échelle cosmique, dans cet infini qui n’est qu’une série de boucles, de cycles de vie qui recommencent éternellement», ajoute Jean-François Côté.

Créer sa propre bande sonore

Dans la première salle, des enceintes sont situées sous chacun des éléments. Dans cette expérience immersive, le visiteur peut réaliser son propre mélange sonore en fonction de sa position; c’est son corps qui fait office de platine en se déplaçant dans l’espace.

À la toute fin de l’exposition, le spectateur est invité à choisir quatre vinyles parmi ceux de la collection de Charles Gagnon et à les déposer sur des tables de lecture. D’auditeur, il devient créateur: il peut réaliser son propre mixage et en écouter le résultat sur place.

S’il le souhaite, il peut demander à ce qu’un des vinyles de la collection lui soit réservé et repartir avec lorsque l’exposition sera démontée.

  • La collection de disques de Charles Gagnon.

    La collection de disques de Charles Gagnon

    Crédit : Guy L’Heureux
  • Écoute d’un remixage du White Album des Beatles entouré de  pochettes du White Album.

    Écoute d’un remixage du «White Album» des Beatles dans une enceinte tapissée de pochettes du disque

    Crédit : Guy L’Heureux
  • Le logo du label de musique HMV revisité.

    Le logo de l'étiquette HMV revisité

    Crédit : Guy L’Heureux

Informations pratiques

Centre d’exposition de l’Université de Montréal
Au 2940, chemin de la Côte-Sainte-Catherine
Pavillon de la Faculté de l’aménagement, salle 0056

Horaire 
Du mardi au samedi, de 10 h à 17 h
Le jeudi, de 10 h à 19 h

Journée d’étude: «Du disque vinyle à la musique: revisiter l’artiste Charles Gagnon»

Mardi 2 juin
Cette journée d’étude permettra d’explorer les résonances entre les pratiques musicales qui retenaient l’attention de l’artiste Charles Gagnon et sa démarche musicale.

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