Cosmétiques: des produits chimiques éternels font partie de la recette

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Une étude parue dans la revue «Environmental Science & Technology» révèle que plusieurs produits cosmétiques et de soins personnels canadiens contiennent des PFAS, ces produits aux effets incertains.

Sébastien Sauvé

Sébastien Sauvé

Crédit : Amélie Philibert | Université de Montréal

Lisse, mousseux, hydrofuge: ces caractéristiques sont extrêmement recherchées dans les produits de beauté. Mais pour obtenir ces qualités, les fabricants utilisent parfois des ingrédients qui contiennent du fluor – y compris des substances per- et polyfluoroalkyles (PFAS), potentiellement dangereuses.   

Une équipe de recherche de l’Université Carleton et de l’Université de Montréal vient de publier des résultats d’analyse démontrant que certains cosmétiques et produits de soins personnels étiquetés comme ayant des composants fluorés contiennent également des PFAS et que ces «produits chimiques éternels» ne figurent pas nécessairement dans la liste des ingrédients. 
 
«Bien que les PFAS les plus préoccupants ne soient plus utilisés dans de nombreux produits de beauté, dans certains cas, ils ont été remplacés par d'autres classes de PFAS dont les conséquences sur la santé et l'environnement restent inconnues», souligne Sébastien Sauvé, professeur au Département de chimie de l’Université de Montréal et coauteur de l’étude. 

Une étude récente a révélé que des cosmétiques aux États-Unis et au Canada contiennent encore ces substances, mais on ne savait pas si ces composés se trouvaient dans les produits de soins personnels comme les crèmes, les nettoyants pour le corps, les shampoings et les crèmes à raser.  

La professeure Amy Rand, de l’Université Carleton, et ses collègues ont donc voulu examiner une variété de produits de beauté qui répertoriaient des composants fluorés dans leurs formulations pour détecter la présence de PFAS. 
 
En 2020 et 2021, l'équipe a acheté 38 de ces produits de beauté de marques connues vendus dans les commerces canadiens et en ligne qui contenaient des composés organofluorés et les a analysés à la recherche de types plus anciens de PFAS.  

Présents dans le contenant, mais pas toujours dans la liste des ingrédients

Tous les échantillons présentaient des niveaux mesurables de PFAS, mais certains des composés décelés n'étaient pas répertoriés comme ingrédients dans les produits. Les niveaux mis au jour dans les produits de soins personnels étaient généralement plus faibles que dans les cosmétiques. L'équipe a constaté que deux fonds de teint, étiquetés avec des termes analogues à hydrofuge, avaient des niveaux élevés de PFAS. Dans l'un d'entre eux, ces composés se comptaient même par milliers de parties par million, un niveau qui dépasse la règlementation canadienne proposée sur les PFAS.  

Plus de 200 types de PFAS dans le rituel beauté quotidien des Canadiens

Poussant plus loin ses analyses, l’équipe a sélectionné un sous-ensemble d'articles achetés dont l’analyse a révélé plus de 200 autres PFAS, y compris les classes émergentes qui remplacent les anciens composés.  

Une classe émergente – les acides perfluoroalkylcarboxyliques remplacés par un monohydrogène – a été relevée dans 30 % des produits du sous-ensemble dans des proportions allant de moins de une partie par milliard à des centaines. Au cours de cette analyse, l’équipe de recherche a également découvert une variété de PFAS de structure différente qui ne semblait pas être liée aux PFAS initialement ajoutés aux produits, ce qui pourrait être le résultat du vieillissement des produits ou de la contamination par des impuretés dans les matières premières.  

Ces résultats mettent en lumière la diversité des PFAS et leur présence avérée dans certains cosmétiques et produits de soins personnels actuellement vendus au Canada. Toutefois, des travaux supplémentaires sont nécessaires pour comprendre d'où proviennent les PFAS inattendus.  

À propos de cette étude

L’article «Targeted and Suspect Screening of Per- and Polyfluoroalkyl Substances in Cosmetics and Personal Care Products», par Keegan J. Harris, Gabriel Munoz, Vivian Woo, Sébastien Sauvé et Amy A. Rand, a été publié le 30 septembre 2022 dans la revue Environmental Science & Technology de l’American Chemical Society. doi: 10.1021/acs.est.2c02660. 

L’étude a été financée par des subventions à la découverte du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada et du Fonds des leaders John-R.-Evans de la Fondation canadienne pour l'innovation et par le Fonds de recherche du Québec – Nature et technologies.

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