Vers une pérennisation des services en médecine vétérinaire à Kuujjuaq

Une partie du village de Kuujjuaq, où une clinique vétérinaire est en construction.

Une partie du village de Kuujjuaq, où une clinique vétérinaire est en construction.

En 5 secondes

La doctorante Léa Delesalle est allée à Kuujjuaq pour documenter les effets d’un programme visant à améliorer la cohabitation entre les humains et les chiens dans cette communauté du Nord-du-Québec.

Les chiens font partie du quotidien des Inuits depuis des générations, mais l’ampleur des populations canines dans les communautés appelle à une prise en charge plus adéquate des chiens pour, entre autres, mieux prévenir les morsures et les éclosions de rage, et réguler leur reproduction.

Axé sur l’approche participative Une seule santé, un vaste programme de recherche est appliqué depuis plusieurs années dans cinq communautés inuites afin d’améliorer la santé des chiens et des humains dans une perspective de prévention des maladies et des incidents.

Ce programme a été élaboré au fil des dernières années par le professeur André Ravel et ses collègues de la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal en collaboration avec le gouvernement du Québec et les partenaires de la communauté inuite de Kuujjuaq.

Et les données recueillies jusqu’ici ont d’ailleurs permis d’embaucher une vétérinaire à temps plein à Kuujjuaq en 2020 (voir l’encadré).

Une première expérience sur le terrain depuis le début de la pandémie

L’ampleur des populations canines dans les communautés nécessite une prise en charge plus adéquate des chiens pour mieux prévenir les morsures et les éclosions de rage, et réguler leur reproduction.

Effectuant son doctorat sous la direction d’André Ravel, l’étudiante Léa Delesalle revient justement d’un séjour à Kuujjuaq organisé pour évaluer l’efficacité de ce programme et les conditions de sa mise en œuvre.

«J’ai déjà visité des communautés nordiques du Québec, mais c’est la première fois que je me rendais à Kuujjuaq, où le programme a été ralenti par les deux années de pandémie, indique-t-elle. Notre équipe avait pour mandat de reprendre contact avec les partenaires sur place, dont plusieurs ont changé.»

En plus de l’analyse des méthodes de décision et des mécanismes sous-jacents aux effets des interventions déjà éprouvées, Léa Delesalle a donc rencontré les acteurs clés et mené un sondage auprès de la population de Kuujjuaq et des partenaires du programme.

Mais la tâche s’est avérée plus difficile que prévu.

«Il faut gagner la confiance des gens, car ils sont habitués à voir des universitaires aller et venir dans leur communauté sans en retirer d’avantages concrets à court terme, évoque Léa Delesalle. En outre, plusieurs profitent de l'été pour aller pêcher et chasser en dehors du village.»

Si elle n’a pu obtenir les 150 questionnaires remplis qu’elle espérait, la chercheuse a réalisé bon nombre d’entrevues avec des habitants qui ont témoigné des changements observés – ou pas – vis-à-vis des chiens au cours des deux dernières années, partagé leur expérience des services vétérinaires et parlé de leur participation aux autres activités offertes dans le cadre du programme.

«J’ai aussi été en mesure de rencontrer une bonne partie des acteurs du programme, ce qui me permettra de mieux comprendre leurs rôles respectifs et les obstacles rencontrés dans la mise en place du programme», ajoute Léa Delesalle.

Pour la pérennisation des soins vétérinaires

École Jaanimarik

Dans le cadre du programme, plus d’une centaine d’élèves de l’école Jaanimarik (photo) ont participé à des activités éducatives sur les chiens animées par la vétérinaire et un conducteur de chiens de traîneau du village – ou «musher».

L’intervention sur le terrain de l’équipe de recherche d’André Ravel marque l’aboutissement de plus de huit années de recherche en collaboration avec les partenaires locaux et elle s’inscrit dans un vaste programme visant à améliorer la santé des chiens et des humains dans la région.

Aussi, l’évaluation du programme qu’effectuera la doctorante permettra de le bonifier et soutiendra les demandes de subvention du village de Kuujjuaq pour le prolonger.

«Plus largement, mes recherches permettront de désigner les éléments clés d’un plan d’action durable, socialement acceptable et efficace pour améliorer la santé des humains et des chiens dans les communautés autochtones nordiques du Canada, conclut-elle. Elles apporteront aussi un éclairage sur les éléments facilitateurs et les obstacles à considérer dans la mise en œuvre du plan d’action: ainsi, elles enrichiront nos connaissances, encore minces, sur la prise en compte d’enjeux Une seule santé dans les relations humains-chiens dans ce contexte particulier.»

  • Léa Delesalle

    Léa Delesalle au Forum du village

  • La future clinique vétérinaire de Kuujjuaq en construction: d’ici quelques mois, elle sera fonctionnelle et comportera, à terme, une salle de radiologie, un bloc opératoire et une unité d’hospitalisation.

Construction d’une première clinique vétérinaire permanente à Kuujjuaq

Dans la foulée du programme, une première clinique vétérinaire permanente est en construction à Kuujjuaq et elle devrait être opérationnelle en 2023 grâce au partenariat avec la Société du Plan Nord.

En plus d’offrir différents services tels que la vaccination contre la rage et autres infections ainsi que la stérilisation pour freiner la surpopulation de chiens, la clinique disposera des installations nécessaires à la réalisation de chirurgies.