La science au service de la population
- UdeMNouvelles
Le 14 novembre 2023
- Catherine Couturier
Récemment nommée à la présidence de l’Académie canadienne des sciences de la santé, Marie-France Raynault veut faire connaître l’organisme et son rôle de conseil.
«L’Académie canadienne des sciences de la santé [ACSS] et les autres sociétés savantes sont très connues au Canada anglais, mais beaucoup moins au Québec; il y a vraiment deux solitudes», dit Marie-France Raynault, professeure émérite du Département de médecine sociale et préventive de l’Université de Montréal. Si par le passé les Québécois n’avaient pas beaucoup d’intérêt pour ce genre de structure honorifique, «les choses ont changé», assure la nouvelle présidente de l’Académie. Faire connaître l’organisme est d’ailleurs l’un de ses objectifs, elle qui en est devenue membre en 2007 et qui siégeait à son conseil d’administration depuis 2019.
Sortir de sa tour d’ivoire
Longtemps honorifique, le rôle des trois sociétés savantes canadiennes (la Société royale du Canada, l’Académie canadienne du génie et l’ACSS) a évolué au début des années 2000. «Le gouvernement canadien a souhaité qu’elles soient aussi au service de la population et puissent faire des évaluations basées sur la science pour aider les décideurs canadiens», raconte Marie-France Raynault. En 2004, l’Institut canadien de médecine académique est ainsi devenu l’Académie canadienne des sciences de la santé.
«C’est passé d’une organisation très honorifique, qui accueillait surtout des médecins chercheurs, à une académie diversifiée dans ses contributions professionnelles», remarque-t-elle. Infirmiers, vétérinaires, dentistes, éthiciens, entre autres, y ont aujourd’hui une voix et l’organisme reconnaît également la contribution des sciences sociales en santé de même que l’expertise des administrateurs de haut niveau dans le système de santé.
Adoptant une approche basée sur les données probantes, l’ACSS a pour mission de faire des évaluations qu’elle soumet au gouvernement et aux instances dirigeantes pour améliorer la santé de la population canadienne. «Nous ne faisons pas de recommandations, mais nous désignons des pistes de solution», note Marie-France Raynault.
Si traditionnellement l’Académie proposait des sujets à examiner, elle s’est aperçue que la portée de ses évaluations était plus grande «lorsqu’il y avait un intérêt de la part des gens», soulève la présidente. Les besoins sont donc discutés avec les différentes agences et les sujets traités sont variés: autisme, démence, syndrome d’alcoolisme fœtal, ressources humaines en santé… En plus de recenser la littérature scientifique, les membres de l’Académie consultent des organismes et des personnes touchées par les thèmes abordés.
«C’est une façon intéressante de faire de la science: on partage et on échange des connaissances au lieu de faire de la science en vase clos, affirme-t-elle. Après l’évaluation, on peut dire qu’on a fait le tour de la question et que les pistes de solution ont été validées avec les personnes qui devront passer à l’action.»
Avoir une influence
L’Académie permet à ses membres d’avoir un réel effet sur les politiques publiques et les décisions. «La dernière évaluation, sur les ressources humaines en santé pour assurer la relève durable, a été utilisée par les Instituts de recherche en santé du Canada pour un appel de propositions dans le domaine, dit Marie-France Raynault. Nous ne sommes pas un lobby. Nos membres sont des gens qui ont réalisé des choses dans leur carrière et qui sont prêts à se mettre au service de la population canadienne, bénévolement.» Pour augmenter leur participation aux commissions parlementaires, l’Académie a mis sur pied une formation destinée à ses membres à ce sujet.
Parce que, pour la présidente, être professeur-chercheur vient avec une responsabilité envers la population canadienne. «La société a des attentes par rapport à nous et c’est légitime. Elle a investi dans notre parcours universitaire et nous pouvons redonner à la hauteur de nos compétences», remarque-t-elle.
Un appel à s’engager
Dans son objectif de mieux faire connaître à la communauté de recherche québécoise l’ACSS et de faire reconnaître l’expertise en recherche francophone, Marie-France Raynault espère voir toutes les facultés universitaires concernées désigner des candidats et candidates dans le corps professoral et les soutenir dans leur mise en candidature. «Je ne connaissais pas moi-même l’Académie en 2007. C’est le doyen de la Faculté de médecine de l’UdeM de l’époque, Jean-Lucien Rouleau, qui m’a convaincue de soumettre ma candidature et qui m’a aidée à monter un dossier», raconte-t-elle.
Les chercheuses et chercheurs qui souhaiteraient devenir membres de l’ACSS doivent en effet être parrainés. Le processus de nomination sera lancé en ligne en janvier. Une occasion parfaite pour eux d’accroître leur influence. «La plupart des chercheurs et chercheuses en santé ne se contentent pas de publier. La reconnaissance scientifique, c’est bien, mais l’utilisation des connaissances est la plus grande récompense. Certains ne trouvent pas le créneau pour le faire, mais c’est ce que l’Académie offre», conclut-elle.