Puis survient un changement radical pendant la période classique, soit entre 1600 et 1000 ans avant aujourd’hui: malgré des populations beaucoup plus denses, l'usage du feu diminue considérablement. «Cela signifie que la plupart des terres ont probablement été défrichées, ce qui pourrait indiquer un changement de stratégie agricole», précise Benjamin Gwinneth.
Les données portent plutôt à croire à une intensification agricole majeure, notamment par la culture en billons et sillons pour réduire l'érosion et le jardinage intensif. «Le feu n'était plus un composant clé de la production agricole. Cette transformation témoigne d'une urbanisation progressive et d'une société capable d'innovation pour nourrir une population grandissante», ajoute le professeur.
Cette évolution des pratiques est cohérente avec ce que les archéologues et anthropologues savaient de la civilisation maya à son apogée, soit qu’il s’agissait d’une société complexe, urbanisée, avec des spécialisations croissantes et des techniques agricoles avancées et adaptées à l’environnement.
L'énigme du climat stable
Toutefois, l’analyse des isotopes de l'hydrogène a permis de constater que, contrairement aux régions mayas situées plus au nord et ayant été affectées par la sécheresse, Itzan semble avoir connu une stabilité climatique qui s'explique par la géographie.
«Itzan se trouve près de la Cordillère, qui apporte des précipitations orographiques régulières grâce aux courants atmosphériques des Caraïbes, mentionne Benjamin Gwinneth. Pendant que d'autres régions mayas subissaient des sécheresses dévastatrices, Itzan bénéficiait d'un approvisionnement stable en eau.»
Selon lui, cette découverte est significative parce que certains archéologues proposaient que l'effondrement maya avait commencé précisément dans cette région du sud-ouest. Si la sécheresse n'y a pas sévi, elle ne peut pas avoir été la cause initiale du déclin.
«Pourtant, malgré l'absence de sécheresse locale, la population d'Itzan a décliné de façon abrupte pendant la période du classique terminal, entre 1140 et 1000 ans avant le présent, poursuit le chercheur. Les marqueurs de population chutent brutalement, les signes d'agriculture disparaissent, le lieu est abandonné.»
Comment expliquer qu'une communauté disposant d'eau et de conditions favorables ait connu le même sort que ses voisines frappées par la sécheresse?