La coopération entre molécules pour expliquer comment la vie peut apparaître sur d’autres planètes

La théorie de l’évolution de Darwin n’est probablement pas le seul élément requis pour expliquer l’émergence de la vie: même dans un environnement aride propice à une féroce compétition, la coopération entre certains réseaux de molécules pourrait être à l’origine de l’apparition de la vie sur Terre et, par extension, ailleurs dans l’Univers.

La théorie de l’évolution de Darwin n’est probablement pas le seul élément requis pour expliquer l’émergence de la vie: même dans un environnement aride propice à une féroce compétition, la coopération entre certains réseaux de molécules pourrait être à l’origine de l’apparition de la vie sur Terre et, par extension, ailleurs dans l’Univers.

Crédit : UPV Spectroscopy Group Microwaver Region

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Lorsqu’on découvrira de la vie sur une exoplanète, elle pourrait être le résultat d’une coopération biochimique plus probable dans la nature que ce qu’on croit, selon une étude de l’UdeM.

La théorie de l’évolution de Darwin n’est probablement pas le seul élément requis pour expliquer l’émergence de la vie: même dans un environnement aride propice à une féroce compétition, la coopération entre certains réseaux de molécules pourrait être à l’origine de l’apparition de la vie sur Terre et, par extension, ailleurs dans l’Univers. Et cette coopération pourrait aussi avoir lieu plus facilement que prévu dans la nature.

C’est l’hypothèse qu’émettent le professeur Paul Charbonneau et le doctorant Alexandre Champagne-Ruel, du Département de physique de l’Université de Montréal, dans une étude publiée récemment dans la revue scientifique Life.

Un modèle numérique basé sur la théorie de Darwin

Alexandre Champagne-Ruel

Alexandre Champagne-Ruel

Partant de l’hypothèse selon laquelle la vie a commencé sur Terre grâce à des réseaux de molécules autoreproductrices, les chercheurs ont modélisé par ordinateur divers environnements qui leur ont permis d’observer l’évolution des interactions qui auraient prévalu lors de l’apparition de la vie.

«En physique, nous nous intéressons de façon plus large à l’émergence de la complexité, dont le domaine du vivant, dit Alexandre Champagne-Ruel. Or, plusieurs modèles d’émergence du vivant présupposent une certaine forme de collaboration entre les constituants en jeu.»

Dans un premier temps, son directeur de thèse et lui ont basé leur modèle sur le dilemme du prisonnier, une composante de la théorie des jeux utilisée dans différents domaines scientifiques pour analyser les interactions entre les «joueurs», qui peuvent être en compétition, se comporter de manière parasitique ou coopérer en fonction des avantages qu’ils en tirent.

Puis, ils ont intégré graduellement les trois éléments principaux d’un système darwinien, soit la sélection, l’héritabilité et la variation (ou mutation) – la simulation se déroulant sur une grille dans laquelle les «joueurs» s’affrontent librement et à répétition.

«Durant la simulation, nous comptabilisons les stratégies qui obtiennent les meilleurs pointages et leur permettons de se propager, recréant une dynamique qui a pu prévaloir dans un environnement prébiotique», ajoute l’auteur principal de l’étude.

Un changement brusque apparenté à une transition de phase

Paul Charbonneau

Paul Charbonneau

Au fil des interactions, Alexandre Champagne-Ruel a constaté que les agents ou joueurs parasitiques ont souvent dominé, «ce qui est un résultat connu en théorie évolutive des jeux pour ce type de simulation». Et en incluant un taux d’erreur des agents qui est non seulement héritable, mais également susceptible de muter, «les agents coopérateurs envahissent subitement le système dans pratiquement chacune des simulations, indique-t-il. Dès qu’ils sont placés dans un environnement évolutif qui inclut l’héritabilité et la variabilité, les agents coopérateurs prospèrent même dans un environnement foncièrement compétitif qui subit des perturbations externes importantes».

Cet envahissement soudain des agents coopérateurs ressemble à ce qu’on appelle en physique une transition de phase – c’est-à-dire une réorganisation d’un système qui se produit brusquement et spontanément, comme lorsque l’eau atteint son point d’ébullition.

«Notre modèle renforce l’idée que l’émergence de la vie pourrait s’apparenter à une transition de phase – une hypothèse qui a déjà été formulée dans des travaux antérieurs», illustre le doctorant, qui présentera d’ailleurs ses résultats le 17 mai à Atlanta, à l’occasion de l’AbSciCon 2022, une importante conférence internationale en astrobiologie.

La coopération à l’origine de la vie sur d’autres planètes?

Les résultats de l’étude d’Alexandre Champagne-Ruel montrent donc que, «même en l’absence de génomes perfectionnés et d’organismes au comportement complexe, la coopération peut non seulement émerger spontanément, mais aussi s’établir d’une manière facile et robuste».

«Si la coopération entre molécules et organismes survient aussi facilement dans la nature, cela donne à penser que la vie pourrait donc aussi se manifester dans des environnements défavorables que pourrait détecter dans un futur proche le télescope spatial James-Webb, conclut le chercheur. Ainsi, les astrobiologistes ne  doivent donc négliger aucun indice, car la coopération naturelle – et donc la vie! – pourrait apparaître même au sein d’environnements à priori peu hospitaliers.»

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