Naissances prématurées: une découverte qui fait avancer la science


Chaque année, 15 millions de bébés naissent prématurément à travers le monde. Pour ces enfants, chaque jour supplémentaire de gestation peut avoir des répercussions décisives sur leur santé et leur qualité de vie. Aujourd’hui, une équipe de recherche présente, dans un article récemment publié dans la revue EMBO Molecular Medicine, une solution efficace et abordable pour prévenir ces naissances précoces.
France Côté, doctorante à l’Université de Montréal, sous la direction du Dr Sylvain Chemtob, chercheur au Centre de recherche Azrieli du CHU Sainte-Justine et professeur à la Faculté de médecine de l’UdeM, s’appuie sur les découvertes pionnières de la biochimiste Christiane Quiniou. Celle-ci a été la première à concevoir des peptides ciblant le récepteur de l’interleukine-6 (IL-6), une cytokine essentielle à l’immunité innée, également impliquée dans le déclenchement des accouchements prématurés. L’équipe a ainsi mis au point un peptide, nommé HSJ633, qui pourrait transformer la prise en charge de la prématurité.
«Ce peptide est unique: il inhibe temporairement les effets inflammatoires délétères d’IL-6 tout en préservant ses fonctions protectrices, comme la défense cellulaire. C’est une avancée sans précédent», explique le Dr Chemtob.
Une solution accessible et efficace
Les traitements conventionnels, qui visent à freiner les contractions utérines, sont souvent peu spécifiques et associés à des effets secondaires pour la mère et le fœtus. En revanche, HSJ633 est une molécule facile à produire, stable et abordable qui agit directement sur l’inflammation utéro-placentaire, le déclencheur principal de l’accouchement prématuré. Un traitement pourrait coûter beaucoup moins cher que les anticorps anti-IL-6 actuellement utilisé en clinique (pour d’autres conditions médicales), ce qui fait de HSJ633 une solution de rechange très intéressante, plus sécuritaire et accessible, même pour les systèmes de santé les plus fragiles.
Le fruit d’un long parcours scientifique
Cette percée repose sur plus d’une décennie de recherche rigoureuse. Christiane Quiniou se souvient: «L’idée de cibler l’IL-6 est née de nos travaux sur l’inflammation. En développant ces premiers peptides, j’espérais qu’ils puissent un jour faire une différence. Voir cette intuition se concrétiser dans HSJ633, c’est profondément gratifiant!»
Initialement conçu pour d’autres maladies inflammatoires, le peptide a démontré un potentiel remarquable dans la prévention de la prématurité chez la souris. «Ce petit peptide fait exactement ce qu’on espérait: il réduit l’inflammation sans nuire au développement du fœtus», ajoute France Côté.
Les effets de HSJ633 ont été validés dans des modèles précliniques (souris) simulant une inflammation systémique. Administré avant ou après le déclenchement de l’accouchement, le peptide a permis de prolonger la gestation de plusieurs jours, tout en réduisant les lésions aux organes vitaux comme les poumons et les intestins des nouveau-nés. Cette protection des organes fœtaux fortement désirable est inexistante avec les traitements actuels pour tenter de contrer la prématurité. Les résultats observés avec HSJ633 suggèrent un potentiel thérapeutique solide et durable.
Un espoir concret pour les familles
L’équipe de recherche souhaite la mise sur pied d’une étude clinique chez l’humain: «Nous espérons que HSJ633 deviendra un outil clé dans la prévention de la prématurité. C’est une réponse concrète à un enjeu mondial, conclut le Dr Chemtob. Il est rare qu’une innovation réunisse autant de potentiel scientifique, clinique et humain. Saisir cette opportunité, c’est faire un pas décisif pour la santé des nouveau-nés et de leur famille, ici comme ailleurs.»