Coup à la tête et commotion cérébrale chez les tout-petits: une détection précoce des symptômes est cruciale
- Salle de presse
Le 1 juin 2021
- UdeMNouvelles
Lorsqu’un choc vient perturber le fonctionnement du cerveau, la réponse peut être aussi dommageable que chez les enfants plus vieux. Le défi, chez les 0-5 ans, est leur manque d’habiletés communicationnelles pour verbaliser leur état, d’où la nécessité de mettre au point un outil pour que parents et médecins puissent évaluer l’état de santé de l’enfant.
Crédit : GettyLes commotions cérébrales peuvent avoir des conséquences nuisibles chez les tout-petits. Une équipe de recherche a mis au point un outil pour les détecter chez les enfants qui ne parlent pas encore.
Des travaux conduits au CHU Sainte-Justine et à l’Université de Montréal ont permis la mise au point d’un outil unique pour faire l’évaluation post-commotionnelle des enfants au cours de la petite enfance (0-5 ans).
Les traumatismes craniocérébraux (TCC) sont particulièrement répandus chez les tout-petits, car à cet âge, ils ont une moins bonne notion du danger et possèdent des caractéristiques physiques encore en développement qui les rendent plus susceptibles de se blesser.
Néanmoins, il est difficile pour les parents et les cliniciens de détecter les symptômes post-traumatiques compte tenu de la limitation verbale des tout-petits. «Un jeune enfant ne vous dira pas qu’il a mal à la tête ou qu’il se sent étourdi, indique Dominique Dupont, première auteure de l’étude. Cependant, l’évaluation des symptômes postcommotionnels est la pierre angulaire de la gestion et du suivi du patient. Sans documentation, il est difficile de savoir s’il va bien ou non.»
Pour pallier le manque de matériel d’évaluation associé à ce groupe d’âge, l’équipe de recherche de la professeure Miriam Beauchamp, chercheuse au CHU Sainte-Justine, neuropsychologue et professeure titulaire au Département de psychologie de l’Université de Montréal, a conçu un nouvel outil d’observation qui permet aux parents et aux cliniciens d’évaluer l’état de santé de l’enfant.
Les résultats de ces travaux sont présentés dans le Journal of Head Trauma Rehabilitation.
Un effet adverse, même en bas âge
Traditionnellement, on laissait entendre que les TCC subis durant la petite enfance n’avaient pas d’effets adverses importants, car la grande plasticité du cerveau à cette période de la vie permettait une récupération rapide.
«C’est vrai, dans une certaine mesure, mais l’inverse l’est autant, mentionne la professeure Beauchamp. En bas âge, il y a beaucoup de choses qui ne sont pas encore consolidées de façon permanente. Donc, lorsqu’un choc vient perturber le fonctionnement du cerveau, la réponse peut être aussi dommageable que chez les enfants plus vieux. Il nous semblait donc primordial de concevoir un outil pour documenter l’état physique, cognitif et comportemental de ces enfants et permettre une prise en charge clinique adéquate.»
L’outil vise également à documenter la progression des symptômes dans le temps et leur gravité.
La complexité chez les tout-petits
Le défi, chez les 0-5 ans, est leur manque d’habiletés communicationnelles pour verbaliser leur état.
De plus, les symptômes postcommotionnels peuvent facilement être confondus avec des comportements typiques de cette période développementale. «Un enfant d’un an irritable ou qui régurgite son goûter, ça ne surprend personne», déclare Dominique Dupont.
Pour répondre à cette problématique, l’équipe de recherche s’est penchée sur la conception d’un nouveau répertoire d’observations adapté aux jeunes enfants.
Les chercheurs ont inventorié tous les symptômes connus et observés chez les plus âgés: maux de tête, pertes de mémoire, difficultés à se concentrer, hypersensibilité à la lumière et au bruit, irritabilité, problèmes d’équilibre ou de coordination, étourdissements et problèmes de sommeil. Ils ont ensuite répertorié, grâce au soutien de parents d’enfants de la cohorte LION et à l’appui du personnel soignant du service des urgences du CHU Sainte-Justine, des manifestations postcommotionnelles relevées en très bas âge. L’équipe a ensuite décliné ces symptômes sous forme d’observations qui permettent de traduire l’état réel de l’enfant.
«Contrairement aux questionnaires qu’on utilise chez les plus grands, ici, on ajoute des exemples permettant d'expliquer comment les symptômes peuvent se manifester chez un jeune enfant. On a aussi ajouté des observations potentiellement uniques à ce groupe d’âge et qui ne se retrouvent donc pas dans les questionnaires existants, comme des composantes dites de “recherche de réconfort”: est-ce que mon bébé est plus souvent dans mes bras? Est-ce qu’il réclame sa tétine ou sa peluche sans cesse? On utilise aussi des observations appelées de “régression”: est-ce que mon enfant qui était propre ne l’est plus? Se réveille-t-il à toute heure alors qu’il faisait ses nuits?» illustre la professeure Beauchamp.
Transfert vers la clinique
Pour la professeure Beauchamp, «cette étude est très prometteuse, car elle permet de dessiner des patrons qui valident notre inventaire. Nous poursuivons nos recherches pour comparer les symptômes postcommotionnels avec le comportement d’enfants qui n’ont pas subi de blessure dans le cadre d’une étude multicentrique d’envergure au Canada. Ultimement, nous pourrons transférer l’outil vers la clinique à travers tout le Québec et même à l’étranger».
«Cela met également en lumière l’importance pour les parents d’être vigilants afin de noter les changements de comportements chez leur enfant», conclut la professeure Beauchamp.
À propos de l’étude
L’article «Report of Early Childhood Traumatic Injury Observations & Symptoms: Preliminary Validation of an Observational Measure of Postconcussive Symptoms» a été publié dans le Journal of Head Trauma Rehabilitation le 30 avril 2021. La première auteure est Dominique Dupont, candidate au doctorat en neuropsychologie au laboratoire de Miriam Beauchamp. L’auteure principale est Miriam Beauchamp, chercheuse au CHU Sainte-Justine, neuropsychologue et professeure titulaire au Département de psychologie de l’Université de Montréal, directrice du Laboratoire de neuropsychologie développementale ABCs et professeure associée au Département de neurologie et neurochirurgie de l’Université McGill.
L’étude a été financée par une subvention des Instituts de recherche en santé du Canada.
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