Moins de caféine permettrait d’atténuer les envies urgentes d’uriner
- Forum
Le 10 août 2020
- Martin LaSalle
Une revue d’études effectuée par la doctorante Mélanie Le Berre, de l’UdeM, indique que diminuer sa consommation de caféine pourrait aider à réduire un type d’incontinence, mais pas les autres.
Certains éléments déclencheurs poussent bon nombre de personnes à ressentir une envie spontanée et irrépressible d’uriner. Or, réduire sa consommation de caféine permettrait d’atténuer ce symptôme d’urgence.
C’est ce qui se dégage de l’analyse de 26 études sur le sujet, effectuée par la doctorante Mélanie Le Berre, sous la direction de la Pre Chantal Dumoulin de l’École de réadaptation de la Faculté de médecine de l’UdeM. L’étude de Mme Le Berre a été publiée récemment dans la revue scientifique Neurourology and Urodynamics.
Un trouble fréquent qui altère la qualité de vie
Les symptômes urinaires peuvent prendre différentes formes, outre celle de l’envie urgente : nycturie (se lever plusieurs fois dans la nuit pour aller uriner), augmentation de la fréquence urinaire, incontinence nocturne et incontinence à l’effort (toux, éternuements, rires…) sont les formes les plus fréquentes.
« Chez les adultes, jusqu’à 47,9 % des hommes et 52,5 % des femmes affirment ressentir souvent certains de ces symptômes urinaires, indique Mélanie Le Berre dans son analyse. Ces symptômes peuvent être très pénibles et altèrent considérablement la fonction et la qualité de vie, et peuvent conduire à l’isolement ainsi qu’à une diminution des activités physiques et sociales. »
Différents exercices de physiothérapie permettent de réduire ces symptômes, mais pour ce qui est de l’incontinence liée aux envies urgentes, la piste de la caféine comme élément déclencheur a fait l’objet de bon nombre de recherches.
« On sait que la caféine est généralement considérée comme un diurétique léger, en particulier pour des doses supérieures à 250 mg, explique Mélanie Le Berre. Par conséquent, bien que l’effet diurétique soit moins certain pour les consommateurs quotidiens en raison de l’accoutumance, la consommation de caféine pourrait généralement accélérer la production d’urine. »
Des études mitigées, sauf pour l’incontinence d’urgence
Parmi les 26 recherches qu’a scrutées la doctorante, 14 étaient des études d’intervention au cours desquelles on comparait, par exemple, l’effet du café et d’une boisson décaféinée sur les symptômes urinaires. Les 12 autres études dites observationnelles consistaient en des sondages sur la consommation de caféine des participants et sur leurs symptômes.
Les résultats des études d’intervention permettent de tirer des conclusions de causalité, c’est-à-dire qu’ils permettent davantage de savoir si le retrait de la caféine est en lien direct avec la diminution des symptômes. Dans le cas des études observationnelles, on ne peut que conclure à un lien d’association entre les deux facteurs.
« Compte tenu de l’hétérogénéité des études, les conclusions quant à l’efficacité de la réduction de la caféine sur l’incontinence globale sont mitigées, mais les études d’intervention suggèrent que diminuer la caféine s’avère efficace pour diminuer les envies urgentes », indique Mme Le Berre.
Un effet sur les muscles pelviens et la vessie
Selon la littérature scientifique, la caféine et les méthylxanthines de la même famille ont un effet excitateur supplémentaire sur le muscle lisse du détrusor – la couche de muscle située dans la paroi de la vessie – en abaissant le seuil de sensation de la phase de remplissage de la vessie.
« Cet effet physiologique soutient notre conclusion quant au rôle de la réduction de la caféine sur les symptômes d’urgence, ajoute la doctorante. Il suggère aussi que les interventions de réduction de la caféine devraient cibler principalement les patients atteints d’envies urgentes et d’incontinence d’urgence car pour plusieurs personnes, réduire la caféine peut diminuer la qualité de vie : il faut tenir compte des risques et des bénéfices avant d’offrir cette option de traitement. »
Réduire l’incontinence pour prévenir les chutes
Spécialiste des interventions de réadaptation auprès des personnes âgées, Mélanie Le Berre manifeste un intérêt pour les moyens de réduire les symptômes de l’incontinence urinaire qui repose notamment sur le fait que cette condition pose un risque de chute chez les aînés.
« En fait, les personnes âgées qui présentent de l’incontinence urinaire sont 50 % plus à risque de chuter que les autres », affirme celle dont le mémoire de maîtrise portait spécifiquement sur le sujet.
Différentes stratégies sont d’ailleurs proposées en physiothérapie, selon les symptômes des personnes et leur situation : encourager la perte de poids pour permettre d’alléger la charge mise sur le plancher pelvien, adapter son activité physique, optimiser son hydratation, suivre un programme d’exercices pour renforcer les muscles du plancher pelvien, développer sa coordination et ses réflexes (notamment en cas de toux et d’éternuements), amorcer une rééducation de la vessie, et opter pour un sevrage progressif des protections.