Dormez suffisamment et vivez plus vieux!

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Suivre les recommandations sur la durée du sommeil est associé à une augmentation de la longévité, selon une étude de la professeure du Département de psychologie Julie Carrier et ses collègues.

Julie Carrier

Julie Carrier

Crédit : Amélie Philibert | Université de Montréal

Vous êtes âgé de 18 à 64 ans et dormez de sept à neuf heures par jour? Ou vous avez plus de 65 ans et dormez de sept à huit heures par jour? En respectant ces recommandations canadiennes sur la durée du sommeil, vous pourriez vivre plus longtemps.

Voilà les résultats d’une étude menée par Julie Carrier, chercheuse au Centre d’études avancées en médecine du sommeil et professeure au Département de psychologie de l’Université de Montréal, et ses collègues de l’UdeM et des universités d’Ottawa, Laval et Queen’s.

De fait, l’étude démontre que dormir suffisamment pourrait augmenter la longévité de 1,2 an par rapport à une durée de sommeil en deçà des recommandations. Aussi, suivre les recommandations plutôt que les dépasser permettrait d’accroître son espérance de vie de 2,6 ans.

Des données parlantes et un bémol

Les preuves ne sont plus à faire: dormir peu est associé à un risque accru de problèmes de santé. Nombre d’études montrent que le manque de sommeil entraîne à court terme une dégradation dans la régulation de la glycémie, une diminution de l’efficacité du système immunitaire, des problèmes cardiovasculaires, cognitifs et de mémoire, une augmentation de la somnolence, indique Julie Carrier.

«À long terme, on parle alors d’une hausse de divers troubles de santé physique, émotionnelle et cognitive. Par exemple, en connaissant le nombre d’heures que les gens dorment, on peut prévoir le développement de maladies neurodégénératives», ajoute-t-elle.

Si les résultats de cette étude peuvent inciter à conclure que dormir «trop» serait aussi dommageable, la chercheuse tient à préciser qu’aucune étude expérimentale n’a jamais prouvé que de longues heures de sommeil avaient des effets nocifs sur la santé.

«Il faut comprendre que l’étude découle d’un croisement entre des données de sommeil autodéclarées et des données statistiques sur les risques de mortalité associés à la durée du sommeil, mentionne la chercheuse. Il est donc impossible d’isoler parfaitement le sommeil dans tous les paramètres de la santé. Aussi, nous savons que le nombre d’heures de sommeil requises chez les petits et grands dormeurs dépend en partie d’un facteur génétique, mais nous ignorons précisément quels gènes sont en cause et s’ils sont, par exemple, également liés à une mortalité précoce. Finalement, prenons en compte que le fait de dormir soudainement beaucoup plus peut être le signe d’un problème sous-jacent, comme une dépression. Donc, dormir trop devient inquiétant quand c’est en rupture avec les habitudes de sommeil et il faut alors aller consulter.»

Valoriser le sommeil, et vite

Julie Carrier s’intéresse au sommeil depuis plus de 30 ans. Son cheval de bataille? Que le sommeil soit autant encouragé que l’alimentation saine ou l’activité physique en termes de déterminants de la santé.

Et maintenant que l’équipe de recherche a montré que respecter les recommandations canadiennes sur la durée du sommeil permet de vivre plus longtemps, elle souhaite que les gouvernements, mais aussi la population en prennent conscience.

«Une durée de sommeil suffisante protège contre de nombreuses maladies chroniques et la mortalité prématurée, insiste la professeure. Il faut que les perceptions changent, surtout chez les jeunes, qui ont souvent une vie sociale, professionnelle et familiale très prenante et qui ont tendance à couper dans leurs heures de sommeil pour que tout rentre dans l’horaire. Ou chez les professionnels qui “se vantent” de dormir peu pour être plus “productifs”. Jamais personne ne dirait avec fierté n’avoir mangé que de la malbouffe pendant une semaine.»

Julie Carrier renchérit qu’un sommeil insuffisant a aussi un poids économique sur le système de santé. Les gouvernements, les écoles et les entreprises auraient ainsi tout avantage à élaborer des messages efficaces et simples sur l’importance du sommeil.

C’est d’ailleurs habitée par cette conviction qu’elle a lancé en 2019 la campagne canadienne bilingue Sleep on It!/Dormez là-dessus! pour informer le public des bienfaits du sommeil, proposer des solutions aux personnes qui souffrent de troubles du sommeil et faire de la qualité du sommeil une priorité pour la santé publique.

«Faisons comprendre les dangers à ceux et celles qui réduisent volontairement leurs heures de sommeil et aidons les gens qui vivent avec des troubles du sommeil à dormir mieux. C’est un enjeu de santé publique», conclut Julie Carrier.

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