Une récompense des IRSC pour Gregory Emery et David Knapp

Gregory Emery et David Knapp, professeurs au Département de pathologie et biologie cellulaire de l’Université de Montréal, ont reçu une mention de contribution exceptionnelle du Collège des évaluateurs des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC).
Gregory Emery, directeur de l’Unité de recherche en transport vésiculaire et signalisation cellulaire de l’Institut de recherche en immunologie et en cancérologie (IRIC), s’est vu décerner cette mention pour un service d’évaluation exceptionnel dans trois concours de subvention consécutifs ou plus – une reconnaissance accordée à seulement un pour cent des évaluateurs et évaluatrices au pays.
David Knapp, directeur de l’Unité de recherche en ingénierie cellulaire de l’IRIC, a obtenu trois mentions de contribution exceptionnelle, qui saluent la qualité remarquable et la pertinence de son travail.
Discussion croisée sur ce rôle méconnu, mais essentiel en recherche.
En vos mots, en quoi consiste le travail des évaluateurs et évaluatrices des IRSC?
Gregory Emery: Au Canada, une grande partie de la recherche biomédicale est soutenue par les IRSC, qui lancent deux concours de subvention par année. Pour chacun, plus de 2500 demandes sont reçues. Avec un taux de succès d’environ 1 demande financée pour 6 ou 7 demandes soumises, comment évaluer adéquatement cette masse de projets? Ce sont des comités de chercheurs et chercheuses qui s’en occupent. Chaque comité reçoit les demandes liées à son champ d’expertise, les évalue et leur attribue un score. C’est ce qu’on appelle l’évaluation par les pairs.
David Knapp: Le travail d'un évaluateur ou d’une évaluatrice des IRSC comporte deux volets. Tout d'abord, nous devons déterminer quelles propositions sont scientifiquement valables et les plus susceptibles d'améliorer la santé de la population canadienne et de la population mondiale en général. Est-ce que les expériences sont logiques et répondent adéquatement aux questions soulevées? Est-ce que l’équipe pourra les effectuer dans le temps imparti? Est-ce que le chercheur ou la chercheuse a un historique de productivité scientifique dans ce domaine? Deuxièmement, nous devons fournir un rapport d’évaluation impartial et constructif pour toutes les demandes évaluées. Ce rapport doit résumer ce que nous avons pensé du projet proposé, de ses forces et de ses faiblesses. Cet aspect de l’évaluation est probablement celui qui a le plus d'incidence, car il nous permet de contribuer à garantir la qualité scientifique de tous les projets, pas seulement de ceux financés.
G.E.: De fait, le but ici n'est pas de simplement critiquer la demande, mais de fournir des pistes pour aider le chercheur ou la chercheuse à améliorer son projet. Pour faire cet exercice de façon juste et impartiale, nous devons nous renseigner sur l'état de la recherche dans le domaine concerné et nous devons nous détacher autant que possible de nos biais. Le processus d'évaluation prend du temps, mais il permet un apprentissage constant de nouvelles choses. Il peut toutefois être frustrant de constater que de la recherche de très haute qualité ne sera pas financée lors d’un concours.
Globalement, comment l’évaluation par les pairs contribue-t-elle à l’écosystème de recherche?
D.K.: Elle joue un rôle crucial pour le contrôle de la qualité des travaux scientifiques réalisés et diffusés. Surtout dans le système hypercompétitif et récompensant la nouveauté dans lequel nous évoluons. L’évaluation par les pairs est l’un des remparts permettant de garantir que la science demeure consacrée à découvrir ce qui se rapproche le plus de la vérité.
G.E.: En effet, si les chercheurs et chercheuses ne participaient pas au processus, qui effectuerait l'évaluation des projets de recherche? Probablement des personnes qui n'auraient pas les connaissances nécessaires pour évaluer la qualité et l'importance des travaux de recherche. Il y aurait de forts risques de biais. La recherche fondamentale, par exemple, dont les résultats ne sont évidents qu’à long terme, verrait probablement son financement fortement réduit.
Pourquoi est-ce important pour vous de faire ce travail d’évaluation?
G.E.: Participer à l'évaluation de projets soumis aux IRSC est à la fois un devoir et un honneur. C'est un devoir parce que le système ne peut pas fonctionner sans évaluation par les pairs. C'est aussi un honneur, car c’est une forme de reconnaissance par nos pairs d’être invité dans un comité d’évaluation. Il s’agit aussi d’une position privilégiée pour constater la rigueur et le sérieux dont font preuve les évaluateurs et les évaluatrices tout au long du processus.
D.K.: Je considère également que, comme scientifique, la participation à l’évaluation par les pairs est l’un de mes devoirs fondamentaux. Comme une cellule cancéreuse qui perd ses mécanismes de contrôle, le système serait enclin à la corruption sans notre participation active à ce processus. Nous savons désormais ce qui se passe lorsque la vérité est déformée; nous devons combattre activement ce type de dérapages.
Vous êtes à différents stades de vos carrières; est-ce que ce travail vous apporte à tous les deux quelque chose comme chercheurs?
G.E.: Bien sûr! En tant qu'évaluateurs, nous avons un accès privilégié aux dessous des projets: les raisonnements, les techniques proposées et les perspectives envisagées par nos collègues. C’est très enrichissant. J'apprécie aussi l'exercice intellectuel que ça représente, lorsqu’il faut discuter et même débattre des propositions. Une autre grande satisfaction est la rencontre de nouveaux collègues et la découverte d’expertises par les comités. De nouvelles collaborations scientifiques peuvent même en découler!
D.K.: Tout à fait, cette occasion d’interagir avec des chercheuses et chercheurs, que nous n’aurions peut-être pas croisés autrement, contribue à renforcer la communauté scientifique du pays. La participation au processus d’évaluation donne aussi la possibilité d’évaluer notre propre travail de manière critique, ce qui nous permet d’améliorer nos écrits. C’est une belle école!
Que représente cette mention du Collège des évaluateurs pour vous?
G.E.: C'est une belle reconnaissance de nos efforts et du temps investi à titre d'évaluateurs. C’est un travail de l'ombre dont on parle trop rarement. Personnellement, je remets toujours en question mon travail d’évaluateur; une telle mention valide mon travail et me motive à continuer!
D.K.: J’ajouterais même que l’attribution de ce type de prix pour les promotions ou pour nos propres demandes de financement serait souhaitable. Ce n’est malheureusement pas le cas pour l’instant, malgré les efforts substantiels que nous consacrons à l’examen par les pairs.
Qu’est-ce qui fait de vous de bons évaluateurs?
G.E.: En toute franchise, je l’ignore. Avec l’expérience, je pense être capable de synthétiser mes conclusions de façon efficace, d’aller directement aux points critiques sans m'étendre excessivement sur des détails.
D.K.: Pour moi, un bon évaluateur ou une bonne évaluatrice fournit un avis critique, impartial et constructif: son travail consiste autant à fournir un classement qu’à aider les candidates et candidats à améliorer leurs travaux. J’essaie de m’en tenir à ces idéaux lorsque j’effectue mes évaluations et j’espère que j’y parviendrai le plus souvent possible!