Sarah Kimmins: la santé des hommes garante de celle de leur progéniture

Sarah Kimmins

Sarah Kimmins

Crédit : Amélie Philibert | Université de Montréal

En 5 secondes

Si la nouvelle professeure en épigénétique se passionne autant pour la santé des hommes, c’est que celle-ci a une incidence non seulement sur leur fertilité, mais aussi sur les prochaines générations.

Dès qu’il est question de la santé des enfants à naître, le rôle de la mère est systématiquement considéré. Mais voilà que l’influence du père suscite de plus en plus l’intérêt.

Depuis près de 20 ans, Sarah Kimmins, professeure titulaire au Département de pathologie et biologie cellulaire de l’Université de Montréal, se penche sur les mécanismes en jeu dans l’héritage épigénétique des parents en accordant une attention particulière à la santé des hommes et à la manière dont leur mode de vie et les facteurs environnementaux modifient leur fertilité et la condition de leur descendance.

L’équipe de recherche qu’elle dirige depuis peu au Centre de recherche du CHUM s’emploie à mettre en lumière le rôle de l’épigénome du sperme dans le développement de l’embryon et la transmission intergénérationnelle des maladies. Le but: améliorer les stratégies de prévention et d’intervention en matière de santé masculine pour améliorer la fertilité et la santé des enfants.

«Les modifications de la chromatine dans le sperme avant la conception, provoquées par l’exposition à des substances toxiques, l’alimentation ou l’obésité, sont associées à un risque accru de maladies chroniques ou de troubles du développement neurologique chez l’enfant. La façon dont les hommes vivent aujourd’hui aura une incidence sur la santé des générations de demain», explique Sarah Kimmins.

Traduire les connaissances en politiques de santé

Les dommages causés au sperme sont-ils réparables? D’après ses travaux menés sur un modèle animal, ceux liés au régime alimentaire s’avèrent réversibles. La possibilité de modifier l’épigénome des hommes fera l’objet de prochaines études, indique l’experte en épigénétique et transmission héréditaire.

Pour l’heure, son équipe, de concert avec des collègues de l’étranger, examine notamment les conséquences de l’exposition au DDT (dichlorodiphényltrichloroéthane) sur l’épigénome du sperme. Ce pesticide longtemps utilisé à travers le monde est désormais banni par l’Organisation mondiale de la santé pour ses effets néfastes sur la santé des populations.

«Le DDT est toujours autorisé dans des pays comme l’Inde et l’Afrique du Sud pour lutter contre la malaria. Or, la toxine accroît les risques de malformations congénitales et altère le développement neurologique. On remarque aussi une exposition élevée au produit dans le nord du Canada et au Groenland en raison des courants océaniques et des schémas météorologiques. Le réchauffement climatique pourrait faire en sorte que de plus en plus de gens soient affectés. Nous espérons que nos recherches contribueront à mettre en place des politiques de santé responsables», plaide celle qui préside le comité d’andrologie de la Société canadienne de fertilité et d’andrologie et fait partie d’un groupe de travail international sur la santé reproductive masculine.

Un nouveau départ

Formée à l’Université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse, et à l’Institut de génétique et de biologie moléculaire et cellulaire de Strasbourg, en France, Sarah Kimmins a occupé une chaire de recherche du Canada de niveau 1 à l’Université McGill avant de rejoindre les rangs du Département de pathologie et biologie cellulaire de la Faculté de médecine de l’UdeM.

Pour elle, ce changement est synonyme de nouveaux collègues, de nouvelles idées et d’un nouvel environnement. «L’expertise des chercheurs en reproduction de l’Université de Montréal est remarquable et le CHUM est un milieu extraordinaire en matière de recherche translationnelle grâce à sa clinique de fertilité. C’est le meilleur des deux mondes!» conclut-elle.