Cancer: quand une bactérie diminue l’efficacité de l’immunothérapie

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Une étude révèle que la présence d’anticorps liés à une infection à la bactérie «H. pylori» diminuerait le taux de survie des patients traités par immunothérapie pour un mélanome.

Helicobacter pylori est une bactérie à l’origine d’une des infections de l’estomac les plus répandues dans le monde.

La majorité des personnes atteintes d’une infection à H. pylori ne présentent aucun symptôme, bien que la bactérie puisse causer des ulcères gastriques et un cancer de l’estomac.

Une nouvelle étude révèle que la séropositivité pour cette bactérie – lorsqu’un examen sérologique confirme la présence d’anticorps attribuables à une infection antérieure – diminuerait la réponse à l’immunothérapie des gens qui souffrent d’un mélanome métastatique, un cancer avancé de la peau.

Cette étude a été réalisée par la Dre Marion Tonneau, chercheuse au Centre de recherche du CHUM dans l’équipe du Dr Bertrand Routy, professeur au Département de médecine de l’Université de Montréal. Le Dr Routy étudie le potentiel de l’immunothérapie combinée avec une modification du microbiote intestinal – par une greffe fécale – contre le mélanome.

L’équipe, qui s’intéresse aux milliards de bactéries de l’intestin et à leurs effets sur le système immunitaire, a mené des travaux auprès d’une centaine de patients atteints d’un mélanome avancé et traités par immunothérapie. Ceux qui étaient séropositifs pour H. pylori avaient un taux de réponse à l’immunothérapie plus faible que les patients négatifs, en plus de présenter une survie globale considérablement plus courte.

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Marion Tonneau

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Les patients de cette étude étaient tous traités par inhibiteurs de points de contrôle immunitaire (ICI), une forme d’immunothérapie qui figure aujourd’hui au premier plan de la prise en charge des personnes souffrant d’un mélanome.

Les ICI activent de façon ciblée le système immunitaire pour qu’il attaque avec précision les cellules cancéreuses. Grâce à des travaux récents du Dr Routy, la composition du microbiote intestinal est désormais considérée comme l’une des caractéristiques du cancer et plusieurs stratégies visant à la modifier pour améliorer l’activité des ICI – comme la greffe fécale – sont à l’étude.

Toutefois, les recherches sont plus largement axées sur le tractus gastro-intestinal inférieur (intestins, appendice, rectum), plutôt que sur la partie supérieure (bouche, pharynx, œsophage, estomac).

Pour la Dre Tonneau, les résultats de cette étude devraient inciter la communauté scientifique à s’intéresser davantage à cette portion du système digestif dans le domaine de l’immuno-oncologie.

«Helicobacter pylori colonise la muqueuse de l’estomac et est présente chez plus de 50 % de la population mondiale, rappelle la chercheuse. Au-delà de l’effet local dans l’estomac mis en lumière, notre étude donne à penser que la séropositivité pour H. pylori a le potentiel d’altérer la réponse immunitaire systémique, notamment en modifiant la polarisation des lymphocytes T. C’est une autre preuve que le microbiote intestinal a un rôle à jouer dans les cancers, mais pas seulement le cancer intestinal.»

La chercheuse ajoute qu’il reste indispensable de valider ces résultats par des études prospectives plus larges et de mettre au point de nouvelles stratégies pour éradiquer H. pylori dans le cadre de traitements immuno-oncologiques.

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